Vailhé, LETTRES, vol.3, p.558

21 feb 1850 Nîmes, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Projet d’établissement à Paris. -On pourrait l’essayer dans dix-huit mois, sans sacrifier celui de Nîmes; pour cela, il lui faudrait un sous-directeur. -Le noviciat serait alors à Paris avec tous les religieux, mais il lui manque un maître

Informations générales
  • V3-558
  • 0+680|DCLXXX
  • Vailhé, LETTRES, vol.3, p.558
Informations détaillées
  • 1 COLLEGE DE NIMES
    1 COMMUNAUTES ASSOMPTIONNISTES
    1 ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE
    1 FONDATION DES ASSOMPTIONNISTES
    1 GRADES UNIVERSITAIRES
    1 MAITRE DES NOVICES ASSOMPTIONNISTE
    1 NOVICIAT DES ASSOMPTIONNISTES
    1 TIERS-ORDRE MASCULIN
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    2 CARDENNE, VICTOR
    2 CART, JEAN-FRANCOIS
    2 CHARAIX, CHARLES MORE DE
    2 GAY, CHARLES-LOUIS
    2 MARGUERYE, FREDERIC DE
    2 OLIER, JEAN-JACQUES
    2 PERDRAU, JOSEPH
    2 PERRETTE
    2 SAUGRAIN, HIPPOLYTE
    3 AVIGNON
    3 MENDE
    3 MIDI
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 PARIS, COLLEGE STANISLAS
    3 PARIS, FAUBOURG DU ROULE
    3 PARIS, RUE DES POSTES
    3 SAINT-FLOUR
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS (1).
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • le 21 février 1850.
  • 21 feb 1850
  • Nîmes,
La lettre

Ce n’est ni de vous ni de moi que je viens causer aujourd’hui, ma chère fille, mais de la possibilité de transférer le centre de l’Assomption des hommes à Paris. Je vous prie donc en commençant de mettre à part cette lettre, afin que nous y revenions plus tard, s’il en est besoin.

Hippolyte est arrivé hier, la tête et le coeur pleins de tout ce que vous lui avez dit et de toutes vos bontés pour lui et pour nous. Nous avons causé fort longuement. J’ai réuni quelques-uns des nôtres à plusieurs reprises; j’ai même parlé à l’évêque, qui, sans nous protéger, de peur de se compromettre, commence à nous prendre chaque jour plus au sérieux et nous porte tout l’intérêt dont il est capable. Or, voici à quoi nous sommes arrivés:

1° Qu’il faut ne songer à donner de la vie à l’oeuvre que lorsque nous aurons une maison à Paris;

2° Qu’il faut s’occuper de l’avoir au plus tôt, mais qu’il n’est guère possible d’y songer avant dix-huit mois;

3° Que s’éloigner de Nîmes, avant que la maison ait traversé la crise qui lui est probablement réservée d’ici à un an par l’effet de la concurrence des Jésuites qui s’établissent à Avignon, ce serait une véritable témérité, à moins que l’on ne pût remplir certaines conditions que voici: d’abord, un homme pour faire à Paris les fonctions de directeur et de maître des novices; ici, quelqu’un qui puisse me suppléer d’une manière convenable aux yeux des parents. Ne vous ai-je pas présenté, il y a deux ans, un certain abbé de Charraix, qui alors était auprès de l’évêque de Saint-Flour? C’est un jeune homme de bonne famille, très bien sous le rapport de la tournure, de l’usage du monde et de la piété, avec une assez grande facilité d’élocution, assez d’esprit, pas trop d’instruction, mais beaucoup de douceur de caractère, qualités des plus propres à enjôler les parents. Les circonstances font qu’il est ici depuis trois ou quatre jours, et il y séjournera probablement sept à huit encore. A plusieurs reprises, il m’a témoigné son regret de ne pas avoir accepté le collège Stanislas, qu’on m’avait chargé de lui offrir dans le temps. Il est depuis deux ans à Mende, où il s’ennuie comme on ne peut pas. A plusieurs reprises, il m’a parlé comme ayant envie de mener une vie comme la nôtre. J’ai eu l’air de ne pas comprendre, mais il est évident que, s’il y revient, j’aurai la plus belle occasion de lui offrir de venir ici comme sous-directeur. Or, s’il acceptait, bien des choses s’arrangeraient. Je travaillerais immédiatement à lui former un personnel de tertiaires; lui, bien entendu, se mettrait du Tiers-Ordre.

Je retirerais de l’Assomption de Nîmes tous les religieux et je les enverrais à Paris préparer le noviciat. mais il faudrait en même temps quelqu’un qui y fût bon maître des novices. Cet homme quand l’aurons-nous? C’est encore là ce qui m’arrête. Peut-être pourrions-nous avoir M. Perdreau, mais je préférerais de beaucoup M. Gay, puisqu’il vous va. Mais, encore une fois, pouvons-nous compter sur M. Gay ou sur M. Perdreau? Là est toute la question. Si, d’ici au mois d’août, vous croyez pouvoir déterminer M. Gay à nous venir, tout sera dit. Mais le voudrat-il? Le pourra-t-il? Et, s’il ne le veut ni ne le peut, comment former un noviciat sans maître des novices? Que je sois ce maître-là, c’est impossible, à moins de vouloir que la maison de Nîmes ne croule. Il serait bien mieux, puisque vous croyez à la possibilité d’avoir M. Gay, de le pousser à venir l’année prochaine dans le Midi. Il ferait son noviciat d’abord, pour son compte, et puis se préparerait à connaître l’esprit qu’il devrait communiquer plus tard. Ce serait peut-être aller plus lentement, mais bien plus sûrement.

La question de ne pas m’exposer à trouver la place prise me touche peu. Les Jésuites, s’ils s’établissent, se poseront à la rue des Postes, où ils ont un immense local, ils nous laisseront le faubourg du Roule, qui est le point que je préférerais pour mon compte. Ensuite, une foule de parents, qui consentiraient à ce que leurs enfants reçoivent une éducation chrétienne, ne voudront pas les placer chez les Jésuites. Je crois qu’à Paris il y aura place pour tous, et, hors de Paris, je pense qu’il faut suivre le cas de M. Olier, n’aller que là où il n’y a personne.

Je dois ajouter que je voudrais bien voir Hippolyte bachelier et Cardenne licencié, avant de les envoyer à Paris. Cela ferait un très bon effet; et, quant à leurs études, il est évident que, s’ils ne s’y mettent pas à présent un peu ferme, ils n’en viendront jamais à bout. J’en reviens toujours à mes moutons; il me faut dix-huit mois, à moins que Dieu ne me prouve par quelque événement extraordinaire que je puis aller à Paris dans six. Je suis convaincu que, si nous allons à Paris, les sujets ne nous manqueront pas; mais ils ne seront pas aussi abondants, il faut bien le dire, qu’on semble l’espérer.

J’oubliais de vous faire observer que si nous retirions tous les religieux de l’Assomption de Nîmes, dans deux ans nous pourrions les renvoyer, avec assez d’utilité, en assez grand nombre pour pouvoir se poser avec autorité au-dessus des tertiaires qui auraient ici occupé l’autorité pendant notre absence. Il me semble que toutes choses pourraient même y gagner. Mais, je le répète, tout cela veut encore beaucoup de réflexions et surtout beaucoup de prières; car, enfin, tous ces beaux projets, c’est un peu l’histoire de Perrette et du pot au lait, et, quelque bien posé que soit le coussinet, il faut bien s’attendre à ce que toutes nos belles combinaisons tombent par terre.

Je n’ai pas le temps d’aller plus loin. Je m’arrête et suis tout vôtre en Notre-Seigneur.

Notes et post-scriptum
1. D'après une copie.