Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.77

6 sep 1851 Valbonne, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

IL s’explique sur l’expression qui l’a peinée. -Certes, il a souffert du scepticisme dont elle grevait son amitié, mais il est allé au-delà.- Sa dévotion à la sainte humanité de Jésus-Christ lui inspirera des dispositions d’humilité, d’amour et de paix.

Informations générales
  • T1-077
  • 71
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.77
  • Orig.ms. ACR, AD 781; D'A., T.D. 21, n. 38, pp. 27-28.
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 AMITIE
    1 AMOUR DIVIN
    1 DEPASSEMENT DE SOI
    1 DISCIPLINE INSTRUMENT
    1 FAIBLESSES
    1 HUMANITE DE JESUS-CHRIST
    1 HUMILITE
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 PAIX DE L'AME
    1 PATERNITE SPIRITUELLE
    1 REFORME DU COEUR
    1 RENDEMENT DE COMPTE
    1 SOUFFRANCE
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 SOUFFRANCE SUBIE
    1 UNION DES COEURS
    1 VOIE UNITIVE
    2 LAURENT, CHARLES
    3 PARIS
    3 VALBONNE
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • 6 sept[embre 18]51.
  • 6 sep 1851
  • Valbonne,
La lettre

Ma chère fille,

Plus je cherche et moins je puis me persuader que j’aie voulu appliquer à ce qui se passe de moi à vous ce fameux sans espoir de retour, qui vous a fait tant de peine. Il faut que ce soit tombé de ma plume tout autrement que je ne le pensais. Du reste il m’est très facile de vous répondre très clairement, et vous comprendrez tout le fond de mon âme.

1° Quand je me mets en présence de Dieu pour m’unir à lui, autant que j’en suis capable, je cherche, en effet, à l’aimer en ne m’appuyant d’une manière absolue que sur lui; et je pense bien que vous en faites autant, et qu’en ce sens nous devions être disposés à servir toute créature sans espoir de retour. Si c’est en ce sens-là que ma lettre s’exprime, je suis prêt à le répéter et vous devez le répéter tout comme moi.

2° Etant donné que Dieu veut que les chrétiens se soutiennent et s’aident réciproquement, vous êtes bien la personne sur qui je m’appuie avec le plus de confiance, que je tiens le plus à porter. Maintenant que vous m’ayez passablement fait souffrir par votre scepticisme sur mon amitié pour vous, cela est très vrai, et le meilleur moyen de faire disparaître la souffrance, c’est de faire disparaître votre scepticisme. Or ce scepticisme et cette souffrance ont pu diminuer un peu le repos si grand que j’avais en votre amitié, mais tout cela est absolument entre vos mains.

Je désire bien sincèrement vous être tout ce qu’il y a de meilleur en ce monde, et le fond de votre âme ou j’ai pénétré, je ne veux m’en retirer qu’autant que Dieu y trouverait sa gloire; autrement, ma chère fille, je désire que le fond de votre âme m’appartienne tout comme le fond de la mienne vous appartient. Je ne me dissimule pas que je pourrais trouver auprès de vous un peu plus de joie, mais ceci c’est votre affaire, et je ne vous la demande pas. Il m’est peut-être bon de ne pas trop la trouver. Plus je me sonde, plus je trouve en moi pour vous amitié complète, absolue, un peu sèche à cause de vos doutes. A qui de vous ou de moi à les faire cesser? Peut-être à tous les deux. S’il y a de ma faute, je vous promets de tout faire disparaître. C’est, je crois, vous parler avec assez de franchise; je n’y puis rien ajouter, parce que c’est tout, et je conclus que du jour où vous aurez confiance en l’affection de votre père, vous lui rendrez votre amitié parfaite.

Je passe à la seconde partie de votre rendement de compte. Je comprends bien toutes vos souffrances et vos défaillances. C’est pour cela que je vous avais offert de prolonger mon séjour à Paris. Ai-je eu tort de ne pas rester, malgré votre refus? C’est possible. Je crois pourtant que pour le bien général il a mieux valu que je partisse. De tout ce que vous me dites, il résulte pour moi une observation générale, c’est que vous n’êtes pas assez sous la main de Notre-Seigneur, ni assez dans son coeur. Je vous conjure, puisque vous avez repris votre dévotion à la sainte humanité de Jésus-Christ, de développer beaucoup les dispositions surnaturelles qu’elle vous inspirera, surtout les dispositions d’humilité, d’amour et de paix. Puisque vous avez négligé plusieurs disciplines, vous en prendrez une jusqu’au sang, si votre santé vous le permet.

Merci de la préoccupation que vous cause ma pauvre carcasse; je vais beaucoup mieux. Valbonne m’a guéri, et le café de glands sera, je l’espère, employé une fois. Je me tiens en présence de Dieu, cherchant à me livrer à une confiance filiale à tout ce qu’il veut de moi.

Adieu, bien chère fille. Croyez-moi, ayez un peu plus de foi en votre père. Vous me faites quelquefois comprendre combien le doute offense Dieu. Ne dites pas trop à l’abbé Laurent toutes les fois que je vous écris; cela l’ennuie que je lui écrive moins qu’à vous.

E. D'ALZON
Notes et post-scriptum