Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.96

2 oct 1851 Lavagnac, REGIS Eulalie

Qu’elle adore Notre-Seigneur, si elle est privée du bonheur de le recevoir. – Souffrir et combattre, c’est la part de tout chrétien. – Plus les créatures s’éloignent de nous, plus nous sommes libres pour nous attacher à Dieu. – Part qu’il prend à son inquiétude pour la santé de son père.

Informations générales
  • T1-096
  • 86
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.96
  • Orig.ms. ACR, AM 251; D'A., T.D. 37, n. 3, pp. 232-233.
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 ADORATION
    1 AMOUR DU CHRIST
    1 ASCESE
    1 CHARITE ENVERS DIEU
    1 DESIR DE LA PERFECTION
    1 ESPRIT D'INDIFFERENCE
    1 LUTTE CONTRE LE MONDE
    1 REFORME DU COEUR
    1 SAINTE COMMUNION
    1 SAINTS DESIRS
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 TRISTESSE
    2 REGIS, M.-GREGOIRE DE
    3 LIRAC
  • A MADEMOISELLE EULALIE DE REGIS
  • REGIS Eulalie
  • 2 oct[obre] 1851.
  • 2 oct 1851
  • Lavagnac,
  • Mademoiselle
    Mademoiselle Eulalie de Régis
    à Lirac
    par Roquemaure Gard.
La lettre

Ma chère fllle,

Je vous aurais répondu plus tôt, si votre lettre ne fût arrivée au moment de mon départ pour la campagne, où j’ai trouvé avec un peu de repos, des occupations d’une autre espèce. Je vous suivrai pourtant de la pensée, non pas dans votre solitude que je ne connais pas, mais du moins dans votre petite église de Lirac[1] que j’ai visitée deux fois. Vous ne pouvez qu’y adorer Notre-Seigneur et vous êtes privée du bonheur de le recevoir. Hélas! combien de pauvres chrétiens qui sont forcés de passer des semaines, des mois et des années sans pouvoir entendre une messe! Dieu se contente de leurs désirs; et quant à vous, que cette privation vous serve d’aiguillon pour quand vous pourrez jouir du bonheur de recevoir la visite de N[otre]-S[eigneur] au fond de votre coeur.

Je ne saurais trop vous le répéter, la condition de toute vie d’homme, et, à plus forte raison de toute vie de chrétien, c’est la lutte, c’est le combat. Que ne doit-ce pas être, lorsque l’on prétend arriver à la perfection? Souffrir et combattre, voilà notre part jusqu’au dernier soupir. Cette perspective est triste, j’en conviens, pour qui n’aime pas; mais quand l’amour de Dieu est profond dans l’âme, la souffrance, l’épreuve, le combat deviennent un besoin.

Il m’est impossible de m’affliger beaucoup de certains désenchantements, que vous me racontez. Vous en subirez bien d’autres, et tout cela sera pour votre avancement dans la perfection. Plus les créatures s’éloignent de nous, plus on peut facilement leur dire adieu, et plus aussi le coeur est libre pour s’attacher à Celui qui ne change jamais. C’est de ce côté qu’il faut diriger votre imagination, car c’est de cela seulement qu’il s’agit, et non pas de donner à notre pauvre nature une compression telle qu’elle en soit toute écrasée.

Je vous plains des angoisses que vous cause la santé de Monsieur votre père. Je sais par expérience combien ces appréhensions sont cruelles; mais il faut tout accepter de la part de Celui qui peut tout pour nous faire souffrir et nous consoler.

Adieu, ma chère enfant. Que notre bon Maître vous pousse sans cesse à lui et vous fasse tirer profit de la solitude, du silence, de sa privation, en un mot de tout pour son amour.

E. D'AlZON
Notes et post-scriptum
1. Lirac, commune du canton de Roquemaure (Gard).
2.<>. - Note du P. S. Vailhé, mais l'enveloppe n'existe plus depuis sa transcription.