Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.135

19 jan 1852 Nîmes, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Motifs de son silence. – Son accablement vient en partie de ses dettes. – Explication qu’il a eue avec sa mère à ce propos. – Difficultés avec le vicaire général de Paris.

Informations générales
  • T1-135
  • 121
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.135
  • Orig.ms. ACR, AD 810. D'A., T.D. 21, n. 67, pp. 46-47.
Informations détaillées
  • 1 ASSOMPTION
    1 CONGREGATIONS DE FEMMES
    1 CONSTITUTIONS DES RELIGIEUSES DE L'ASSOMPTION
    1 CONTRARIETES
    1 CREANCES A PAYER
    1 RELATIONS DU PERE D'ALZON AVEC LES ASSOMPTIADES
    1 SUPERIEUR ECCLESIASTIQUE
    1 VOEUX SOLENNELS
    2 ALZON, MADAME HENRI D'
    2 BUQUET, LOUIS-CHARLES
    2 VERON, PAUL
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • 19 janvier [18]52.
  • 19 jan 1852
  • Nîmes,
La lettre

Ma chère fille,

Un enfant qui nous est mort, un autre qu’il me faut chasser ont tellement absorbé le peu de temps que me laisse mon travail ordinaire, que je ne sais plus ce que je fais. Cependant j’aurais voulu vous dire que, hier, j’ai beaucoup prié pour vous, comme tous ces jours-ci. Vous avez raison, nous nous sommes beaucoup trop mal compris jusqu’à présent, et il est nécessaire de faire cesser au plus tôt ce malentendu.

Il faut que je vous dise pourtant, puisque c’est nécessaire, une des raisons de mon accablement de ces jours derniers. Ma mère m’avait promis une somme d’argent assez considérable, quand tout à coup elle a paru changer de dessein et ne plus vouloir rien me donner, au moment où comptant sur sa promesse j’avais annoncé que je paierais. Comme la somme, dont j’avais annoncé le solde, est de 30.000 francs et que ce que vous me devez est à peu près le même chiffre, il y a eu des observations assez pénibles faites à ce sujet. Heureusement j’ai pu dire que vous m’aviez manifesté l’intention de vous acquitter avant la fin de l’année. J’ai pu dire ce que vous m’annonciez; mais, dans l’état présent des choses, je suis convaincu que, si je passais pour votre supérieur, j’aurais bien plus de difficulté pour obtenir la somme que je demande, et toutefois, je ne suis pas fâché de ce contretemps. J’ai eu l’occasion de dire bien des choses sur l’emploi que je comptais faire de ma fortune, si j’en étais un jour le maître; ce qui me met singulièrement à l’aise. Sous ce rapport, à quelque chose malheur aura été bon. Mais je crois qu’il faut attendre quelque temps, avant de songer à des relations officielles entre les deux Congrégations.

Mais en attendant, que faire avec un homme comme M. Buquet? Je m’y perds franchement, je ne le croyais pas aussi absurde[1]. Je cherche une autre expression, je n’en trouve pas. Vous pouvez cependant peu à peu obtenir bien des choses, j’en suis sûr. Quant au projet d’aller à Rome, quand le moment sera venu, j’y tiens plus que jamais, d’autant plus qu’il y aura alors occasion de traiter la question des voeux solennels qui débarrasseraient les religieuses de bien des ennuis. Il est certain que les sorties feront toujours une plus grande difficulté à Rome qu’en France. Mais cela peut encore s’arranger[2].

Adieu, ma chère fille. Prenons patience et prions. Tout à vous.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1.<>, avait écrit Mère M. Eugénie de Jésus au P. d'Alzon, le 13 janvier.
2. En dehors des moniales à voeux solennels, le droit canonique, depuis le concile de Trente, plaçait sous la juridiction immédiate des évêques les congrégations féminines, auxquelles il était par ailleurs fort difficile de se livrer à un apostolat à l'extérieur de leur communauté, tel que <> pratiquées par les Religieuses de l'Assomption. Pour assurer la promotion des religieuses apostoliques à l'instar des moniales, le P. d'Alzon visait au statut de <>, de préférence à celui de congrégation féminine liée à une congrégation masculine de plein droit: il savait la réticence de l'Eglise à ce sujet et en mesurait les inconvénients.
En 1867-1868, dans un autre contexte, c'est-à-dire après une grave crise provoquée par les exigences de l'abbé Véron, supérieur ecclésiastique des Religieuses, sur la demande expresse de Mère M.-Eugénie et dans la perspective d'une réforme du droit des religieux par le concile du Vatican, le P. d'Alzon croira devoir changer d'opinion et admettra l'idée d'un statut d'union entre les branches existantes de l'Assomption (Augustins de l'Assomption, Religieuses, Oblates et Petites Soeurs de l'Assomption), que chacune précisera en harmonie avec le désir des Soeurs exprimé en Chapitres généraux et sur la base d'un document émanant des religieux.