Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.159

26 apr 1852 Nîmes, ESCURES Comtesse

Souci des siens et de sa santé. – Pour être du côté du bon Dieu, il y faut la prière, la mortification et les bonnes oeuvres. – Maîtresse d’elle-même, qu’elle se laisse conduire par Notre-Seigneur, peut-être jusqu’à une vie consacrée dans le monde.

Informations générales
  • T1-159
  • 142
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.159
  • Orig.ms. ACR AN 14; D'A., T.D. 38, n. 14, pp. 122-124.
Informations détaillées
  • 1 BON PASTEUR
    1 BONNES OEUVRES DES LAICS
    1 COMMUNION FREQUENTE
    1 EPREUVES
    1 MAITRISE DE SOI
    1 MOIS DE MARIE
    1 MORTIFICATION
    1 UNION A JESUS-CHRIST
    1 VIE DE PRIERE
    1 VIE SPIRITUELLE
    2 ABRAHAM
    2 ALEYRAC, BARON D'
    2 CHAZELLES, FAMILLE DE
    2 CHAZELLES, MADAME DE
    2 COURTOIS, FAMILLE DE
    2 COURTOIS, MADAME RAYMOND DE
    2 COURTOIS, RAYMOND DE
    2 FONTAINE, DOCTEUR
    2 LEGAY, MADEMOISELLE
    2 PAUL, SAINT
    2 PENNAUTIER, MADAME PAUL DE
  • A MADEMOISELLE AMELIE DE PELISSIER
  • ESCURES Comtesse
  • 26 avril 1852.
  • 26 apr 1852
  • Nîmes,
  • Mademoiselle
    Mademoiselle de Pélissier
    94, rue Chaillot.
    Paris.
La lettre

Je manque pour vous à mes résolutions, ma chère enfant, car j’avais voulu ne rien faire avant d’avoir terminé un travail assez pressé; je le suspends pour vous répondre.

Je vous donnerai des nouvelles de Blanche, d’avant-hier; elle était positivement beaucoup mieux. Mme de Chazelles a écrit à Mlle Legay une lettre très vive sur l’ignorance où on l’avait laissée; et cependant, M. Fontaine déclarait que, si elle venait, lui se retirerait. Comme vous dites, cette pauvre petite est un sujet de discussion bien douloureux[1]

J’ai parlé à M. de Courtois, comme vous me l’aviez demandé. Il va vous envoyer au premier jour cinq mille francs et, un peu plus tard, les autres cinq mille qu’il se trouve vous devoir. Vos pauvres yeux ne veulent donc pas vous laisser tranquille! et vous voilà obligée de rester toute seule à réfléchir. Je demande à Dieu de vous abréger cette épreuve et de vous aider à devenir une sainte par tous les moyens qu’il vous donne pour l’être un jour.

Je crois, comme vous, que l’idée de vous marier a été une vraie tentation, et puisque vous n’y pensez plus, au moins avec la personne que vous me désignez, vous devez en remercier Dieu. Ce n’est pas moi, ma bonne Amélie, qui m’oppose à ce que vous preniez un peu d’élan. Au contraire je voudrais vous en voir prendre un peu plus fortement; mais comment l’entendez-vous? Quand il s’agit d’être du côté de Dieu, je ne l’envisage que par trois moyens: la prière, la mortification et les bonnes oeuvres. Auquel de ces moyens voulez-vous avoir recours? Voulez-vous que je vous pose quelques questions? Désirez-vous que je vous pousse un peu plus à la vie intérieure, à l’oraison? Il me semble que l’état de vos yeux favoriserait étonnamment cette sorte de travail interne, que la prière accomplit toujours dans une âme de bonne volonté.

Désirez-vous vous mortifier un peu plus que vous ne le faites? Pensez-vous que je doive vous porter à une grande mortification intérieure? Croyez-vous que je doive vous permettre quelques austérités? On en a quelquefois besoin pour dompter certaines révoltes.

Faut-il que je vous permette quelques oeuvres de zèle, quelques visites chez les pauvres ou autre chose de ce genre?

Pensez-vous que, pour couper court à vos tergiversations, à vos incertitudes, je doive vous faire prendre l’engagement de vous donner définitivement à Dieu? Avez-vous au fond du coeur quelque désir de vous consacrer à Notre-Seigneur par un voeu?

Dans tous les cas, je désire que, pendant le mois de Marie, vous puissiez communier trois fois par semaine; et si vous vous en trouvez bien, vous continuerez de la même manière.

Voilà, ce me semble, bien des questions qui peuvent vous mettre à même de me répondre bien longuement si votre vilain oeil vous le permet. Je vous en prie, ma chère enfant, parlez-moi en toute simplicité et confiance. Je vous assure que je m’attache tous les jours un peu plus à votre âme. J’étais préoccupé de votre silence, et j’avais chargé M. d’Aleyrac de vous le dire. Ma conviction très profonde est que vous devez tendre à la perfection n’importe par quel moyen que Notre-Seigneur vous montrera plus tard. Vous êtes comme Abraham, à qui Dieu dit: [[Sors de ta maison et de ta famille et viens dans la terre que je te montrerai]][2]. Or, Abraham sortit, allant, dit saint Paul, sans savoir où Dieu le menait[3]. Faites de même. Profitez de l’avantage inappréciable d’être votre maîtresse pour vous laisser conduire par Notre-Seigneur. Prenez-le, dans vos communions, pour votre ami et pour votre guide; donnez-lui tout pouvoir sur vous et protestez-lui que vous voulez le suivre partout où il ira. Je vous recommande de prier très spécialement pour quelques intentions que j’ai. Je désire connaître sur bien des points la volonté de Dieu. Vous vous souviendrez de cette recommandation pendant le mois de Marie.

Adieu, ma chère enfant. Ecrivez-moi bientôt et croyez à toute mon affection.

E. D'ALZON
Notes et post-scriptum
1. Blanche est la nièce d'Amélie; la famille de Chazelles est la famille du père de Blanche; la famille de Courtois, celle du nouveau mari de sa mère, soeur d'Amélie et mère de Blanche, que le P. d'Alzon aurait voulu confier à Amélie. Mlle Legay est une institutrice, préceptrice de Blanche.2. Gn 12, 1.
3. Hb 11, 8.