Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.256

4 apr 1853 Nîmes, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Ses occupations à la retraite de Valbonne. – Comment s’y prenaient les saints pour tant prier et travailler à la fois? – Le loyer que l’on réclame pour un autre terrain à Paris est trop exorbitant. – Pourtant on le presse d’aller en avant.

Informations générales
  • T1-256
  • 235
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.256
  • Orig.ms. ACR, AD 873; D'A., T.D. 21, n. 131, pp. 80-81.
Informations détaillées
  • 1 EMPLOI DU TEMPS
    1 FORMATION DES JEUNES AUX VERTUS
    1 IMITATION DES SAINTS
    1 PREDICATION DE RETRAITES
    1 SYMPTOMES
    1 TERRAINS
    1 VIE DE PRIERE
    2 BAILLY, VINCENT DE PAUL
    2 ESCURES, MADAME GAILLARD D'
    2 LAURENT, CHARLES
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 VALBONNE
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • le 4 avril 1853.
  • 4 apr 1853
  • Nîmes,
  • Evêché de Nîmes
La lettre

Voilà, ma chère fille, la première lettre que j’écris depuis huit jours[1]. J’avais emporté à Valbonne du papier à lettre en provision pour faire une très longue correspondance, mais j’ai été pris d’un si gros rhume, accompagné de mal de gorge, que je frémissais à la pensée de me courber pour écrire. Je parlais sept à huit heures par jour et le soir je n’en pouvais plus. Quand les enfants me quittaient pour aller se coucher, j’y allais aussi et ma correspondance en a souffert. En arrivant, je trouve plusieurs de vos lettres, et, avant toutes choses, je veux y répondre. Vous serez peut-être bien aise de savoir ce que nous avons fait pendant ces quelques jours. Vraiment, nous n’avons pas perdu notre temps. Quelques élèves ont été peu dévots; mais sur 21, il y en a bien eu une quinzaine dont j’ai été très content. Il est triste de voir certaines jeunes natures ne pas donner tout ce qu’elles pourraient tenir, si elles le voulaient.

Je reviens à vous. Il me semble que Dieu vous traite bien en enfant gâtée et je vous en félicite. C’est une preuve qu’il vous aime. Profitez de cette liberté aimante qu’il place dans votre coeur, pour aller tous les jours un peu plus fortement à lui. Oh! si nous pouvions faire beaucoup d’oraison! Comment donc s’y prenaient les saints pour beaucoup travailler et beaucoup prier à la fois? C’est ce que je ne puis pas bien m’expliquer. Cependant, il me semble qu’avec un peu de bonne volonté on peut expédier un peu vite certaines choses et revenir à Dieu. Vous avez prié pour moi, ces jours-ci, je vous assure que je vous l’ai bien rendu, et encore ce matin, à la communion, vous m’avez donné une bonne distraction, si c’en est une que de vous recommander à Notre-Seigneur en pareil moment.

J’en viens à nos affaires. Evidemment, je ne puis en ce moment emprunter une forte somme, et, si je pouvais prendre ici 50.000 francs, ce serait beaucoup. Or, qu’est-ce que 50.000 francs pour une affaire de cette espèce? Je vous assure que vous n’avez pas besoin de me parler de l’absence absolue de tien et de mien entre nous[2]. Il me semble que j’ai donné une preuve de ma simplicité sur ce point, par la manière dont je vous disais que je pensais que, dans une certaine hypothèse, vous pourriez nous venir en aide. Mais ce qui ne peut faire difficulté entre vous et moi, peut en faire avec d’autres personnes. C’est ainsi que je le comprends.

Je ne sais si je dois me reprocher de manquer l’office pour vous écrire. Il y a trois heures que cette lettre est commencée, et j’aurais tant de bonheur à bavarder un peu avec vous.

Mais je reviens à ce que je voulais vous dire pour les affaires. Evidemment, si nous ne pouvons avoir le beau terrain qui charme tant le P. Laurent, il faudra bien se décider à louer. Quant au loyer,je pense que l’on eût pu en donner une somme assez raisonnable. Mais 30.000 francs, c’est écrasant pour des épaules comme les miennes. Et cependant, le croiriez-vous? jamais je n’ai peut-être été plus prudent que cette année. C’est précisément le moment que choisit le prieur de la chartreuse pour me presser d’aller en avant. Je ne comprends pas trop cela, mais cela est. Je lui demandais de me faire arranger pour salle de communauté une pièce de ses bâtiments: [[Je vous le promets, me dit-il, à la condition que vous commencerez un bâtiment définitif à Nîmes]]. Je ne veux pourtant pas le commencer, sans savoir où cela m’entraînera.

Je m’arrête pour aujourd’hui. Il me serait difficile d’aller plus loin, mais, le premier instant libre, j’en profiterai pour reprendre notre conversation. Mais laissez-moi vous conjurer de m’écrire souvent, comme vous l’avez fait aujourd’hui.

Adieu, bien chère fille. Tout à vous. Soyez convaincue que tout ce que vous me dites de bon va au plus intime de mon coeur et que je voudrais bien vous le rendre.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. La lettre précédente, du 3 avril à Mlle de Pélissier, est donc antidatée, ou celle-ci est post-datée, ce qui arrive fréquemment dans la correspondance du P. d'Alzon. <>.
2. Le 27 mars, Mère M.Eugénie écrivait au P. d'Alzon: <>. Il résulte de là qu'en leur dernière rencontre, ils avaient élaboré en semble un <>, celui de faire de la nouvelle implantation du collège de Paris, un lieu de rencontre ouvert aux amis de l'Assomption et aux personnalités <>. Tout en acceptant d'en assumer les frais ensemble, Mére M. Eugénie et le P. d' Alzon savaient qu'ils n'étaient pas entièrement compris et suivis par les Soeurs et les Pères