Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.290

1 jun 1853 Nîmes, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Surprise que réservent les religieux de Nîmes pour la procession. – Bonheur de sentir au dedans de soi l’amour pour Notre-Seigneur. On est ensuite plus fort pour accepter les amertumes du calice. – L’amour doit faire fondre en nous toutes nos hauteurs, afin que nous soyons assouplis dans l’esprit de foi et de prière.

Informations générales
  • T1-290
  • 261
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.290
  • Orig.ms. ACR, AD 893; D'A., T.D. 21, n. 150, p. 92.
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DU CHRIST
    1 BAPTEME
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 DIVIN MAITRE
    1 FETE-DIEU
    1 FOI BASE DE L'OBEISSANCE
    1 HUMILITE FONDEMENT DE VIE SPIRITUELLE
    1 JOIE SPIRITUELLE
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 PROCESSIONS
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 SYMPTOMES
    1 VIE DE PRIERE
    1 VOIE UNITIVE
    2 BAILLY, MADAME EMMANUEL
    2 BAILLY, VINCENT DE PAUL
    3 AFRIQUE
    3 NIMES, EGLISE SAINTE-PERPETUE
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • 1er juin [18]53.
  • 1 jun 1853
  • Nîmes,
La lettre

Ma chère fille,

Je suis un peu souffrant et je ne suis pas fâché de laisser croire à une menace très grave pour ma poitrine, afin de me réserver un peu de temps à moi. Ne vous en plaignez pas, car je viens vite vous en donner une partie. Nous avons, ce soir, la procession de Sainte-Perpétue, et, tandis que nos Frères préparent à nos bon Nîmois une surprise de leur façon[1], je viens causer avec vous et de votre lettre d’aujourd’hui et de celle d’avant-hier.

Que vous êtes heureuse, ma chère fille, de sentir au dedans du coeur cet amour personnel pour notre divin Maître! Quand une religieuse en est là, je vous prie de me dire ce qu’elle peut désirer de plus comme consolation. Reste toujours, sans doute, le gros chapitre de la sainteté. Mais est-ce que le sentiment de l’amour n’y aide pas très puissamment? Et quand même ce qu’il y a de trop sensible dans la disposition de l’âme vient à s’effacer, est-ce que le souvenir de l’impression ne dure pas et ne laisse pas de traces? Je crois qu’avec la vie active que vous êtes condamnée à mener, il ne peut que vous être très bon de porter votre coeur vers cette dilection du Sauveur Jésus, avec tout l’amour dont vous êtes capable. Mais vous avez raison, les fruits valent mieux que cela. Oui, mais il n’y a pas de fruits sans fleurs. Si Notre-Seigneur veut vous faire passer par les attraits enivrants de l’âme, il faut bien que vous vous y abandonniez. Vous serez plus forte ensuite pour accepter les amertumes du calice, que son amour purifiant vous réserve.

Je désire bien que l’amour fasse fondre en vous toutes ces hauteurs, qui sont aussi des duretés, des glaces. Mais si vous vous mettez enfin à beaucoup aimer, il faudra bien que tout cela disparaisse. C’est par l’amour de Jésus que vous devez devenir humble et souple. Ou je ne connais rien à votre nature, ou voilà votre voie, et je ne crois pas que depuis bien longtemps j’aie changé d’avis sur ce point.

C’est dans l’esprit de foi et de prière que vous devez vous assouplir, bien chère fille, et puisque la charité de Jésus-Christ vous presse, il me semble qu’il ne doit pas vous être difficile d’en faire l’essai. Je puis vous assurer que, dans tout ce travail, je suis parfaitement résolu à ne me compter pour rien. Le point essentiel est que vous deveniez sainte par l’humilité. Qu’importe le reste?

Je vois que je dois m’arrêter, car je suis réellement un peu fatigué. Mais il me semble que, d’après tout ce que vous me dites, nous nous comprenons à merveille. Il ne s’agit plus que de mettre la main à l’oeuvre.

Adieu. Tout à vous en Notre-Seigneur.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. La surprise que réservent les Frères de l'Assomption aux bons Nîmois sera de mettre au dessus du reposoir de la procession du Saint-Sacrement <>. Nous tenons ce détail de V. de P. Bailly qui écrit encore à sa mère, le 29 mai: <>.