Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.589

7 sep 1855 [Paris, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Sa tristesse de la nomination de l’abbé Plantier à l’évêché de Nîmes; – Bonne impression de la retraite qu’il donne à ses religieux.

Informations générales
  • T1-589
  • 543
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.589
  • Orig. ms. AD 1026; D'A., T.D. 21, n. 322, p. 181.
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 APOSTOLICITE
    1 CHAPITRE GENERAL DES ASSOMPTIONNISTES
    1 DOCTRINES ROMAINES
    1 EPREUVES SPIRITUELLES
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 PREDICATION DE RETRAITES
    1 SYMPTOMES
    1 TRISTESSE PSYCHOLOGIQUE
    1 ULTRAMONTANISME
    1 VIE SPIRITUELLE
    1 VOCATION RELIGIEUSE
    2 AFFRE, DENIS
    2 CUSSE, RENE
    2 LACORDAIRE, HENRI
    2 MARET, HENRI
    2 PERNET, ETIENNE
    2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI
    2 RAVIGNAN, GUSTAVE DE
    3 NIMES, EVECHE
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • le 7 septembre 1855]. Veille de la Nativité
  • 7 sep 1855
  • [Paris,
  • Madame
    Madame la supérieure de l'Assomption
    94, rue de Chaillot
    Paris.
La lettre

Ma chère fille,

Votre lettre d’hier me fut remise au moment où j’allais me mettre à table. Votre commissionnaire ne voulait pas manquer l’omnibus de midi et demi; voilà pourquoi je ne vous écrivis que deux mots. J’avais eu pourtant la possibilité de réfléchir, tout en dînant, et depuis je me suis convaincu que nous n’avions qu’à laisser faire. L’ordonnance est dans le Moniteur[2]. Mais n’y fût-elle pas, à quoi bon se démener contre un fait, triste sans doute, mais dont nous pourrons tirer un très bon parti? L’abbé Plantier ne sera pas mal embarrassé, s’il veut se retirer de nous; et, s’il nous vient, peut-être fera-t-il par force un bien qu’un ultramontain n’aurait pas fait. Le diocèse est trop romain pour pouvoir être entamé de longtemps. Puis, qui vivra verra. Il me semble que je suis dans des dispositions assez bonnes; je veux en avoir de parfaites. Dieu veut peut-être que je souffre encore par certains points que je ne connaissais pas.

Notre retraite se fait assez bien. Je regrette que des maux de tête, assez forts, m’empêchent de parler comme je l’eusse voulu. Il nous est arrivé un ecclésiastique pour être religieux, j’en suis assez content. Peut-être lui donnerons-nous le capuchon, ainsi qu’à M. Cusse[3], dont je vous ai souvent parlé. Ma seule impression, pour le moment, est que je dois beaucoup aimer le mépris et l’humiliation, que je dois laisser de côté les préoccupations de constructions, pour m’occuper surtout d’édifier une maison spirituelle. Je dis la messe mieux que de coutume, mais je suis d’une sécheresse à faire peur. Ainsi soit-il!

Adieu, ma bien chère fille. Je n’ai aucun scrupule de vous dire ces quelques mots. Tous viennent me trouver et je ne vais trouver personne.

Tout vôtre en Notre-Seigneur.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. La mention de l'année *55* est de la main de Mère M.-Eugénie.
2. L'ordonnance de la nomination de l'abbé Plantier au siège de Nîmes datait du 30 août 1855. - Mgr Plantier, né le 22 mars 1813, à Ceyzérieux (Ain), fut ordonné prêtre en 1837. Originaire du diocèse de Belley, il habitait depuis longtemps la ville de Lyon où il était l'un des membres les plus distingués de la maison des Chartreux qui regroupait les missionnaires diocésains. Lors de la réorganisation de la Faculté de théologie, à Lyon, la chaire d'hébreu lui fut attribuée en 1838. Ses leçons parurent sous le titre: *Etudes littéraires sur les poètes bibliques*. Après le P. Lacordaire et le P. de Ravignan, il donna trois stations, à Notre-Dame de Paris, sous l'épiscopat de Mgr Affre, qui ont été publiées en deux volumes. Nommé depuis peu grand vicaire à Lyon, il passait pour un administrateur de premier ordre; on louait aussi l'aménité de son caractère, sa douceur et sa modestie, à travers une apparence chétive et une santé délicate. Annonçant sa nomination à l'épiscopat, le ministre des Cultes écrivait: <>. - Homme de coeur et de caractère, on lisait sur la devise de ses armes que l'évêque doit agir avec <>.
La nomination de Mgr Plantier au siège de Nîmes surprit le P. d'Alzon: son nom n'avait jamais été avancé et sa nomination suivait de fort peu la mort de son prédécesseur. Etait-il gallican? La seule chose sûre à dire est la confidence qu'il fit lui-même en octobre 1869 à Mgr Maret, adversaire de l'infaillibilité pontificale: <>. Ce qui est sûr aussi, c'est que des amis ou des adversaires du P. d'Alzon l'ont prévenu dans l'opinion du nouvel évêque.
3. Un des premiers novices, en 1845, congédié en 1848 et qu'il était question de reprendre, le Fr. Eugène Cusse (*Lettre* 31, note 8). Il laissait son professorat à l'institution de Saint-Bertin, à Saint-Omer, pour revenir à l'Assomption. Très dévoué, mais de tempérament maladif et d'esprit étroit, il provoquera plus d'un ennui avant que le Chapitre général de 1862 vote son exclusion de la Congrégation. Le P. d'Alzon, en le reprenant, a tablé sur de réelles qualités, qu'appréciait aussi le P. Pernet, mais qui n'ont pu assumer les difficultés inhérentes à la vie commune.