Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.611

28 oct 1855 Nîmes, CLERGE_ET_FIDELES

Intérêt que l’Eglise locale de Nîmes doit porter à l’Eglise locale de Genève. – Le développe ment de cette Eglise depuis la Révolution exige un lieu de culte, déjà en construction et dédié à Marie Immaculée, en la cité de Calvin. – Une quête est ordonnée dans toutes les églises du diocèse, pour hâter la fin des travaux.

Informations générales
  • T1-611
  • 564
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 1, p.611
  • Orig. imp. ACR, AO 115; D'A., T.D. 40, n. 3, pp. 11-13. - Chez Durand-Belle, imprimeur de l'évêché, 10, place du château, Nîmes.
Informations détaillées
  • 1 ACTION DE DIEU
    1 ACTION DE MARIE
    1 APOSTASIE
    1 APOSTOLAT DE LA CHARITE
    1 BON PRETRE
    1 CATHOLIQUE
    1 CLERGE NIMOIS
    1 CURE
    1 DIRECTION PASTORALE DU DIOCESE DE NIMES
    1 EDIFICE DU CULTE
    1 EGLISE EPOUSE DU CHRIST
    1 ENSEIGNEMENT
    1 EPREUVES DE L'EGLISE
    1 ESPERANCE
    1 FECONDITE APOSTOLIQUE
    1 GRACE
    1 GUERRE
    1 IMMACULEE CONCEPTION
    1 INFAILLIBILITE PONTIFICALE
    1 LITURGIE
    1 PAROISSE
    1 PATRIE
    1 PAUVRETE
    1 PREDICATION
    1 PROTESTANTISME ADVERSAIRE
    1 PROVIDENCE
    1 PRUDENCE
    1 QUETES
    1 REVOLUTION
    1 SAGESSE HUMAINE
    1 THEOLOGIE
    1 TRIOMPHE DE L'EGLISE
    1 VIE DE PRIERE
    1 ZELE APOSTOLIQUE
    2 CALVIN, JEAN
    2 DUNOYER, ABBE
    2 DURAND-BELLE, IMPRIMEUR
    2 PAUL, SAINT
    2 VUARIN, JEAN-FRANCOIS
    3 FRANCE
    3 GENEVE
    3 NIMES, DIOCESE
    3 SUISSE
  • AU CLERGE DU DIOCESE DE NIMES
  • CLERGE_ET_FIDELES
  • le 28 octobre 1855.
  • 28 oct 1855
  • Nîmes,
  • Evêché de Nîmes
La lettre

Monsieur le curé,

Dieu, en faisant passer son Eglise par les épreuves du temps, lui ménage aussi des moments de consolation et d’espérance; et, tandis que la chaste épouse du Christ pleure sur des défections nombreuses, en certaines parties de l’Europe, elle se réjouit en voyant de nouveaux enfants lui naître dans les lieux où sa voix, depuis plusieurs siècles, avait été méconnue.

Lorsque, en 1798, les armées de la France envahirent la Suisse, Genève comptait un nombre bien restreint de catholiques. Le premier consul exigea que ce petit troupeau eût son église et son culte dans la ville de Calvin. Vers le même temps, un saint prêtre fut suscité dont la science, la prudence et le zèle donnèrent peu à peu à la nouvelle paroisse une fécondité que la sagesse humaine ne pouvait prévoir. Par un heureux concours de circonstances et la grâce de Dieu, les quatre cents âmes dont M. Vuarin se trouva le curé, en 1806, se multiplièrent dans une proportion telle qu’à sa mort, arrivée en 1843, leur nombre s’élevait à huit mille. Le progrès est allé croissant depuis lors; et, il y a quelques jours à peine, le second successeur de M. Vuarin, M. l’abbé Dunoyer, nous assurait que le nombre de ses ouailles s’élevait à seize mille fidèles.

Un tel développement rendait trop étroite l’enceinte de l’ancienne église. La Providence, qui sait se servir de tout pour arriver à ses fins miséricordieuses, permit que les dernières révolutions fussent pour les catholiques une occasion d’obtenir un emplacement favorable à la construction d’un nouvel édifice. Depuis quatre ans déjà, grâce aux encouragements bienveillants du Saint-Père, et aux secours de la charité, s’élèvent les murs d’un temple consacré à Marie-Immaculée, comme un monument de son action souveraine sur les triomphes de l’Eglise (1), et comme un souvenir permanent, au sein de la Réforme, du pouvoir infaillible du successeur de saint Pierre pour définir et proclamer les dogmes de notre foi.

Toutefois, Monsieur le curé, on peut appliquer aux catholiques de Genève ces paroles de l’apôtre saint Paul aux Corinthiens: [[Considérez, mes Frères, quels sont ceux d’entre vous qui ont été appelés à la foi. Il y en a peu de sages selon la chair, peu de puissants et peu de nobles]] (2). En effet, nos frères de Genève sont, pour la plupart, pauvres et sans instruction. Dieu, dans cette circonstance encore, veut se servir de ce qui est faible pour confondre ce qui est fort. Le peu de ressources dont ils jouissent leur interdit de mener à bonne fin l’édifice dont ils ont un besoin urgent, si les catholiques de la France et de l’Europe ne leur venaient en aide. Lorsque nous visitions naguère, dans cette ville fameuse, les remparts renversés par sa dernière révolution, on nous les désignait par les noms des pays protestants qui fournirent les sommes nécessaires à leur construction. Pourquoi les catholiques, à leur tour, n’apporteraient-ils pas leur aumône pour l’érection d’une forteresse plus pacifique et où leur seule arme sera la prière et la parole de la vérité?

Après tout, quand le tribut que nous réclamons ne serait pas pour les catholiques français une oeuvre de charité, ce serait encore un acte de patriotisme. La France n’est peut-être aimée nulle part autant que par nos frères de Suisse, et nous avons été aussi surpris que touché en voyant l’unanimité de leurs voeux, pour que les vicissitudes de la guerre permissent bientôt aux deux pays de n’en faire qu’un. Venir en aide à ces populations croyantes et pauvres, n’est-ce pas préparer les liens qui bientôt peut-être les uniront tous?

Voilà ce que nous venons vous proposer, Monsieur le curé, et votre voix, j’en suis sûr, sera entendue. En conséquence, une quête sera faite dans toutes les églises du diocèse, le dimanche dans l’octave de la Toussaint, ou le dimanche suivant, pour la construction de l’église élevée à Genève, sous l’invocation de Marie conçue sans péché. Le produit de cette quête sera adressé au secrétariat de l’évêché, afin que nous le fassions parvenir au plus tôt à sa destination.

Vous serez assez bon pour donner communication de cette lettre à vos paroissiens.

Veuillez agréer, Monsieur le curé, l’hommage de mes sentiments très respectueux.

EMMANUEL D'ALZON. vicaire capitulaire.
Notes et post-scriptum
(1) *Gaude, Maria virgo, cunctas haereses sola interemisti in universo mondo*.
(2) *Videte vocationem vestram, fratres, quia non multi sapientes secundum carnem, non multi* *potentes, non multi nobiles Ep. I ad Cor., I, 26*.