Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.43

18 mar 1856 [Montpellier, MOREAU Basile csc

Réponse article par article. -Les biens et les dettes. -Le noviciat. -Les constitutions. -Le directeur du collège de Nîmes. -La pension des étudiants à Rome. -Le cas des Frères Joséphites. -Le double gouvernement sous l’autorité de l’évêque du Mans. -La situation du collège de Nîmes. -Budget présumé du collège.

Informations générales
  • T2-043
  • 645
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.43
  • Orig.ms. Archives de Sainte-Croix; cop.conf. ACR DL 112; autre cop. ms. ACR, AO 111; D'A., T.D. 39, n. 1, pp. 355-358.
Informations détaillées
  • 1 BIBLIOTHEQUES SCOLAIRES
    1 BUDGETS APPROXIMATIFS
    1 CHAPELLE
    1 CHEMIN DE FER
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 COMMUNAUTE RELIGIEUSE
    1 CONSTITUTIONS
    1 FRERES CONVERS
    1 MOBILIER
    1 NOVICIAT
    1 ORNEMENTS
    1 PENSIONS
    1 PROJET D'UNION AVEC LES PERES DE SAINTE-CROIX DU MANS
    1 REGLE DE SAINT-AUGUSTIN
    1 RELIGIEUX
    1 VASES SACRES
    1 VENTES DE TERRAINS
    2 CABRIERES, ANATOLE DE
    2 DOMINIQUE, SAINT
    2 IGNACE DE LOYOLA, SAINT
    2 MILLERET, MARIE-EUGENIE
    2 NANQUETTE, JEAN-JACQUES
    3 AUTEUIL
    3 CLICHY-LA-GARENNE
    3 MANS, LE
    3 MONTPELLIER
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 ROME
  • AU R. PERE MOREAU
  • MOREAU Basile csc
  • vers le 18 mars 1856].
  • 18 mar 1856
  • [Montpellier,
La lettre

Mon Très Révérend Père,(1)

Je vais répondre, article par article, aux notes que vous m’avez fait remettre avant votre départ. Mais, auparavant, je crois devoir vous prévenir qu’il importe de traiter au plus tôt et à part, la question de la maison de Nîmes. Je fais rédiger un mémoire qui partira pour Rome avec mes observations sur votre projet préparatoire.

[A. – OBSERVATlONS SUR LE PROJET D’UNION]

[Article 1 ]. -J’accepte l’article premier; seulement je tiendrais à ce que vous défalquiez ce qui peut revenir aux Joséphites [Inutile et facile Moreau], à moins que vous ne prévoyiez qu’un jour, les deux branches de votre Congrégation n’en fissent plus qu’une; ce que je désirerais vivement. Il est bien entendu que les intérêts temporels de vos Soeurs seraient entièrement séparés[1°].

1° (Notes du Père Moreau) Apportant avec vous dans la communauté l’héritage futur de vos parents, nous mettrions en commun nos dettes et notre avoir, s’il n’y avait pas trop de différence, après avoir rendu mutuellement nos comptes à Mgr du Mans, qui présiderait notre conseil d’administration tous les mois jusqu’à notre constitution définitive. Cependant, pour prévenir toute discussion sous ce rapport entre les deux Sociétés, en cas de non succès dans notre essai de fusion, on indiquerait, jusqu’à nouvel ordre, l’état du passé, ainsi que les nouvelles recettes et dépenses de chaque Société. Ce provisoire cesserait, ainsi que la présidence de Monseigneur, aussitôt que le Chapitre général serait canoniquement constitué.

[Article 2]. -J’accepte l’article second tel qu’il est; toutefois je dois vous faire observer que, sauf pour la première année et pour les religieux anciens, le noviciat devra être ordinairement de deux ans. [A considérer (Moreau)] [2°].

2° (Notes du Père Moreau) Pendant ce temps nous conserverions nos établissements tels qu’ils existent, autant qu’il nous sera profitable, et refuserions toute nouvelle fondation jusqu’à la formation régulière des sujets qui feraient tous une année de noviciat, à moins d’une dispense du Pape pour les anciens.

Article 3. -Adopté sans restriction [3°].

3° (Notes du Père Moreau) Le conseil d’administration provisoire viserait à payer toutes les dettes arriérées et à n’en pas contracter de nouvelles, acquittant au fur et à mesure les dépenses indispensables.

Article 4. -Idem. [Accepté (Moreau)] [4°].

4° (Notes du Père Moreau) Si le gouvernement ne nous accordait pas tôt ou tard une existence légale, comme à nos Frères, nous ferions un acte de société civile pour assurer l’existence temporelle et les transmissions des biens de la Congrégation.

Article 5. -Le noviciat devra être à Paris. J’ai eu l’honneur de vous en dire les raisons, je les répète ici. Il y a chance pour nous d’attirer à Paris un certain nombre d’excellents sujets, qui ne viendraient ni au Mans ni à Nîmes. Je vous ai cité l’exemple de saint Ignace et de saint Dominique. Il est bien entendu que je ne parle point des Joséphites dont vous garderiez la direction. Je les considère comme des Frères convers. Vous savez qu’on met à ma disposition pour plus d’un an une très belle maison à Auteuil [5°].

5° (Notes du Père Moreau) Le noviciat serait à Sainte-Croix jusqu’à ce qu’on puisse en construire un à Clichy, où vous auriez cependant votre pied à terre et apparaîtriez fréquemment pour y recevoir et entretenir les postulants qui se présenteraient.

Article 6. -Adopté; toutefois vous ne feriez des changements dans le personnel des Assomptionistes [Accepté (Moreau)] sans mon consentement. Vous parlez des constitutions, il est entendu que les vôtres et les nôtres seront refondues avant d’être soumises à l’approbation du Saint-Siège [6°].

6° (Notes du Père Moreau) Je ne serais chargé du gouvernement général que pour trois ans au plus, et l’on aviserait à m’ôter cette charge plus tôt en organisant le Chapitre qui devrait élire le supérieur, son conseil, etc., aux termes de nos constitutions approuvées par le Saint-Siège.

Article 7. -Mon observation sur l’article 6 rend le 7e inutile [7°].

7° (Notes du Pére Moreau) En attendant, votre Société serait représentée dans nos conseils d’administration par [les] deux membres que vous désireriez, vous non compris.

Article 8. -Je serais enchanté d’avoir pour remplaçant M. de Cabrières; mais pour preuve de ma bonne volonté à nous unir, je préférerais pour collaborateur votre maître des novices actuel. [Peu possible (Moreau)] [8°].

8° (Notes du Père Moreau) Vous feriez les fonctions de maître des novices provisoirement et au besoin seriez remplacé par M. de Cabrières jusqu’à l’organisation du Chapitre.

Article 9. -Adopté. Je dois en passant vous faire observer que je trouve la pension que paient nos religieux à Rome un peu chère, et que sur ce pied vos novices devraient payer au moins 800 francs, ce qui me semble excessif [9°].

9° (Notes du Père Moreau) Notre maison d’études théologiques serait à Sainte-Brigitte de Rome.

Article 10. -Jamais la question de nom ne fera difficulté entre nous [10°](2).

10° (Notes du Père Moreau) La nouvelle Congrégation porterait le nom d’Augustins de Sainte-Croix

Fiat! Fiat!

Moreau.

Article 11. -Permettez-moi d’ajouter un article 11e. Je tiens à vous faire connaître toute ma pensée sur les Joséphites. Il faudra nécessairement qu’un jour la Congrégation des prêtres les absorbe, en ce sens que les uns seront simples Frères convers employés aux champs, aux jardins, aux divers métiers et au service; les autres seront mis dans une catégorie un peu plus élevée sous le titre de Frères oblats; et les autres enfin seront rangés parmi nos religieux de choeur. Ceci devra s’opérer très lentement, mais la direction générale devra tendre à ce but afin de simplifier les rouages.

Vous voyez, mon Révérend Père, que je me hâte de vous répondre et que je simplifie les choses autant qu’il est possible. Je fais recopier votre note afin que vous puissiez avoir sous les yeux vos demandes et mes réponses.

En y réfléchissant, je trouve que si vous le vouliez, nous pourrions gouverner chacun nos deux communautés sous l’autorité de l’évêque du Mans, jusqu’à notre réorganisation économique. Ne pensez-vous pas qu’il serait important de préparer le personnel des maisons de façon à ce qu’à mesure que les religieux sortiraient du noviciat, ils repeuplassent les communautés d’où l’on ferait partir les religieux auxquels le second noviciat manquerait?(3).

Veuillez agréer, mon bien cher et révérend Père, l’hommage de mes sentiments les plus respectueux et les plus dévoués(4).

E. D’ALZON

[B. -MEMOIRE SUR LA MAISON DE NIMES]

Le sol et le bâtiment de l’Assomption ont une valeur réelle d’environ 400.000 francs. Il serait facile de détacher la partie qui longe l’esplanade et d’en vendre jusqu’à concurrence de 140.000 francs, en conservant toujours un local suffisant pour 150 pensionnaires et dont la valeur se trouverait ainsi réduite à f. 260.000.

Mais ce morcellement de la maison ne serait-il pas de nature à porter un préjudice notable à l’avenir moral du collège? J’appelle votre attention sur ce point. Pensez-vous, mon Père, qu’il ne vaudrait pas mieux vous charger de la totalité du sol et des bâtiments, au prix de f. 400.000. Ce serait à vous de choisir plus tard le moment opportun pour une vente partielle ou totale; et dans ce dernier cas, nous aurions alors à votre disposition, hors de l’enceinte du chemin de fer, un emplacement magnifique pour la construction d’un collège. Ce terrain vous serait cédé à des conditions très favorables.

La valeur du mobilier, d’après la dernière estimation, le porte à f. 118.000. En exceptant la bibliothèque, et les ornements sacerdotaux et les vases sacrés de la chapelle, cette valeur serait encore de f. 110.000. Je réserverais pour nos maisons la bibliothèque et la chapelle, et nous réduirions le prix du mobilier à f. 50.000.

Dans l’état actuel, le chiffre net de la recette est de f. 105.000. Il serait facile avec un personnel composé presque exclusivement de religieux de ne pas dépasser ce chiffre dans les dépenses.

Permettez-moi, mon Père, de vous soumettre le budget que j’ai fait dresser; je le joins à ma lettre. Le déficit présumé de ce budget (2.900) sera plus que couvert par la baisse des prix des denrées, qu’on peut avec raison supposer d’un sixième. La dépense de chaque maître pourrait aussi être réduite à 750 francs.

Dans le cas où vous accepteriez la totalité du sol et des bâtiments, une somme de 250.000 francs me serait absolument nécessaire. Si vous préférez ne garder que la partie estimée seulement 260.000, je me contenterais de 150.000 francs.

Vous voyez, mon Père, la nécessité indispensable de visiter, à votre retour de Rome, le collège de Nîmes, et de voir aussi l’emplacement qui pourrait un jour servir à la construction d’un collège.

[C. -BUDGET PRESUME](5)

Personnel des maîtres pour l’enseignement des lettres

1 Directeur -Nourriture, entretien, voyages …………1.000

1 Préfet de discipline -Nourriture, entretien………….800

1 Econome………………. »………. »…………….800

1 Prof. de philosophie…… »………. »…………….800

1 Prof. d’histoire………. »………. »…………….800

1 Prof. de mathématiques -Nourriture, entretien………..800

1 Prof. de physique et d’histoire naturelle……………800

8 Prof. de classes………………………………..6.400

5 Surveillants dont un suppléant……………………4.000

1 Prof. de langues vivantes (adjoint) -Son traitement…1.000

1 Prof. de dessin (adjoint)………………………….500

……………………………………………….17.700

En complétant le personnel pour l’enseignement des sciences

1 second prof. de mathém.(adjoint) -Son traitement……2.000

1 second prof. de dessin (adjoint) -Son traitement……..500

……………………………………………….20.000

[Traitements des maîtres et autres données*]

Personnel des maîtres…………………………….20.000

Frais de nourriture………………………………47.000

Blanchissage……………………………………..5.000

Eclairage………………………………………..3.000

Entretien du mobilier……………………………..2.000

Chapelle…………………………………………1.000

12 Frères convers…………………………………7.200

Intérêts de 450.000………………………………22.500

Dépenses……………………………………….107.900

Recettes……………………………………….105.000

Déficit présumé…………………………………..2.900

Baisse des denrées………………………………..7.833

Réduction des traitements……………………………950

………………………………………………..8.783

………………………………………………..2.900

Bénéfice présumé(6)……………………………….5.883

E.D'ALZON
Notes et post-scriptum
2. Là s'arrête l'orig.ms. du P. Moreau (ACR, EA 460). La minute de Sainte-Croix (cop.conf. ACR, DL 112) regroupe les articles 1 à 7 sous le titre: *Intérêts matériels*; l'article 8 a pour titre: *Noviciat provisoire*; l'article 9: *Maison d'études*; l'article 10: *Dénomination*. Viennent ensuite 2 autres paragraphes:
*Office divin*
Le bréviaire se réciterait en choeur dans les noviciats; et, à sa place, le petit office, pour tous les sujets non encore dans les ordres sacrés, ou non Frères coadjuteurs temporels.
Dans les autres maisons, on ne le réciterait en choeur que là où il y aurait un nombre suffisant de profès pour le faire régulièrement et sans nuire aux emplois.
*Règles et Constitutions de Sainte-Croix*
Tout en adoptant la règle de saint Augustin, on ne modifiera les règles et constitutions de Sainte-Croix qu'autant que le Chapitre général le jugera nécessaire pour le plus grand bien de la Congrégation; et l'on ne pourra imposer aucune nouvelle obligation aux Frères faisant actuellement partie de l'oeuvre comme profès.
3. Ce paragraphe est transcrit comme un *P.S.* dans la cop.ms. ACR AO 111.
4. Ce paragraphe est de la main du P. d'Alzon dans l'orig.ms. des archives de Sainte-Croix (cop. conf. ACR, AL 112).
5.Archives de Sainte-Croix, cop. conf. ACR, DL 1121. Le P. d'Alzon va répondre, sous forme de lettre, à des "notes" laissées par le P. Moreau, après son passage à Nîmes et Montpellier, à propos de l'union entre Sainte-Croix et l'Assomption. -Nous reproduisons, sous le texte de la lettre du P. d'Alzon, les articles de ces notes auxquels il est fait allusion; et, dans le texte même de la lettre, les annotations du P. Moreau après lecture. Les archives de Sainte-Croix possèdent une *minute* (cop. conf. ACR DL 112) plus élaborée et plus complète que l'original laissé par le P. Moreau (ACR, AE 460), et que nous reproduisons.
2. Là s'arrête l'orig.ms. du P. Moreau (ACR, EA 460). La minute de Sainte-Croix (cop.conf. ACR, DL 112) regroupe les articles 1 à 7 sous le titre: *Intérêts matériels*; l'article 8 a pour titre: *Noviciat provisoire*; l'article 9: *Maison d'études*; l'article 10: *Dénomination*. Viennent ensuite 2 autres paragraphes:
*Office divin*
Le bréviaire se réciterait en choeur dans les noviciats; et, à sa place, le petit office, pour tous les sujets non encore dans les ordres sacrés, ou non Frères coadjuteurs temporels.
Dans les autres maisons, on ne le réciterait en choeur que là où il y aurait un nombre suffisant de profès pour le faire régulièrement et sans nuire aux emplois.
*Règles et Constitutions de Sainte-Croix*
Tout en adoptant la règle de saint Augustin, on ne modifiera les règles et constitutions de Sainte-Croix qu'autant que le Chapitre général le jugera nécessaire pour le plus grand bien de la Congrégation; et l'on ne pourra imposer aucune nouvelle obligation aux Frères faisant actuellement partie de l'oeuvre comme profès.
3. Ce paragraphe est transcrit comme un *P.S.* dans la cop.ms. ACR AO 111.
4. Ce paragraphe est de la main du P. d'Alzon dans l'orig.ms. des archives de Sainte-Croix (cop. conf. ACR, AL 112).
6. Mise au courant de la lettre du P. Moreau et de la réponse du P. d'Alzon, Mère M.-Eugénie ne lui cacha pas ses sentiments, le 27 mars: "Je trouvais en lisant la copie de la lettre que le P. Moreau vous a adressée en quittant Nîmes, et votre réponse, que vous faisiez déjà trop de concessions. Il faut que vous les formiez et leur donniez votre esprit, sinon comme l'esprit leur manque vous y perdrez; au contraire, malgré leur nombre, ils ont besoin de vous pour se relever comme niveau. Il est très essentiel que les dispenses de noviciat ne soient accordées pour chaque Congrégation qu'avec le consentement du chef de l'autre Congrégation. Je ne comprends pas que le P. Moreau puisse être supérieur des Assomptionistes, d'ici à la fusion. Qu'il reste chargé de sa Congrégation et vous de la vôtre jusqu'à constitution définitive. Les vôtres ne peuvent guère s'arranger d'autre chose. Comment pensez-vous prendre pour assistant de noviciat leur maître des novices qui doit être étroit! Enfin, je suis un peu révoltée de cette absorption dans le nom de Sainte-Croix, moins bien posé dans l'opinion que le vôtre. Mais Mgr du Mans mettra ordre à cela".