Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.134

2 oct 1856 Lavagnac, ESGRIGNY Luglien de Jouenne

Il partage toutes ses angoisses sur la santé de son fils et fait prier pour lui. -Sa propre santé l’oblige à renoncer à plusieurs de ses occupations ordinaires. -Il le visitera par lettres dans sa solitude de Bretagne.

Informations générales
  • T2-134
  • 730
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.134
  • Orig.ms. ACR, AO 4; D'A., T.D. 39, n. 105, pp. 203-204.
Informations détaillées
  • 1 AMITIE
    1 COMMUNAUTE RELIGIEUSE
    1 EMOTIONS
    1 MALADIES
    1 PRIERE DE DEMANDE
    1 REPOS
    1 SAINTE COMMUNION
    1 SANTE
    1 SOLITUDE
    1 SOUFFRANCE
    1 VERTUS
    2 BAILLY, EMMANUEL SENIOR
    2 DU LAC, JEAN-MELCHIOR
    2 ESGRIGNY, MADAME LUGLIEN D'
    2 ESGRIGNY, RENE D'
    2 GOURAUD, HENRI
    2 LA GOURNERIE, EUGENE DE
    3 BRETAGNE
    3 PARIS
    3 POULIGUEN, LE
  • A MONSIEUR LUGLIEN DE JOUENNE D'ESGRIGNY
  • ESGRIGNY Luglien de Jouenne
  • 2 oct[obre 18]56.
  • 2 oct 1856
  • Lavagnac,
La lettre

Vous venez de passer, mon cher ami, par de bien cruelles angoisses, et j’eusse voulu vous dire plus tôt combien je les partageais.(1) Ma santé s’y est opposée jusqu’à aujourd’hui. Du Lac, en m’écrivant avant-hier, m’apprend que votre petit malade peut être transporté de temps en temps en plein air; de son côté, Gouraud comparait son état à celui d’un jeune Anglais, qui avait été chez moi à Paris et qui, après avoir été aussi malade que René, se porte aujourd’hui très bien. Espérons que la comparaison se soutiendra jusqu’au bout et que votre cher petit homme n’en sera un jour que plus vigoureux. Si je ne vous ai pas écrit, j’ai bien fait prier pour vous, pour Mme d’Esgrigny, et, dans bien des communautés on s’est intéressé à cette santé inconnue, comme à tout ce que j’avais de plus précieux. De son côté, du Lac m’écrit avec quels sentiments d’admiration pour Mme d’Esgrigny il a quitté Le Pouliguen; sa patience, sa force morale, son esprit chrétien ont bien vivement impressionné notre ami, qui me communiquait avec joie toutes les émotions qu’il avait éprouvées au milieu de tant de douleurs.

Je ne sais combien de personnes firent leur communion, le jour fixé pour celle de René. Il paraît que son état obligea de hâter le moment indiqué; mais certainement toutes ces prières rétrospectives auront porté leur fruit.

Je vous disais que ma santé m’avait empêché de vous écrire plus tôt. Je vais pourtant beaucoup mieux, mais tous les médecins me déclarent que je ne puis retourner à mon état normal qu’à la condition d’un très grand repos, et c’est pour cela que, tout en me débarrassant d’une foule d’affaires, je suis forcé de laisser de côté tout ce qui serait le plus agréable pour consacrer les forces qui me reviennent à des devoirs dont je ne puis me dispenser.(2) Si pourtant vous êtes condamné, comme du Lac me l’apprend, à passer une partie de l’hiver dans le recoin de la Bretagne où la maladie de René vous exile, j’espère bien pouvoir vous y envoyer de temps en temps quelques paroles d’amitié, au moins pour vous distraire d’une solitude que la mauvaise saison rendra probablement plus grande.

Adieu, mon cher ami. Veuillez offrir mes respectueux souvenirs à Mme d’Esgrigny. A vous de tout coeur. N’y a-t-il pas vingt-neuf ans que nous nous sommes rencontrés? (3)

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Par trois lettres de du Lac, des 11 août, 18 et 29 septembre, le P. d'Alzon avait été mis au courant de l'épreuve que traversait la famille de leur ami d'Esgrigny. Son petit garçon, René, était tombé dans un état de maladie si grave que l'on avait devancé au 16 août sa première communion, et même qu'on l'avait devancée encore au 12 en y joignant l'onction des malades. Malgré leur angoisse, les parents avaient voulu que tout se passe dans une atmosphère de fête chrétienne. Un mieux relatif s'ensuivit et la famille rejoignit avec le petit malade leur propriété du Pouliguen en Loire-Atlantique. Du Lac était là pour les entourer et de la Gournerie leur avait fait une visite.
2. Le 16 octobre, d'Esgrigny remerciera le P. d'Alzon de son amitié et de ses prières, et poursuivra par ces lignes à propos de sa santé: "Vous êtes mieux, vous-même; soyez donc tout à fait bien! Ayons plus d'une joie à la fois! Par du Lac et Gouraud je suis de loin les alternatives de cette santé que vous avez trouvé moyen d'ébranler à forces de travaux, de dévouement, d'activité chrétienne. Nous parlons souvent de vous, gais ou tristes, selon que vous êtes mieux ou moins bien. Pour moi, je vous donne tous les torts imaginables quand les nouvelles sont mauvaises, sauf à vous absoudre à contrecoeur quand elles sont meilleures." -C'est *votre* faute. -*Il* abuse de son admirable constitution. - *Il* n'écoute pas ses amis. - Vous verrez que dès qu'il sera guéri, *il* recommencera de plus belle, au lieu de se reposer et de se fortifier." Etc., etc. Ne croyez pas que je vous épargne, pas plus que vous ne vous épargnez vous-même, vous sans doute parce que vous ne nous aimez pas assez, et moi parce que je vous préfère."
3. En 1827, aux réunions de "la soirée", ou groupe intime de quelques jeunes amis qui se réunissaient, une soirée par semaine, dans la pension de M. Bailly.