Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.139

17 oct 1856 [Nîmes, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

La vérité sur la colonie algérienne. -La nouvelle dette est composée de vieilles factures. -Il est bien décidé à fermer Nîmes et à ne pas faire de nouvelles fondations. -Elle ne doit aucunement s’engager pour lui.

Informations générales
  • T2-139
  • 735
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.139
  • Orig.ms. ACR, AD 47; D'A., T.D. 22, n. 411, pp. 59-60.
Informations détaillées
  • 1 COLLEGE DE NIMES
    1 COLONIES AGRICOLES
    1 CREANCES A PAYER
    1 FRERES CONVERS
    1 OEUVRES SOCIALES
    1 VIE DE FAMILLE
    2 BERTHOMIEU, JOSEPH-AUGUSTIN
    2 BRUN, HENRI
    2 HENRI, EUGENE-LOUIS
    2 MERMILLOD, GASPARD
    3 ALGER
    3 ALGERIE
    3 GENEVE
    3 MIREMAN
    3 NIMES
    3 PARIS
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • le] 17 oct[obre 18]56.
  • 17 oct 1856
  • [Nîmes,
La lettre

Ma chère fille,

Permettez-moi de vous rassurer du premier coup. Je me suis fort mal expliqué pour la colonie algérienne.(1) Si j’y suis pour quelque chose, ce serait pour y donner le P. Brun et nos Frères de la campagne. On leur donnerait, outre la nourriture, l’entretien, etc., un traitement de 600 francs pour lui. La gestion des fonds ne serait pas entre ses mains, et le gouvernement payerait la pension des enfants. Restez tranquille. Chat échaudé craint l’eau froide.

Je viens de me faire expliquer l’affaire des 86.000 francs; elle se réduit d’abord à près de moitié, et ce sont des factures que l’on fait courir d’une année sur une autre. C’est un héritage de l’abbé Henri. Quant à ce que vous devez écrire, je pense que, sauf meilleur avis, vous ne devez pas vous engager pour moi. Je crois qu’il vaut mieux subir son sort et fermer Nîmes. Nous pourrons y faire encore un certain bien, et cette douleur comptera pour autre chose. La maison une fois fermée, nous verrons ce que nous devrons faire pour fortifier Paris. Vous voyez bien que je ne suis pas à chercher de nouvelles aventures.

J’ai écrit à l’abbé Mermillod pour lui demander si, le 15 nov[embre], il serait à Genève. Je vous écris sur un chiffon, parce que je veux que ces lignes partent au plus tôt pour vous rassurer. Croyez-le bien, pour le moment, je n’ai pas l’esprit tourné aux fondations nouvelles. Comme vous dites, Dieu me bénit trop peu dans les succès, pour que je croie bon de rien tenter de nouveau. J’ai de bien douloureux brisements du côté de ma famille, et ce n’est pas le moment de faire des choses qu’elle critiquerait. Du reste, il y a là une punition très méritée.

Tout vôtre, ma chère fille, en Notre-Seigneur.

E. D’ALZON.

Je dois vous faire observer que le projet pour Alger, même comme je vous l’explique, est encore à l’état d’étude. Nous nous sommes débarrassés d’une partie de nos petits protestants, il ne nous en reste que six ou sept sur les bras.

E.D'ALZON
Notes et post-scriptum
1. Le 16 octobre, Mère M.-Eugénie réagissait vivement à la nouvelle d'un transfert possible en Algérie de l'orphelinat de Mireman. "Me pardonnerez-vous, écrit-elle, de venir vous dire que je suis horriblement effrayée de votre idée de continuer votre orphelinat en l'envoyant à Alger. Ayant déjà tant d'embarras, tant d'affaires, pouvez-vous être parfaitement assuré que cette oeuvre sera entièrement et complètement gratuite? Le P. Brun, dont l'administration à Mireman a produit un si grand déficit quand il croyait joindre les deux bouts, n'aura-t-il pas de déficit en Algérie? N'y a-t-il pas d'illusions dans les espérances qu'on vous donne? Tout me dit qu'il y en a, et ce qui me le dit surtout, c'est qu'il n'y a pas encore eu d'oeuvres commencées avec les plus belles espérances qui n'ait finie par vous être onéreuse. Vous ne le pouvez pas, vous ne le devez pas. Le nombre de vos sujets est insuffisant pour vos collèges: pourquoi vouloir avoir un orphelinat? Il faut que vous me permettiez de vous avouer que cette pensée me donne de la *tristesse*et du *découragement*. Je n'ose vous le dire, mais je le dois: j'entraîne ma Congrégation à prendre des responsabilités pour vous conserver le collège de Nîmes et le transférer, il est parfaitement convenu pour le moment que vous liquidez toute autre oeuvre, et vous en commenceriez une autre! Encore si je savais que M. Berthomieu l'approuve! Votre famille l'apprendra, en fera une raison de vous refuser les sommes promises. Dans quelle position sera Nîmes? Laissez-moi penser, mon cher Père, que je ne vous blesse pas et que vous comprenez mes inquiétudes, j'ai cru qu'il y allait de ma conscience de vous les exposer. [...] Je vous demande de nouveau pardon et prie Dieu de vous porter plus à développer l'oeuvre du côté des hommes à former que des établissements à fonder, et vous savez, mon Père, que je ne vous parlerai pas ainsi si je n'étais vôtre comme je le suis en Notre-Seigneur."