Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.150

7 nov 1856 [Nîmes, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Elle devrait sonder l’abbé de Cabrières sur ses intentions. -Son avis sur quelques personnes. -Il apprécie son amitié.

Informations générales
  • T2-150
  • 746
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.150
  • Orig.ms. ACR, AD 53; D'A., T.D. 22, n. 419, pp. 68-69.
Informations détaillées
  • 1 AMITIE
    1 BONTE
    1 CHAPELLE
    1 FOI
    1 PLANTES
    1 PRIEURE DE NIMES
    1 TRISTESSE
    2 BALINCOURT, MARIE-ELISABETH DE
    2 BARAGNON, MADAME AMEDEE
    2 BEVIER, MARIE-AUGUSTINE
    2 BRUN, HENRI
    2 CABRIERES, ANATOLE DE
    2 HOWLY, MARIE-WALBURGE
    2 REVOIL, MADAME HENRI-ANTOINE
    2 SABRAN, MADAME LOUIS
    3 PARIS
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • le 7 novembre 1856].(1)
  • 7 nov 1856
  • [Nîmes,
La lettre

Vous recevrez, en même temps que cette lettre, quelques lignes que j’ai dictées hier au soir à l’abbé de Cabrières. Comme vous le verrez, puisqu’il est en ce moment sur la route de Paris, veuillez examiner sans faire semblant de rien:

1° La cause de sa tristesse. Soeur M.-Walb[urge] m’a dit, ce matin, qu’il était triste.(2) Quoique je commence à peu compter sur le jugement de Soeur M.-Walb[urge] et que l’abbé de C[abrières] ait un redoublement extérieur d’affection pour moi, je ne sais que penser.

2° J’ai parlé dans ma lettre de Mme Revoil, mais Mme Sabran est sur la même ligne, sauf que Mme Revoil a le sentiment chrétien qu’elle combat, et que Mme Sabran me semble avoir une certaine incapacité de l’acquérir et qu’elle a fort peu de moyens. Il y a pour moi temps perdu, de la part de l’abbé de C[abrières], en toutes ses conversations avec elle, parce qu’il n’y aura pas de résultat et que ce cher enfant commence à se donner du ridicule.

J’entre aussi bien que je puis dans vos idées pour Soeur M.-Aug[ustine]. Je crois pouvoir vous répéter que Soeur M.-Walb[urge] me fait toujours l’effet de vous être entièrement soumise de coeur. Ne parlons plus de la petite Soeur M.-Elisabeth; il est très heureux qu’elle soit à Paris. Faites comprendre à Mme Baragnon qu’arrivée au port, je n’ai plus à lui écrire beaucoup et que, pour le moment, je suis un peu fatigué.

Puisque vous me parlez de votre manière d’exprimer votre amitié, sachez que je l’aime mille fois mieux que celle de ce bon abbé de Cab[rières], qui me fait un mal affreux par ses redoublements de tendresse. Il me semble que même mes défauts doivent vous aller mieux, car s’ils se montrent, il me semble que cela vient d’une plénitude de confiance qui ne craint pas de montrer même les rugosités de l’âme. Il n’y a pas que Dieu qui me soit bon. Vous aussi, ma fille, vous êtes pour moi la créature la meilleure pour me faire du bien. Croyez que je le sens. Au fond, je crois que je me vante, quand je dis que je souffre. Il me semble bien que je suis prêt à souffrir encore plus, pour donner le moindre degré d’amour de plus à Notre-Seigneur. Mais qu’y a-t-il de vrai dans ces imaginations? Je m’applique à croire et à agir selon la foi. Dieu jugera mon coeur, que je lui ouvrirais à deux battants, s’il avait besoin de ma permission pour y entrer.

Je voudrais bien une petite chapelle, si cela devait nous être utile. Je presse la levée du plan par terre de votre terrain, parce qu’il faudra faire bientôt planter. Adieu et tout vôtre.

Vendredi matin.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Le ms porte: *7 déc. 56*, date corrigée par la destinataire: *nov*.
2. Après avoir causé longuement avec l'abbé de Cabrières, Mère M.-Eugénie écrit le 9 novembre: "J'ai pu le sonder parfaitement; il s'est ouvert beaucoup et je suis fort contente pour vous de ce que j'ai trouvé en lui. Non, il n'est pas triste; s'il l'a été, c'est, je crois, que Dieu le travaille, et il voudrait faire part à Soeur M.-Walburge des bons effets de ce travail. Mais quant à l'Assomption, je ne l'ai jamais vu si près. Continuez à être *tendre* pour lui, c'est réellement que vous avez par là une grande puissance sur lui, et la pensée que, par sa tendresse, il vous fait beaucoup de bien, lui cause beaucoup de joie. Il ne se doute pas de ce qui en lui vous fait de la peine, et s'il le voyait, il trouverait simple ment que vous êtes injuste. Le second et très puissant attrait pour lui, c'est notre petit couvent; et j'ai dû lui faire plaisir en le lui ouvrant avec la plus grande confiance dans tout ce que je lui ai dit. Il n'entrera pas maintenant dans l'ordre, je ne le crois pas du moins, mais il désire vivement, à la fermeture du collège qu'il croit probable et désirable pour l'honneur de l'Assomption, il désire rester avec les vôtres, et si la Congrégation prend une forme plus religieuse, je crois qu'il s'y donnera et qu'il en a la pensée dès à présent à cette condition. Tout ceci entre nous. Je regretterais que ce fût le P. Brun qui restât avec lui, en ce sens que c'est celui des vôtres dont il parle avec le moins de sympathie et dont la forme religieuse paraît moins lui aller. Mais en tout cas, M. de Cabrières a fait beaucoup de progrès vers l'Assomption, et ce qui en concentrera les forces achèvera de l'y attirer en satisfaisant sa raison, tandis que son coeur est attiré par vous et par sa sympathie pour nos Soeurs."