Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.257

13 jun 1857 Lamalou, MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse

Il vient d’appuyer vivement la lettre de sa soeur, Mme de Puységur, écrite à Montpellier. -Il est content de Soeur M.-Walburge, à Nîmes, -Avantages et limites de la sagesse humaine.

Informations générales
  • T2-257
  • 850
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.257
  • Orig.ms. ACR, AD 1116; D'A., T.D. 22, n. 444, pp. 92-94.
Informations détaillées
  • 1 COLLEGE DE NIMES
    1 CREANCES A PAYER
    1 JARDINS
    1 PENSIONNATS
    1 PRIEURE DE NIMES
    1 PRUDENCE
    1 SAGESSE HUMAINE
    1 SANTE
    1 SUPERIEURE
    1 VIE CONTEMPLATIVE
    1 VIE HUMAINE
    1 VOYAGES
    2 BARNOUIN, HENRI
    2 BRUN, HENRI
    2 CHABOT, JEANNE DE
    2 EVERLANGE, MARIE-EMMANUEL D'
    2 GOUY, MARIE DU SAINT-SACREMENT DE
    2 HAY, MARIE-BERNARD
    2 HOWLY, MARIE-WALBURGE
    2 IGNACE DE LOYOLA, SAINT
    2 MARIE, SOEUR DE MARTHE
    2 MARTHE, SAINTE
    2 O'NEILL, THERESE-EMMANUEL
    2 PUYSEGUR, MADAME ANATOLE DE
    2 REVOIL, HENRI-ANTOINE
    2 SAUGRAIN, HIPPOLYTE
    2 VAILHE, SIMEON
    3 MONTPELLIER
  • A LA R. MERE MARIE-EUGENIE DE JESUS
  • MILLERET Marie-Eugénie de Jésus Bhse
  • 13 juin [18]57.
  • 13 jun 1857
  • Lamalou,
La lettre

Ma chère fille,

Je reçois une lettre de Mme de Puységur. Elle me dit qu’elle vient d’écrire très fortement à Montpellier. J’espère que cette lettre arrivant au moment où l’on en recevra une autre de moi, on se décidera à revenir sur l’affaire que vous avez bien voulu proposer. Si en répondant à ma lettre qui a dû arriver ce matin, on ne me dit rien de nouveau,ce sera une preuve que l’affaire est manquée. Je vous écrirai aussitôt et nous verrons ce que nous devons faire. Il me semble qu’il n’y a plus à attendre que quarante-huit heures au plus tard.

J’ai écrit hier une lettre peut-être un peu vive, mais c’était le coup décisif. J’en avais du remords, mais il est possible qu’arrivant en même temps que celles de Mme de Puységur, mes observations aient produit un bon effet.

Comment va Soeur T[hérèse]-Em[manuel]? Les jours si variables que nous venons de traverser me donnent de l’inquiétude pour elle. Espérons que Dieu nous la laissera encore, vous en avez tant besoin. Vous ai-je dit que, depuis votre départ, Soeur M.-Walburge a manifesté un entrain que je ne lui connaissais pas? Votre voyage lui a certainement fait du bien. J’ignore ce que vous avez pu lui dire, mais j’en juge par les résultats. S’il en est ainsi, peut-être vaudrait-il autant la laisser quelque temps supérieure. Si Soeur M. Bernard est si engourdie, elle ne relèvera pas le pensionnat, et ne pensez-vous pas qu’en remplaçant, dans deux ou trois ans, Soeur Marie-Walb[urge] par Soeur Marie du Saint-Sacrement, ce qu’il y a d’actif dans la nature de celle-ci aiderait bien mieux le développement de la maison; et, dans tous les cas, peut-être vous aiderait-elle plus utilement quand il s’agira de bâtir.

Vous a-t-on dit que je suis allé deux ou trois fois sur votre terrain pour examiner les endroits qu’il faudra planter; mais on a beau faire, on ne peut rien arrêter tant que le plan de la maison n’est pas fixé en projet. C’est par là qu’il faut nécessairement commencer. Toutes les mesures sont fautives, si l’on n’a pas celle-là. J’ai pris avec moi l’abbé Barnouin, le Fr. Hippolyte, le P. Brun; je leur ai expliqué ma manière de voir, je les ai chargés de vous écrire, mais je pense qu’il vous faudra bien faire un plan de la maison Je dois en conscience vous prévenir que voilà plusieurs constructions où M. Revoil dépasse de beaucoup les chiffres de ses devis.

Je dois vous parler aussi de Notre-Seigneur et je suis un peu en peine pour vous dire un petit scandale que vous me causez quelquefois. C’est quand je vous entends parler des avantages de la sagesse humaine. Je sais bien que je devrais être payé pour être de votre avis, et pourtant, tout en admettant qu’il y a beaucoup de vrai dans ce que vous me dites, il y a au fond de mon âme comme une protestation. Il me semble que vous êtes alors beaucoup trop Marthe, qui, elle aussi, devait dire: « Si personne ne s’occupe de la cuisine, le dîner ne sera jamais servi ». Pourtant le dîner fut servi et Marie ne bougea pas des pieds de Jésus. Saint Ignace veut qu’on mette toute la prudence humaine aux affaires, et puis, qu’on s’abandonne à Dieu; j’aime à croire que vous le faites; mais cette seconde partie, vous en acquittez-vous aussi bien que de la première?(1).

Si mes lettres ne vous assomment pas, peut-être en aurez-vous encore une demain: ce sera sous le couvert de Soeur M.-Emmanuel(2).

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Le 18 juin, Mère M.-Eugénie avouera au P. d'Alzon que"sincèrement, écrit-elle, je ne me reconnais pas cette estime pour la sagesse *humaine*, qui vous inquiète à mon égard. Je vous assure, poursuit-elle, que [ce] que je désire pour notre Congrégation, c'est une sagesse chrétienne que je définirais surtout en deux choses: ne pas trop embrasser et s'appliquer tout entier à ce dont on est chargé. Maintenant, il y a chez moi un ordre de tentations dont j'ai dû vous parler plus d'une fois, [et] qui consiste à me dire que pour remplir ses devoirs envers les autres hommes, il vaudrait peut être encore mieux avoir de la sagesse humaine que de n'en pas avoir du tout. Mais je repousse cette pensée; et s'il faut vous le dire, je pense que, dans ma conduite même, je donne souvent moins à la prudence que l'on ne pourrait le faire chrétiennement; d'autres sentiments l'emportent sur elle dans mes décisions, et je crois que la confiance en Dieu est peut-être la vertu sur laquelle j'ai le moins de reproches à ma'adresser [...] Quel mystère que le pauvre coeur de l'homme et quel autre regard que celui de Dieu l'a jamais bien connu? Le mien me présente encore bien des problèmes. Mon plus grand chagrin est d'y trouver si peu d'amour, et quand je cherche les moyens d'en mettre, croiriez-vous que je pense plus à des consolations qu'à des sacrifices?"
2. Le P. Vailhé a lu: *pour la conversion de..* Il n'y a pas d'allusion qui justifierait cette lecture dans les lettres de Mère M.-Eugénie. Le 18 juin, elle communique au P. d'Alzon que Soeur Marie-Emmanuel désire qu'il écrive à Jeanne de Chabot: "L'enfant a réellement confiance en vous, quoique cela n'aille pas jusqu'à l'empêcher d'aimer le plaisir".