Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.279

6 jul 1857 Clichy, ADORATRICES

Le sang de Jésus-Christ ne détruit pas seulement le péché, il est aussi le vin qui fait germer les vierges. -Elles doivent purifier leur robe dans le sang de l’Agneau, y puiser la vie divine, pour être tout à Dieu.

Informations générales
  • T2-279
  • 869
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.279
  • Orig.ms. AC R.A.; D'A. T.D. 35, n. 8, p. 179-182.
Informations détaillées
  • 1 ANGES
    1 CONVERSION SPIRITUELLE
    1 CREATURES
    1 CROIX DE JESUS-CHRIST
    1 DIEU LE FILS
    1 ECRITURE SAINTE
    1 EPOUSES DU CHRIST
    1 FETE
    1 INGRATITUDE ENVERS DIEU
    1 JOUISSANCE DE DIEU
    1 LUTTE CONTRE LE PECHE
    1 MAJESTE DE DIEU
    1 MORTIFICATION
    1 PECHE ORIGINEL
    1 PERFECTION
    1 PURIFICATION
    1 SALUT DU GENRE HUMAIN
    1 SANG DE JESUS-CHRIST
    1 SOUFFRANCES DE JESUS-CHRIST
    1 VERTU DE CHASTETE
    1 VIERGES CONSACREES
    2 EVE
    2 JEAN, SAINT
    2 PAUL, SAINT
  • AUX ADORATRICES DU SAINT-SACREMENT
  • ADORATRICES
  • 6 juillet 1857.
  • 6 jul 1857
  • Clichy,
La lettre

Mes chères filles,

Nous célébrions hier la fête du Précieux-[Sang] de Notre-Seigneur, et, puisque je vous ai souvent engagées à vous abriter sous l’arbre de la croix, d’où ce sang divin a coulé sur la terre pour nos péchés, je veux vous dire quelque chose aujourd’hui de ses effets merveilleux.

L’effusion du sang de Jésus-Christ est la condition absolue posée par Dieu pour le salut de tous les hommes, et, en ce sens, notre reconnaissance doit être sans bornes pour Celui qui n’a pas craint de le répandre au milieu de tant de douleurs, pour nous témoigner l’immensité de son amour. Un Dieu versant la dernière goutte de son sang pour laver nos souillures et nous ouvrir les portes du ciel, c’est là, certes, un spectacle bien capable de ranimer notre horreur du péché, de confondre notre ingratitude et de nous décider enfin à entreprendre généreusement l’oeuvre de notre conversion.

Mais je veux vous faire voir dans ce sang de Notre-Seigneur de bien autres avantages pour des personnes qui veulent non seulement se convertir, mais encore devenir parfaites. Le sang de Jésus-Christ ne détruit pas seulement le péché, il n’expie pas seulement les crimes les plus épouvantables; il est un principe de bien, la semence des plus délicates vertus. N’est-il pas appelé par un prophète le vin qui fait germer les vierges?(1) Et c’est à ce point de vue que je veux me placer pour vous en parler aujourd’hui.

Le sang de Notre-Seigneur était uni à la divinité, et c’est pour cela que son mérite était infini; c’est pour cela aussi qu’il ne devait pas seulement produire un effet négatif, être un remède contre l’affreuse maladie originelle; il devait purifier les âmes et leur rendre leur première beauté; il devait même faire plus, il devait ajouter quelque chose à cette beauté première. Le Fils de Dieu, régnant au ciel a une cour digne de lui: ce sont les anges. Dieu est esprit, et l’armée des plus purs esprits environne son trône inaccessible. Le Verbe se faisant homme voulait aussi sa cour composée d’être semblables à lui, revêtus comme lui d’une chair mortelle, mais ayant quelque chose de la pureté divine qu’il est venu apporter sur la terre. Qui composera cette cour d’esprits angéliques dans un corps mortel, sinon les vierges? Et les vierges sont produites, nous dit le Saint-Esprit, par le sang du Fils de Dieu. Vous voyez tout d’un coup, mes chères filles, ce que vous êtes et à quelle source mystérieuse remonte votre merveilleux privilège. Vierges, vous remplacez les anges autour du trône de Dieu fait homme, et vous n’êtes vierges que par la puissante fécondité de son sang.

Je laisse de côté la première considération. Nous parlerons plus tard de ce que vous êtes, en tant que placées autour de l’Agneau que vous devez suivre partout(2). Je m’arrête à vous considérer comme le fruit le plus précieux de cette merveilleuse semence que Notre-Seigneur a déposée dans la terre en y faisant couler son sang.

1° Vous êtes le fruit d’un sang divin. Sans doute, vous êtes filles d’Eve, mais voyez ce que le sang d’un Dieu fait pour vous. Le sang de notre divin Maître me semble être représenté dans l’Apocalypse par cette mer de cristal(3), que saint Jean vit devant le trône de Dieu. Les vierges vont laver et blanchir leurs robes dans le sang de l’Agneau(4). Evidemment ce sang divin est transformé et il transforme ceux qui vont s’y plonger. Tout en vous doit être pur, blanchi, éclatant, sans la moindre souillure.

2° Vous êtes le fruit d’un sang divin, et c’est pour cela que tout doit porter le cachet de votre origine surnaturelle: c’est le sang de Jésus-Christ versé sur la croix. Vous aussi vous avez été enfantées dans la douleur, et c’est dans la douleur, la pénitence, la souffrance que vous pouvez conserver vos merveilleux privilèges. Ne vous y trompez pas. Si les épines de la mortification ne vous environnent pas, votre trésor vous sera enlevé. Il n’y a point de virginité sans combat livré avec les armes de la pénitence.

Mais en même temps ce sang divin vous transforme, fait de vous de toutes nouvelles créatures. Vous n’avez qu’à être attentives à ce travail intérieur. Jésus vous ayant rendues vierges par son sang, son sang coule plus à l’aise dans vos veines par la communion. Il faut donc prendre la vie nouvelle que ce sang vous apporte, et, puisque les Livres Saints disent que le sang c’est la vie(5), il faut qu’en participant plus parfaitement à la vertu du sang de Jésus-Christ, vous soyez plus divines en quelque sorte, que tout en vous soit divin: vos pensées, vos paroles, votre être tout entier.

3° Vous êtes le fruit le plus excellent du sang de Jésus-Christ. Le Saint-Esprit nous le dit par saint Paul, celui qui est vierge peut mieux s’occuper des choses de Dieu(6), et, par conséquent, l’aimer davantage. La chasteté est donc le couronnement de la charité et la condition de la perfection dernière. Rendez-vous donc compte de ce que vous devez offrir à Dieu, pour arriver à tout ce qu’il attend de vous. Non, vous ne devez plus être de la terre, vous devez être toutes du ciel. Dieu vous veut toutes pour lui. Ce qu’il y a de plus excellent ne lui appartient-il pas, à cause de son excellence même? Donc, mes chères filles, que votre virginité, arrosée sans cesse par le sang de Notre-Seigneur, se développe et grandisse pour lui. Ne craignez pas de faire tous les sacrifices pour la conserver et l’accroître. Jésus-Christ vous a assez donné de sa substance, afin de pouvoir poser sur vous la couronne des vierges et des épouses de Dieu, pour que vous aussi vous donniez quelque chose, pour que vous donniez tout.

Le sang de Jésus-Christ! Voilà encore votre force, si vous venez à faiblir; voilà le bain, où il faut aller vous plonger à la moindre souillure contractée, à la moindre tache faite à votre robe nuptiale. Ah! mes filles, embrassez la croix de toute la puissance de votre amour, et qu’unies sur cet arbre mystérieux à votre époux, vous y receviez, avec l’intelligence des dons qu’il veut vous faire, la grâce de les faire grandir jusqu’au jour où vous ne serez plus qu’un avec lui pour l’éternité.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Za 9,17.
2. Ap 14,4.
3. Ap 15,2.
4. Ap 7,14.
5. Lv 17,14.
6. 1 Co 7,32.