Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.555

Mon cher ami,

Sachons prendre notre parti et allons où Dieu nous appelle. Dieu vous veut à Rethel(2). Remontez-vous peu à peu sur votre bête et allez(3). Croyez-moi, il faut lutter, beaucoup lutter, énormément lutter. Cette condition de notre vie, Dieu la bénit, quand on fait bon marché de sa personne. Croyez-moi, mettez-vous tout à l’oeuvre, non pas pourtant de façon à altérer votre santé.

Procurez-nous donc des novices, demandez-en à Notre-Seigneur. Le noviciat est ouvert, et réellement il me semble qu’il serait en bonne voie, si nous y avions du monde. Rien de nouveau, sinon que je tiens à ce que la maison aille et que ma fermeté étonne à Nîmes, comme la vôtre à Sedan(4). Ne nous tracassons pas, et portons le poids de nos petites épreuves. Dieu est là pour nous en récompenser.

Tout vôtre, cher enfant, en Notre-Seigneur. E. D’ALZON.

Je voudrais bien avoir le cérémonial. On va nous annoncer dans *l’Almanach du clergé, sous le titre des Augustins de l’Assomption.

E.D'ALZON

3. Recevant la même formule d'encouragement, le P. Laurent répondait, non sans humour: "J'y suis remonté déjà, mais la bête est fatiguée, et il n'y a personne pour la stimuler. Il n'y aurait que moi, mais, comme je suis la bête, je ne puis me frapper. Allez dire à un âne de se fouetter lui-même, il vous écoutera! Le meilleur moyen pour le faire marcher, c'est de le laisser reprendre des forces, et pour cela, il faut ou le décharger, ou le remplacer par un autre, si toutefois il s'en trouve". (Lettre du 5 janvier 1852).1. La date est donnée par le cachet postal, à Nîmes.
2. Dans sa lettre du 29 octobre, le P. Picard avouait au P. d'Alzon un moment de découragement:"j'ai bien besoin que vous me grondiez, car, pour la première fois peut-être, j'hésite à me mettre de tout coeur à la besogne qui m'est confiée. [...] Peut-être mes anciennes occupations me plaisaient-elles trop et avaient-elles pour moi trop de charmes". -Le 6 novembre, le P. Picard s'est repris: "Le bon Dieu me veut à Rethel, puisque vous m'y avez mis, et je ne demande nullement à faire autre chose. [...] Les peines que nous rencontrerons ici nous attacheront à la maison, et nous en aurons de toutes parts: les maîtres ne seront pas la plus légère partie de notre croix; l'archevêché ne l'allègera pas beaucoup; gare si les élèves s'en mêlent!"' Et il annonce qu'il cherche un remplaçant pour le maître d'études "déjà coulé, et par sa faute; il eût pu bien faire, mais il se conduit comme un écolier".
3. Recevant la même formule d'encouragement, le P. Laurent répondait, non sans humour: "J'y suis remonté déjà, mais la bête est fatiguée, et il n'y a personne pour la stimuler. Il n'y aurait que moi, mais, comme je suis la bête, je ne puis me frapper. Allez dire à un âne de se fouetter lui-même, il vous écoutera! Le meilleur moyen pour le faire marcher, c'est de le laisser reprendre des forces, et pour cela, il faut ou le décharger, ou le remplacer par un autre, si toutefois il s'en trouve". (Lettre du 5 janvier 1852).
4. Le ms porte *Sedan*; sans doute faut-il lire *Rethel*.