Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.562

20 nov 1858 Nîmes. PICARD François aa

Il vient d’écrire une lettre très forte au P. Cusse et désire être tenu au courant. -Il envisage de prendre, pendant l’office du matin les robes blanches.

Informations générales
  • T2-562
  • 1144
  • Touveneraud, LETTRES, Tome 2, p.562
  • Orig.ms. ACR, AE 25; D'A., T.D. 25, n. 64, p. 57.
Informations détaillées
  • 1 BONTE
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 COUTUMIER
    1 DEPARTS DE RELIGIEUX
    1 EVECHES
    1 HABIT RELIGIEUX
    1 IMAGINATION
    1 NOVICIAT DES ASSOMPTIONNISTES
    1 OFFICE DIVIN
    1 ORDINATIONS
    1 ORGUEIL
    2 CUSSE, RENE
    2 GALABERT, VICTORIN
    2 MILLERET, MARIE-EUGENIE
    2 PERNET, ETIENNE
    3 CLICHY-LA-GARENNE
    3 NIMES
    3 PARIS
    3 RETHEL
    3 ROME
  • AU PERE FRANCOIS PICARD
  • PICARD François aa
  • le 20 nov[embre] 1858.
  • 20 nov 1858
  • Nîmes.
  • Evêché de Nîmes
La lettre

Cher ami,

La tête chante à Cusse. Il m’écrit pour être relevé de ses voeux. Je le laisse libre, mais je lui écris une lettre très forte. Je lui parle de son orgueil et de son imagination. Je lui déclare qu’il ne sera jamais admis dans le diocèse de Nîmes, et que rien ne jettera, pour aller ailleurs, un mauvais vernis sur lui comme de quitter la Congrégation, deux mois après avoir été ordonné(1). Toutefois, s’il change d’avis, je tiens à lui faire sentir ce qui me mécontente en lui depuis très longtemps. Soyez donc bon avec lui, mais pas trop bon, et tenez-moi au courant de ce qu’il fera.

Quant aux robes blanches, vous savez bien que nous les avons(2). Seulement, le froid de ces temps derniers nous a inspiré de les prendre pendant l’office du matin. Un essai me semble une chose utile, et je crois que nous nous en trouverons bien, comme ici on se trouve à merveille de l’office à 4 h. 20.

Adieu, cher ami. Tout à vous. Estime et confiance(3).

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Nous n'avons pas les lettres échangées entre le P. Cusse et le P. d'Alzon, auxquelles il est fait allusion dans ce passage. Le 19 novembre, le P. Picard écrivait à propos de la santé du P. Cusse: "Il crache le sang très fort depuis quatre ou cinq jours; les brouillards et le mauvais temps de cette semaine l'avaient mis dans un état nerveux dont vous connaissez sans doute les effets, sans que je vous en parle". Le 21 novembre, le P. Picard écrit de nouveau: "Le P. Cusse paraît plus calme; il est tout bouleversé depuis l'arrivée de votre lettre ce matin. Je croyais l'orage dissipé avec les brouillards de l'atmosphère retheloise; mais il s'est subitement reformé. P. Cusse ne me dit rien sur lui, je ne puis par conséquent faire que des conjectures, dont je n'ai pas à vous parler, puisque vous connaissez la réalité".
2. Rappelons que le P. d'Alzon, au moment de la fondation de l'Assomption, avait voulu familiariser les élèves au costume religieux, en revêtant lui-même une robe blanche, la nuit, dans les dortoirs. Le 8 novembre, le P. Galabert écrivait au P. Picard:"J'oubliais de vous parler de la grande nouvelle du jour: le P. d'Alzon a décidé que la soutane blanche serait le costume de choeur à l'office du matin. Le nouveau costume sera inauguré le 1er dimanche de l'avent; certaines âmes charitables se chargent de pourvoir aux frais occasionnés par cette innovation. On la gardera aussi dans l'intérieur de sa cellule, mais il sera défendu de sortir avec pendant le jour".
Informé de cette "grande nouvelle", le P. Picard manifestait au P. d'Alzon son point de vue, le 14 novembre: "Je n'ose rien dire au sujet de l'habit, mais je ne sais s'il ne vaudrait pas mieux déterminer quelque chose, y réfléchir plus longtemps, s'il le faut, et prendre une décision définitive; le changement d'un provisoire en un autre provisoire me fait peur. D'ailleurs nous ne pourrons pas participer au privilège, si on ne peut pas porter l'habit dans les cours. La Noël ne serait-il pas préférable au 1er dimanche de l'avent pour cette prise d'habit? C'est le jour des premières prises d'habit et des premières professions. Ne pourrait-on pas garder l'habit blanc pour la messe et les offices sans la permission du Souverain Pontife? Je ne sais que dire à ce sujet, mais je trouve préférable de réfléchir au costume définitif que nous devrions prendre, et puis faire tout d'un coup le changement complet".
Le 11 novembre, le P. Pernet avait écrit au P. d'Alzon: "P. Galabert annonce au P. Picard que vous introduisez *pour l'intérieur seulement* le costume blanc. Veuillez, mon Père, ne pas songer à nous l'imposer encore ici. Nous sommes obligés de sortir si souvent de nos *chambres-cellules*, qu'il nous serait impossible de trouver dans la journée du temps suffisamment pour nous habiller et nous déshabiller.
De Nîmes, le P. Galabert écrira de nouveau, le 5 décembre, au P. Picard:"L'étoffe pour les soutanes blanches est toujours attendue; l'inauguration par conséquent est renvoyée aux calendes grecques. Je serais d'avis qu'on les réservât pour les religieux profès;, les novices continueraient à assister à l'office de nuit avec le manteau. Ce serait une distinction, et en second lieu, une économie, -question importante avec notre pauvreté. Le Père est indécis. Si vous partagiez mon opinion, vous pourriez lui en dire un mot".
3. Le 20 novembre, jour de son arrivée à Nîmes, Mère M.-Eugénie écrivait au P. Picard: "Je suis effrayée de la nouvelle que le P. d'Alzon vient de me donner de Rethel: le P. Cusse pense à vous quitter! C'est un de ces orages qu'il faut conjurer au moins jusqu'à la fin de l'année où alors le prétexte de sa santé peut servir à le renvoyer à Clichy. Or, je meurs de peur d'être une cause de ses ennuis. Je crains que le petit cérémonial qu'on réclame pour donner l'habit au novice de Nîmes ne m'ait été donné pour nous servir à arranger notre propre cérémonial. Dès mon retour à Paris, je chercherai ce cahier et je l'enverrai [...] Le P. Cusse aurait dit au P. d'Alzon que, depuis qu'il était à Rethel, on lui aurait fait vingt fois plus d'observations sur son enseignement qu'il n'en avait reçu dans toute sa vie. Si vous avez fait cela, *in hoc non laudo*; mais, tout en corrigeant, restez ouvert, aimable, ne vous raidissez pas et ne vous fermez pas pour n'avoir pas comme à l'Assomption tout votre franc-parler".
Parlant ensuite de Nîmes, elle écrit encore: "Le P. d'Alzon est bien portant et assez content, même très content, à part cette affaire du P. Cusse. Il trouve son noviciat très bien réglé; leur petite maison est fermée sous clef; ils ont un réfectoire à part, une vie très séparée du collège[...]Le P. Galabert réussit très bien: il enseigne la théologie aux jeunes et l'apprend en même temps. Il n'ira pas à Rome cet hiver. Le P. d'Alzon veut conserver le noviciat sur le pied où il est et qu'il trouve excellent; il vit beaucoup avec eux et en paraît, je le répète, heureux et content. Le collège aussi le satisfait et lui paraît second relever".