TEXTES AYANT TRAIT AU COLLEGE DE NIMES|RAPPORTS

Informations générales
  • TD 7.255
  • TEXTES AYANT TRAIT AU COLLEGE DE NIMES|RAPPORTS
  • RAPPORT SUR L'ETAT RELIGIEUX ET MORAL DE LA MAISON.
  • Rapport de M. l'Abbé d'Alzon sur l'état religieux et moral de la maison pendant l'année 1845-46. (Dans: Institution de l'Assomption, fondé à Nîmes par M. d'Alzon et M. Goubier. Nîmes, Imprimerie Veuve Gaude, 1846, p. 21-35).
  • DU 8; TD 7, P. 255
Informations détaillées
  • 1 COLLEGE DE NIMES
    1 CONSCIENCE MORALE
    1 DEVOTION A LA SAINTE VIERGE
    1 EDUCATION
    1 EDUCATION EN FAMILLE
    1 EDUCATION RELIGIEUSE
    1 ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE
    1 ESPRIT CHRETIEN DE L'ENSEIGNEMENT
    1 FOI
    1 FORMATION DES JEUNES AUX VERTUS
    1 FRANCHISE
    1 INSTRUCTION RELIGIEUSE
    1 MAITRES
    1 ORGANISATION SCOLAIRE
    1 PARENTS D'ELEVES
    1 PIETE
    1 RAPPORTS ANNUELS
    1 REPRESSION DES DEFAUTS DES JEUNES
    1 VACANCES
    1 VIE SCOLAIRE
    2 ANNAT, BENJAMIN
    2 BARAGNON, PIERRE
    2 CABRIERES, ANATOLE DE
    2 DAMIAN, HENRI
    2 FOURNERY, LOUIS
    2 GALERAN, DIEUDONNE
    2 GALERAN, HENRI
    2 GAUDE, VEUVE
    2 GENSOUL, HENRI
    2 GOUBIER, VITAL-GUSTAVE
    2 GUYOT, AMEDEE
    2 PICARD, FRANCOIS
    2 PLACIDE, HENRI
    2 SALTET, LEON
    2 TRINQUIER, LOUIS
    2 VILLEMAIN, ABEL-FRANCOIS
  • 4 août 1846.
  • Nîmes
La lettre

On vient de vous dire quelque chose des idées communiquées par nous à vos enfants. Ces derniers conseils que vous avez écoutés avec intérêt, j’en suis sûr, nous les répétons sous toutes les formes. Quel en a été le résultat? Quels fruits nous a donnés cette semence jetée pendant l’année qui finit? C’est ce que je veux constater devant vous, dans cet exposé rapide de l’état religieux et moral de la Maison. Trop souvent des rapports de cette nature sont de purs panégyriques; je veux que celui-ci soit une véritable confession.

Ce sera, à mon gré, le plus sûr moyen de vous faire connaître dans quel esprit vos enfants sont conduits, esprit de franchise et de confiance, qui ne tait ni le bien ni le mal. A quoi serviraient, en effet, des illusions que quelques jours d’expérience viendraient bientôt détruire? Nous aimons mieux que, frappés de notre sévérité, les parents s’étonnent, s’ils le jugent à propos, de voir signaler des défauts là où leur indulgente tendresse admire peut-être des qualités. Quoi qu’il en soit, résolus, comme nous le sommes, à ne rien déguiser, nous ne vous demandons que d’être bien convaincus d’une chose: c’est qu’ici on ne cherche à découvrir la plaie que pour y porter le remède, et que nous avons en horreur cette fausse sécurité qui croit pouvoir s’endormir tranquille, parce qu’elle a dit: Tout est bien.

Dans cette maison, tout n’est pas encore bien; soit parce que l’expérience nous découvre quelquefois des abus que nous n’avions pas su prévoir; soit parce que nous avons à lutter long-temps contre des habitudes de paresse, de caprice, de légèreté, contractées ailleurs, ou parce que des parents, peu intelligents des vrais intérêts de leurs fils, ne nous secondent pas toujours d’une manière assez énergique; soit enfin, parce que le titre d’élève de l’Assomption n’implique pas du premier coup un brevet de sainteté ou de génie.

Non, tout ici n’est pas encore bien, mais pourtant tout s’élève chaque jour vers un degré supérieur de perfectionnement. S’il y a de constants efforts de la part des maîtres, il y en a aussi de la part des élèves; et c’est une justice à leur rendre, que le plus grand nombre nous comprend et s’applique à nous rendre le travail facile.

Mais entrons dans quelques détails, et parlons d’abord de la situation religieuse de l’établissement.

L’état religieux d’une maison, se constate, ce me semble, en appréciant la foi, l’instruction, la piété des élèves qui la composent.

La foi, chez nos élèves, est, je ne crains pas de le dire, profonde. Ils la doivent, cette foi, non à nos soins, mais aux bienfaits de cette éducation donnée sur les genoux d’une mère chrétienne. Non, rien ne remplacera ces premières leçons et ces premières traces de l’exemple, gravées dans le souvenir des jeunes années! Et qu’il est, au contraire, mal aisé, lorsque nous avons tout a faire, de communiquer à ces coeurs déjà flétris, à ces intelligences déjà faussées, un développement convenable des vérités révélées et des sentiments surnaturels! L’enfant qu’une surveillance active n’a pas entouré dès le berceau, reçoit, comme à son insu les plus tristes empreintes; il devient grossier, menteur, indélicat, presque sans s’en douter; et ce qu’il y a de plus pénible, alors, dans notre tâche, c’est qu’il faut lui donner l’horreur du vice, sans lui laisser soupçonner la source d’où, trop souvent, il a coulé dans son âme.

Premier aveu:

Au commencement de l’année scolaire, on a entendu, dans la maison, quelques paroles indignes de jeunes chrétiens. L’exclusion des élèves, qui les avaient prononcées, a convaincu leurs camarades du respect que nous étions résolus à faire porter aux choses saintes. Et pourquoi refuser d’ajouter que quelques jeunes intelligences, ébranlées ou ignorantes, ont réfléchi et se sont, comme d’elles-mêmes, éclairées? Est-ce à dire qu’il y a eu des conversions, à proprement parler? Je ne le pense pas. Le travail s’est fait lentement: un jour, un préjugé, peu enraciné, grâces à Dieu, a disparu; un autre jour, une bonne pensée a été écoutée; on a été frappé, à la chapelle, d’une observation de M. l’Aumônier; en classe, une remarque jetée entre une leçon d’histoire et l’explication d’un texte, a porté je ne sais quelle lumière dans les ténèbres d’une objection qu’on croyait insoluble. Le bon exemple d’un camarade a touché, et nos jeunes docteurs (car ils n’étaient pas incrédules), se sont sentis, sans trop savoir comment, éclairés, émus, mécontents d’eux-mêmes, plus désireux d’être bons pour leurs condisciples, et plus empressés à satisfaire leurs maîtres et Dieu. La foi se raffermit bien vite, quand on est là; et nous l’affirmons, nos élèves les plus chancelants, s’il en est encore, en sont au moins arrivés là.

L’instruction religieuse se donne sous diverses formes. Tous les dimanches M. l’Aumônier parle, à la chapelle, aux élèves réunis. Le samedi après les litanies de la Sainte Vierge, chantées en commun, je donne quelques avis pratiques, dont le texte m’est fourni par les abus que j’ai cru remarquer, par les évènements un peu graves de l’intérieur de la maison. En outre, deux fois par semaine, les Elèves, classés en quatre sections, reçoivent des leçons proportionnées à leur âge et à leur capacité. Les sections les plus avancées font des analyses; on n’exige des plus jeunes que la lettre du catéchisme.

Ce cours nous paraît un des plus importants; c’est là que nous voudrions prémunir nos enfants contre les attaques qu’ils entendront un jour, et leur présenter ces considérations que le catholicisme seul fournit, et dont les conséquences fécondes pénètrent les replis les plus intimes de l’âme. Sans entrer ici dans le détail, ce que nous avons obtenu ne nous satisfait pas entièrement, surtout dans la première et la deuxième section. A-t-on toujours parlé aux élèves leur langage? Eux, de leur côté, ont-ils apporté toute l’attention nécessaire pour saisir des raisonnements d’une nature inévitablement sérieuse? Je ne sais; mais enfin Tout ce que je désirais n’a pas encore été atteint.

Et ce sera notre deuxième aveu.

Citons pourtant les noms de MM. Gensoul (Henri), -de Cabrières (Anatole), -Baragnon (Pierre), -Saltet (Léon), -Annat (Benjamin), qui, s’ils le veulent, peuvent devenir un jour forts en instruction religieuse.

Si l’on entend, par le mot piété, une collection de petites pratiques dont chacune, prise à part, est pourtant excellente, une aptitude aux scrupules, qui tient l’esprit en suspens sur le seuil de chaque démarche, comme sur le bord d’un abîme, une disposition à penser à Dieu pour ne point penser à son devoir, et à couvrir une intelligence paresseuse sous le manteau d’une dévotion tendre et sentimentale, nos élèves ne sont nullement pieux; ils ne le seront, je l’espère, jamais. Allons plus loin: même en entendant la piété dans son sens vrai et bon, tous les genres de piété ne nous paraissent pas convenir à tous. Aussi, ne cherchons nous pas à inspirer le goût des pratiques trop multipliées.

Le jeune chrétien qui entre dans la société ne doit y paraître qu’avec le bagage religieux qu’il pourra y conserver toujours. Nous ne nous proposons pas de faire des hommes de cloître, mais des hommes du monde, qui s’y posent de manière à faire aimer et respecter leur foi; qui tiennent, par le fond de leurs entrailles, à la cause de Dieu; qui saisissent ce qu’il y a de vrai, de fort, de puissant dans les prescriptions de l’Eglise; qui trouvent, dans l’énergie du sentiment religieux, un frein à leurs passions. En ce sens, nous prêchons de toutes nos forces la piété à nos enfants; mais, répétons-le, nous ne voulons pas faire des séminaristes. Pourquoi, dès-lors, les ployer à des habitudes, saintes en elles-mêmes, mais qui ne conviennent pas à la route que probablement ils auront un jour à parcourir? Certes, si parmi eux nous en découvrions quelqu’un que la voix de Dieu appelât à s’élever au-dessus des pensées de la terre, en qui la main de la Providence eût déposé le germe des saints dévoûments, ah! nous ne nous en cachons pas, ce serait pour nous un vrai bonheur de cultiver ces jeunes plantes pour parer un jour les autels des fleurs que leurs vertus promettent. Nous remercions Dieu tous les jours de nous avoir fait prêtre, et ce ne serait pas nous, parents chrétiens, qui écarterions du sanctuaire ceux de ces chers enfants dont le sacrifice vous serait demandé, et qui, par une sacrilège compassion pour vos alarmes, voudrions les priver du plus grand honneur dont il soit donné à l’homme d’être couronné ici bas. Mais, nous le savons aussi, bien des idées traversent des têtes de quinze ans, qui n’y font pas un long séjour; on bâtit vite des projets qu’on démolit plus vite encore. Nous savons ce qu’il faut accepter, ce qu’il faut examiner, ce qu’il faut laisser tomber de soi, et comment une pensée de ce genre prise au sérieux s’évanouit, par cela même que celui qui en reçoit la confidence ne la combat par aucune opposition. Nous savons enfin que cette maison, si elle doit se développer selon le but de ses fondateurs, est ouverte aux jeunes gens destinés à fournir toutes les carrières que le monde présente. Nous savons ce qu’un chrétien fortement préparé peut faire de bien à ses frères, quels services il peut rendre à la cause de la religion; et c’est en ce sens que nous dirigeons la piété de nos élèves. Avons-nous toujours réussi?

Troisième aveu: pas toujours.

A côté d’un grand nombre dont la piété franche, ouverte, part du coeur et se traduit par la pratique des sacrements, par un respect profond dans le lieu saint, par l’attention à fuir tout ce qui pourrait être affecté dans un sens ou dangereux dans un autre, nous avons eu, il faut l’avouer, de ces élèves trop peu préoccupés de ce qu’est Dieu et de ce qu’ils sont par rapport à lui; qui croient lui faire trop d’honneur en apportant une présence distraite aux exercices religieux, et qui semblent trop peu convaincus que le moyen de prouver leurs progrès dans la piété, c’est de triompher des défauts de leur caractère et de leurs habitudes de paresse, d’humeur ou d’insubordination. Que nous serions heureux, mères chrétiennes, si, pendant les vacances, vos sages avis, vos pieuses sollicitations pouvaient obtenir ce qui n’a pas été accordé à nos efforts! Vous pouvez beaucoup, vous le savez, et vous savez aussi que cet empire qui vous échappe avec les années et à mesure que grandit dans vos fils l’amour de l’indépendance, ne vous est assuré qu’autant que vous aurez fixé leur coeur autour de vous, par la puissance des liens religieux.

Quant à l’état moral de l’établissement, nous croyons que, pour s’en faire une juste idée, on doit étudier le travail et la conduite des élèves. On vous a dit ce que devrait être le travail parmi eux; le tableau serait moins brillant peut-être, si je vous disais ce qu’il a été; peut-être éprouveriez-vous quelque peine, si, à côté d’élèves comme MM. Gensoul (Henri), Picard (François), Guyot (Amédée), Galeran (Dieudonné), vous entendiez proclamer certains noms, que, dans nos ordres du jour, nous avons été obligés de classer dans les catégories inférieures. Je ne veux pas humilier certains fronts; mais probablement, l’année prochaine, après les noms des élèves qui recevront ici un témoignage public de notre satisfaction, paraîtra la liste de ceux qui nous auront le plus mécontentés. Si nous gardons, cette année, le silence à leur égard, c’est qu’ils auraient quelque raison de se plaindre d’un châtiment dont ils n’avaient pas été prévenus.

La Maison est repartie, pour les récréations et les études, en quatre divisions; la quatrième est formée de tous les élèves au-dessous de 10 ans; la seconde comprend les internes et les demi-pensionnaires de 10 ans à 15; la première, les élèves les plus âgés; enfin la troisième est composée exclusivement d’externes.

Le programme des prix donnera le nom de ceux qui, dans les diverses classes, se sont le plus distingués par le succès de leur travail. Ici je ne veux parler que des efforts tentés par les Elèves indépendamment de leur capacité; et je veux comparer ces efforts avec leur conduite.

Le premier rang pour la conduite et pour le travail appartient à la Troisième Division, tout entière composée d’externes. Comment expliquer ce fait, en opposition avec ce que l’on observe partout ailleurs? Le petit nombre des élèves peut être un des principaux motifs: moins nombreux, ils sont plus facilement surveillés. Ensuite nos externes nous appartiennent de plus près et plus complètement qu’on ne pourrait le croire: excepté le repas de midi, pour lequel on leur donne une heure, ils demeurent dans la maison aussi long-temps que les demi-pensionnaires. Puis, il faut le dire, ce qui fait la gloire de cette division, ce sont quelques élèves qui comprennent ce que nous voudrions faire bien comprendre de tous, le prix de l’étude. Ils savent que, par le travail, ils sont les maîtres de leur avenir; et ils s’y sont livrés avec cette tenacité qui triomphe de tous les dégoûts, et surmonte toutes les difficultés.

Que ces élèves reçoivent ici le témoignage solennel de leur supériorité, et qu’ils continuent à donner l’exemple de cette application persévérante qui ne recule devant aucun obstacle, et de cette conduite inflexiblement bonne, dont la régularité ne cède à aucun entraînement. Nous proclamerons leurs noms avec bonheur. Ce sont: MM. Galeran (Henri), Picard (François), Damian (Henri), Trinquier (Louis).

La Première Division occupe le second rang pour le travail et la conduite. Ici une observation se présente. Ne sont-ce pas les élèves les plus âgés, qui sont ordinairement le plus difficiles à conduire? Pourquoi ce succès incontestable des élèves de la Première Division, c’est-à-dire des plus grands? Chose étonnante! Cette division, composée, au commencement de l’année, d’éléments qui ont pu un instant nous alarmer, s’est constamment améliorée par un progrès soutenu. C’est elle, surtout, qui nous a réjouis par ces changements en bien, qui donnaient a nos efforts une si douce récompense. Lui ôterai-je de son mérite, en ajoutant que plusieurs exclusions ont dû la convaincre de notre résolution inébranlable à trancher les abus dans leur racine?

En signalant les heureux résultats obtenus dans la Première Division, pourrions-nous oublier, parce qu’il n’est plus là, celui à qui nous les devons en partie? Son zèle pour le bien, ses efforts pour l’obtenir, sa piété si vive, son commerce si agréable, cette fascination qu’il exerçait sur plusieurs, tout nous le rendait cher! et quelques instants ont suffi pour nous l’enlever! Cette fin si soudaine d’un jeune maître(1), froudroyé à la fleur de l’âge, laissera des traces profondes chez tous ceux qui le connurent; et, par son souvenir, il sera, j’en suis sûr, même après sa mort, une sauve-garde contre les tentations et les dangers des vacances.

Il y a, dit-on, un âge disgracieux pour les enfants. Presque tous les Elèves de la Seconde Division sont probablement à cet âge. Toujours est-il que c’est d’eux que nous sommes le plus mécontents, et pour le travail et pour la conduite. Qu’ils se hâtent donc de traverser cette époque de crise, et de laisser à d’autres la triste mission de grossir les listes de punition et de peupler la salle de retenue. Ce blâme public ne s’adresse à personne en particulier; mais il atteindra, je l’espère, la conscience d’un certain nombre d’Elèves, qui n’ont voulu comprendre ni les réprimandes les plus sévères, ni les plus affectueuses exhortations. Nous devons cependant faire une exception en faveur de l’Elève Placide (Henri), qui, seul, s’est fait remarquer par sa bonne conduite et son application; son nom va figurer sur la liste d’honneur.

Enfin, nous dirons un mot de cette chère petite Quatrième Division, que son travail et sa conduite auraient dû placer après la Première, malgré ses mutineries et sa jeune paresse. Quand on n’a pas sept ans, il est bien permis d’avoir quelques caprices. Là pourtant, on voit des efforts qui seront un jour plus heureux parce qu’ils seront plus constants; là sévères trouve un grand zèle en projets, et ces petits amours propres qui sévères gonflent comme des ballons, ces essais de mensonge trahis par un front qui rougit encore, ces boutades dont on n’a pas calculé la portée, ces accès d’une ferveur qui n’est pas même ferveur de novice.

Les Elèves de la Quatrième Division sont pour nous l’objet d’une sollicitude spéciale. Pour eux, le plan des études, en huitième et en septième, sera modifié considérablement par l’application d’une méthode que M. Villemain faisait couronner naguères à l’Académie française, et dont les résultats pratiques ont déjà été constatés par nous dans plusieurs Etablissements semblables au nôtre.

Nous voudrions aussi pouvoir annoncer un petit collège, c’est-à-dire une séparation à-peu-près complète des plus jeunes pour les dortoirs, les repas, les promenades et les récréations, un régime particulier, un règlement spécial. Espérons qu’une volonté forte et persévérante nous fournira les moyens d’atteindre un but que nous poursuivons depuis long-temps déjà.

Ma tâche est remplie.

L’extrême franchise qui a dicté ce rapport surprendra quelques personnes peut-être; elle plaira, j’en suis sûr, aux hommes religieux et intelligents qui y trouveront un motif d’avoir pleine et entière confiance dans nos appréciations. Car, si l’on entre dans notre pensée, si l’on considère le mobile de nos travaux, on comprendra que nous devons avant tout chercher à voir ce qui est, sans préjugé, sans illusion. Un mal signalé est à moitié guéri, lorsque, comme nous, on ne sévères dévoue à l’éducation que pour en faire disparaître les abus. La foi et la conscience sont nos guides; elles nous imposent la vérité. Nous la devons aux parents, qui nous confient ce qu’ils ont de plus cher; nous leur devons l’exposition fidèle de nos succès, de nos mécomptes. A quoi bon les bercer d’espérances qui ne sévères réaliseraient pas? La sincérité implique toujours, ce me semble, si elle est comprise, un certain respect qui honore celui qui le rend comme celui qui le reçoit.

Et pourtant, nous le déclarons, ce que nous n’avons pas obtenu n’est pas capable de nous décourager. Malgré les teintes parfois un peu sombres de ces détails, l’année qui finit a été l’une des plus belles, la plus belle peut-être de notre vie. Porter dans son âme le sentiment d’un grand devoir auquel on sévères dévoue; être entouré de collègues dont le coeur bat à l’unisson du nôtre, et dont le zèle, ne reculant devant aucune fatigue, apporte chaque jour le tribut d’un succès obtenu sur des obstacles de tout genre; voir s’effacer peu-à-peu, chez la plupart des membres d’une si nombreuse famille, des défauts que remplacent déjà quelques naissantes qualités, et des vertus près d’éclore; comprendre qu’on peut mériter un jour la reconnaissance des familles, préparer des hommes dignes de la patrie qui les attend, former des chrétiens intelligents et décidés à défendre la cause de l’Eglise, comme elle veut être aujourd’hui défendue; -n’est-ce pas assez pour dédommager des mille peines qui semblent barrer le passage à toute oeuvre sainte et féconde pour l’avenir?

Aussi, Chers Enfants, -et ce seront nos adieux, -s’il me reste une impression de cette année passée avec vous, c’est que je vous appartiens tout entier. Ce qu’il y a de bon dans vos coeurs, et même vos défauts que nous voulons extirper ensemble, m’attache plus que jamais au bien que je veux vous faire. Le bonheur que j’ai trouvé dans nos rapports de tous les jours, je vous le demanderai long-temps.

Vous allez jouir d’un repos mérité; faites des provisions de force et de courage; réchauffez au foyer paternel cet amour de la famille qui, fécondé par une pensée de foi, vous soutiendra au milieu des épreuves longues encore de votre éducation commencée, et vous préparera pour ces travaux plus sérieux que la société réclamera plus tard de vous, et dont vos études ici auront été l’heureux apprentissage.

La rentrée des Classes pour l’année 1846-47 aura lieu du 13 au 15 octobre. La Messe du Saint-Esprit sera célébrée le 15. Le même jour et les deux jours suivants auront lieu des Compositions doubles comptant pour les prix d’Excellence.

M. l'Abbé d'Alzon, Directeur.
Notes et post-scriptum
1. M. Louis Fournéry, Maître-Surveillant, enlevé, en quelques heures, à l'affection de ses collègues et des Elèves, dans la nuit du samedi au dimanche 20 juillet 1846.