ARTICLES

Informations générales
  • TD 6.227
  • ARTICLES
  • AVENIR DE L'ENSEIGNEMENT CHRETIEN.
    DEUXIEME ARTICLE
  • Revue de l'Enseignement chrétien, N. S., VIII, n° 46, février 1875, p. 289-295.
  • TD 6, P. 227.
Informations détaillées
  • 1 ACTES PONTIFICAUX
    1 ASSOCIATION
    1 BACCALAUREAT
    1 BRANCHES DE L'ENSEIGNEMENT
    1 CAUSE DE L'EGLISE
    1 CHEFS D'ETABLISSEMENT
    1 CLASSES SUPERIEURES
    1 COMITES CATHOLIQUES
    1 CONCILE DU VATICAN
    1 CONGRES CATHOLIQUES
    1 CONGRES DE L'ENSEIGNEMENT LIBRE
    1 DOCTRINES ROMAINES
    1 ELECTION
    1 ENGAGEMENT POLITIQUE
    1 ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE
    1 ENSEIGNEMENT OFFICIEL
    1 ENSEIGNEMENT RELIGIEUX
    1 ENSEIGNEMENT SECONDAIRE
    1 ENSEIGNEMENT SUPERIEUR
    1 EVEQUE ORDINAIRE DU DIOCESE
    1 EXAMENS SCOLAIRES
    1 GOUVERNEMENT
    1 INFAILLIBILITE PONTIFICALE
    1 JURYS SCOLAIRES
    1 LAICAT
    1 LEGISLATION
    1 LIBERTE DE L'ENSEIGNEMENT
    1 LYCEES
    1 MAITRES CHRETIENS
    1 MONOPOLE UNIVERSITAIRE
    1 NOTRE-DAME DE SALUT
    1 OEUVRES OUVRIERES
    1 PAPE DOCTEUR
    1 PARENTS D'ELEVES
    1 PARLEMENT
    1 PRIERE DE DEMANDE
    1 PROGRAMME SCOLAIRE
    1 REVOLUTIONNAIRES ADVERSAIRES
    1 SAINT-ESPRIT
    1 UNITE CATHOLIQUE
    1 UNIVERSITES CATHOLIQUES
    2 CAIPHE
    3 AIX-EN-PROVENCE
    3 LILLE
    3 MONTPELLIER
  • février 1875.
  • Nîmes
La lettre

Je voudrais aujourd’hui parler de l’organisation à donner à mes (=nos) efforts pour obtenir le meilleure loi possible sur l’Enseignement supérieure et en tirer le plus avantageux parti.

Mais, à mesure que je cherche à combiner les idées diverses qui se présentent à moi, bien des difficultés se présentent aussi. Où sera le noyau autour duquel se grouperont pour agir de concert les forces agglomérées des divers points de la France?

Reprenant ce qui a été dit dans notre premier article, nous conjurons, de la manière la plus instante, les chefs d’établissements chrétiens, auxquels notre Revue parvient, de nous dire s’ils pensent qu’une vaste association, basée sur les principes du Syllabus et les décrets du dernier Concile, n’est pas aujourd’hui plus que jamais nécessaire. Si nous recevions un certain nombre d’adhésions, nous pourrions aviser aux moyens de préparer un congrès d’enseignement chrétien, afin de mettre en commun un plus grand nombre de lumières et arriver à des résultats positifs; là s’élaborerait la future organisation dont nous ne pouvons tracer ici que quelques linéaments.

On peut proposer sur le champ un but à notre action. Ne serait-il pas utile que tous les chefs d’enseignement secondaire donnassent leur adhésion à une pétition qu’il serait indispensable d’adresser au plus tôt aux membres de l’Assemblée nationale et qui serait conçue en ces termes:

« Messieurs les Députés,

« Les Directeurs des Etablissements catholiques d’instruction chrétienne, viennent vous demander la liberté des programmes des baccalauréats.

« Leur demande est basée sur plusieurs motifs, dont ils se contentent d’indiquer les deux principaux:

« 1° L’impossibilité où des maîtres chrétiens se trouvent de donner à leurs élèves l’enseignement religieux convenable. En effet, il est impossible, dans l’état actuel des idées qui président aux examens du baccalauréat, de mettre dans les programmes quoi que ce soit qui ait trait à un enseignement religieux positif, et les élèves qui aspirent à être reçus aux examens sont, en quelque sorte, forcés de laisser de côté, pendant les deux ou trois dernières années de leurs études classiques, tout développement des matières religieuses qu’on leur enseigne, et que, malgré eux, ils négligent, pour préparer leur succès devant les examinateurs universitaires. Nous demandons le droit de faire entrer l’instruction religieuse dans le programme du baccalauréat, tel que nous l’entendons.

« 2° Le désir de relever sérieusement le niveau des études. Un des derniers ministres de l’instruction publique se plaignait, il y a trois ou quatre ans au plus de ce que dans les lycées on apprenait fort mal le français, très-peu de latin et presque pas de grec. Les chefs de la science formulent les mêmes plaintes pour d’autres branches de l’enseignement.

« Ne nous occupant que des maisons dont la responsabilité nous regarde, accordez-nous de pouvoir adopter des plans d’études moins funestes que ceux que nous impose la suprématie de l’Etat avec ses programmes. De l’aveu des hommes compétents dans l’Université, on ne peut guère avoir pire; nous vous supplions de permettre que nous essayions, à nos risques et périls, d’obtenir mieux. -Pour cela il nous faut: 1° la possibilité de présenter nos élèves devant des hommes qui acceptent de les examiner selon les idées religieuses que nous nous efforçons de leur donner; 2° la liberté de former nos élèves d’après des méthodes moins défectueuses que celles de l’Université; il faut des jurys indépendants, pris dans des Universités catholiques comme celles qui ne manqueront pas de surgir, dès que vous leur en aurez donné la permission (1) ».

Il n’est pas nécessaire que les signatures soient nombreuses; il suffit de celles des Chefs d’établissements chrétiens. Evidemment, ils ont derrière eux tous les pères de famille qui leur ont donné cette grande marque de confiance de leur conduire leurs enfants. Ceci crée une force morale dont il faudra bien un jour tenir compte. Nous avons peut-être eu le tort de ne pas comprendre assez tôt quelle puissance serait à notre disposition, quand nous nous résoudrions à agir avec ensemble. Mais le sentiment de cette puissance nouvelle qui nous appartient apparaît chaque jour; il s’agit de ne pas le laisser s’énerver.

J’ai parlé de la prière. Déjà l’Association de Notre-Dame du Salut a bien voulu nous prêter main-forte. Cette oeuvre admirable, dont le but est de faire prier pour l’Eglise et la France et de favoriser l’établissement d’oeuvres ouvrières, demande à ses Associés, tous les jours plus nombreux, de réciter, jusqu’au vote de la loi sur l’Enseignement supérieur, un Veni Creator et une invocation à la Sainte Vierge, pour nos législateurs(2). Quelques-uns, peut-être, n’en voudront pas; mais peu importe; le Saint- Esprit a dit: Per me reges regnant, et legum latores justa decernunt. Le Saint-Esprit fait souvent prophétiser les gens malgré eux. Voyez Caïphe:Hoc autem a semetipso non dixit, sed cum esset pontifex anni illius.

Et le Sanhédrin vota la mort de Jésus-Christ, qui fut un grand crime, mais qui fut en même temps le salut du monde, ce qui ne s’applique pas, évidemment, à nos Députés chrétiens. Eux savent ce qu’ils feront, et ils nous donneront une excellente loi, sous l’inspiration que nous demandons pour eux.

N’avons-nous pas, pour tout dire, quelques reproches à nous adresser au point de vue de l’influence que nous pourrions exercer si nous le voulions? Il ne s’agit pas, bien entendu, de faire de la politique, mais bien de la religion au plus haut point. Puisque d’un côté la question religieuse dépend de nos législateurs, pourquoi ne pas leur demander de voter pour la liberté de l’enseignement? Pourquoi ne pas créer un courant à cet égard dans les élections partielles qui ont lieu sur tous les points de la France? Y a-t-il un seul département qui n’ait un grand, un petit séminaire, un établissement chrétien d’instruction? Quand les directeurs de ces maisons demanderont par leurs élèves à leurs parents de voter pour la cause de l’Eglise, quoi de plus légitime? Ah! je sais bien qu’il est plus commode de profiter de certaine bénéfices sans avoir couru le moindre danger, la moindre gêne pour les conquérir. Il y aura toujours et partout des Ratons pour tirer les marrons du feu et des Bertrand pour les croquer. En ce moment surtout, honte aux Bertrand! Du reste, le péril est petit, et, tout bien considéré, peut-être est-il plus sûr d’agir que de rester les bras croisés.

Et pourtant, dans la question même qui nous occupe, je vois une preuve évidente que, quand les catholiques veulent, ils finissent par obtenir quelque chose. Le résumé des voeux présentés à l’Assemblée générale par les Comités catholiques pour 1874 porte ces mots: Nécessité pour les comités catholiques de se préoccuper des moyens de favoriser la création d’universités catholiques et d’agir auprès de leurs députés pour obtenir la mise à l’ordre du jour de la loi. Or la loi a été mise à l’ordre du jour, une Université catholique a commencé à Lille, on nous parle d’en établir une autre à Aix. Les deux extrémités de la France auraient donc l’honneur d’inaugurer la fondation d’institutions aujourd’hui si nécessaires. Et pour moi je suis profondément convaincu que bien des obstacles s’aplaniront, le jour où les catholiques se décideront non pas à fonder, mais à demander qu’on leur fonde des Universités catholiques. A eux de fournir les fonds, à s’occuper de la partie matérielle, côté important, très-important, mais non le plus indispensable.

En effet, à qui appartient la création de ce mot Université? Aux Papes qui les ont instituées. Que les catholiques s’adressent à leurs évêques, les conjurent de s’entendre pour solliciter de Rome une Bulle d’institution pour une Université catholique, et on verra si un souffle puissant ne vivifiera pas ces oeuvres destinées à un si grand avenir. Peut-être dans la manière dont on a procédé, les laïcs, assurément avec les plus pures intentions, se sont-ils trop préoccupés d’une action nécessaire sans doute de leur part, mais qui ne doit pas être exclusive, tant s’en faut. Ils doivent agir, mais par-dessus tout sous la direction des évêques, autorisés dans la fondation des Universités par le Docteur suprême, et si quelques-uns ont osé dire qu’il était inopportun de définir l’infaillibilité du Pape, évidemment tout le monde voit aujourd’hui combien, cette infaillibilité proclamée, il est opportun que les Papes, par les Universités, ressuscitent dans le haut enseignement les principes vrais, et s’emparent, par elles, de la direction des idées dans les classes supérieures du monde social.

L’organisation serait-elle donc bien vite établie, si les catholiques n’avaient qu’à dire à leurs évêques et au Souverain-Pontife: Agissez? Non, une trop grande déférence pourrait se tourner en insouciance. Au Souverain-Pontife, aux Evêques, leurs droits qu’on ne saurait trop proclamer; mais le suprême Pontificat, mais l’Episcopat veulent laisser aux fidèles une indispensable action, et c’est pour cela que je me demande si des congrès régionaux, comme ceux qui ont eu lieu déjà sur plusieurs points de la France, à Montpellier tout récemment, ne doivent pas se multiplier partout, en dehors de la prochaine assemblée générale des Comités catholiques. Un congrès de l’enseignement chrétien ne serait-il pas très-utile, à un moment où la loi de l’enseignement supérieur sera probablement votée et où il sera extrêmement important de voir comment en tirer le meilleur parti? Des réunions, fussent-elles peu nombreuses, et où seraient uniquement convoqués des catholiques dévoués aux doctrines du dernier Concile, auraient les plus grands avantages et nous provoquons les conseils de nos amis sur ce point très-grave.

N’oublions pas que si les catholiques ne s’organisent pas, les révolutionnaires eux s’organisent. La ligue de l’enseignement ressuscite, nous disent les journaux, elle prend une nouvelle impulsion avec le concours bienveillant de certaines autorités préfectorales et universitaires. Nous ne croyons pas à de pareilles assertions, mais on a osé les imprimer. Quoi qu’il en soit, il y a au moins recrudescence d’audace. Resterons-nous les bras croisés?

Je n’ai voulu que planter des jalons et je consens bien volontiers à ce que la route à suivre soit tracée par d’autres plus habiles que moi. Il y a tant à faire! Raison de plus pour se hâter de faire quelque chose. J’ai préféré me contenter de poser quelques questions, mais ce ne sont pas les seules à étudier, aussi je conjure les chefs d’établissement qui comprennent la gravité des circonstances de vouloir bien nous donner le concours de leurs lumières. Evidemment il y a une position à prendre, dès que la loi de l’enseignement supérieur sera votée. Il n’est pas nécessaire que nous connaissions tous les détails de cette loi, nos fers seront au moins quelque peu relâchés. Voyons par exemple quels programmes nous pourrions réclamer pour les baccalauréats; nous serons à temps de supprimer ce qu’il nous sera interdit de par l’Assemblée nationale d’y introduire. Sur ce sujet capital, il est indispensable de s’entendre et les méditations combinées de plusieurs ne seront pas de trop.

E. D'ALZON, des Augustins de l'Assomption
Notes et post-scriptum
1. Des exemplaires de cette pétition sont à la disposition des chefs d'institutions qui désireraient la signer. - S'adresser au bureau de la *Revue*.
2. Voici la note que publie à ce sujet *le Pèlerin* organe de l'Association de Notre-Dame de Salut:
Le Directeur de l'Association a reçu la lettre suivante:
"Puisque PIE IX invite les fidèles à réclamer la liberté de l'enseignement supérieur, non comme un principe, mais comme une nécessité, n'importe-t-il pas de redoubler d'efforts pour la réclamer d'une façon absolument catholique? Or, je ne sais pas de moyen plus catholique que la prière. Pourquoi, au moment où la loi sur la liberté de l'enseignement supérieur va passer en seconde lecture, des prières ne s'élèveraient-elles pas de tous les points de la France chrétienne pour demander au Saint-Esprit de diriger les travaux de nos législateurs? Qui n'est pas intéressé à cette loi? Les chefs d'établissements chrétiens qui voient l'instruction religieuse paralysée dans les petits séminaires et les collèges de plein exercice, à l'aide du programme du baccalauréat; les élèves eux-mêmes, qui, sans le soupçonner, seront plus tard les victimes d'une instruction religieuse insuffisante, ou d'un enseignement trop souvent perverti par des professeurs de droit ou de médecine; les mères chrétiennes qui contemplent avec terreur, au terme des études, la foi de leurs enfants compromise par de funestes négations de la vérité surnaturelle tombées de lèvres qu'on dit savantes; tous ceux, en un mot, qui ont quelque souci que la France ne devienne pas révolutionnaire en devenant athée.
"Il faudrait donc pousser à la prière. J'ose demander au Bureau de N.-D. de Salut d'inviter tous ses amis à réciter tous les jours, jusqu'au vote définitif de la loi sur l'enseignement supérieur, un *Veni Creator* pour que Dieu inspire à nos députés de donner à la France la meilleure loi sur cette question vitale; on pourrait ajouter encore l'invocation: *Notre-Dame de Salut, priez pour eux*.
"N.-D. de Salut, qui n'est pas un pèlerinage, est pourtant une très-puissante protectrice, et, à nos yeux, c'est par elle que le salut de la France peut être accordée."
Le Conseil général de l'Association de N.-D. de Salut accueille avec empressement le projet que veut bien lui proposer le T. R. P. d'Alzon, et il invite tous les membres de l'oeuvre à s'y associer. Ne nous contentons pas de réciter les prières indiquées; cherchons des adhérents autour de nous, et répandons partout cette pieuse pensée.
Pour tous les renseignements, s'adresser au Bureau de N.-D. de Salut, 8, rue François 1er, Paris.