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Informations générales
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  • QUELQUES LIGNES SUR M. PUAUX
  • Revue Catholique du Languedoc, I, octobre 1859, p. 254-256.
  • CP 20
Informations détaillées
  • 1 CARACTERES DE L'EGLISE
    1 DIVINITE DE JESUS-CHRIST
    1 MINISTRES PROTESTANTS
    1 POLEMIQUE
    1 PROTESTANTISME
    1 PROTESTANTISME ADVERSAIRE
    1 SALUT DES AMES
    1 UNITE DE L'EGLISE
    2 CALVIN, JEAN
    2 GABEREL, PASTEUR
    2 GAUTRELET, FRANCOIS-XAVIER
    2 PIERRE, SAINT
    2 PLANTIER, CLAUDE-HENRI
    2 PUAUX, FRANCOIS
    2 PUJOL, DAMASE
    2 SERVET, MICHEL
    3 DIVONNE-LES-BAINS
    3 GENEVE
    3 NIMES
  • octobre 1859.
  • Nîmes
La lettre

Un pasteur protestant vient de saisir la plume que quelques- uns de ses collègues, il paraît, avaient été jugés trop faibles pour manier contre Mgr l’Evêque de Nîmes. M. Puaux paraît sur la scène.

Qu’est-ce que M. Puaux? Si nous écoutons M. Gaberel, pasteur génevois: C’est une plume aigrie, qui vient raviver des exagérations et des inexactitudes, un auteur qui tient décidément à prouver que MM. les ministres de Genève sont de véritables mécréans, dignes de la plus profonde pitié , et que toute la liberté religieuse de la vieille cité de Calvin se résume dans une incrédulité profonde« . (Le Lien, 25 Juillet 1859). -Si M. Puaux a été invité par ses frères à soutenir le combat, il est clair qu’il ne l’a pas été par tous ses frères.

Quoique sa brochure porte le titre de Vraie Question, il n’y reste pas plus que ses devanciers.

Nos frères séparés ayant jugé à propos de célébrer l’anniversaire du Synode de 1559, la question qu’il fallait leur faire, pour leur montrer qu’ils avaient tort d’exhumer un pareil souvenir, était bien celle-ci: Le Synode de 1559 ne fut-il pas une inconséquence? La célébration de l’anniversaire de ce Synode n’en est-elle pas une autre? Evidemment, cela saute aux yeux. -M. Puaux trouve que la vraie question est: Les protestants ont-ils des raisons suffisantes de se faire catholiques? Ce qui n’est pas tout- à-fait la même chose. Il est facile de voir que les arguments, valables pour la première thèse, peuvent s’appliquer moins directement à la seconde; et que des preuves, péremptoires pour une proposition particulière, ont besoin d’une autre espèce de développements, quand on les applique à une question générale.

On comprend, du reste, que M. Puaux ait quelque intérêt à franchir les limites d’une controverse insoutenable pour lui, et dont, en effet, il ne dit pas un mot. Il reproche à l’adversaire qu’il prend à partie de se permettre des passes d’armes(1). Voudrait-il bien nous dire comment nous devons qualifier son procédé, et comment les hommes sérieux le qualifieront?

Monseigneur l’Evêque de Nîmes examinera, dans sa sagesse, s’il doit suivre son adversaire sur ce champ nouveau, et s’il doit accepter la proposition d’un colloque public. Quant à nous, si nous consultions des témoins impartiaux d’une conférence tenue, il y a quatre ans, à Divonne, près de Genève, nous pencherions peu volontiers pour une controverse qui aurait probablement le même résultat: celui de voir de respectables ministres, après avoir été battus sur le terrain le plus défavorable aux catholiques, refuser le combat, auquel pourtant ils s’étaient engagés par avance, quand les catholiques, à leur tour, réclamèrent le droit de choisir leur champ clos.

D’ailleurs, M. Puaux oublie que, par le fait, le colloque a eu lieu. N’a-t-il pas, il y a quelques années, publié sa brochure: Rome a-t-elle les qualités de la véritable Eglise? Son attaque n’a-t-elle pas été suivie d’une première réponse intitulée: Des caractères du Protestantisme, par M. Damase Pujol? Le R. P. Gautrelet ne l’a-t-il pas victorieusement réfuté, dans son livre sur la Divinité de l’Eglise catholique? Depuis l’époque où ont paru ces ouvrages, qu’a fait M. Puaux? A-t-il fourni la moindre réplique? -Il a continué à publier, avec d’autres titres, les mêmes paradoxes péremptoirement réfutés. Il est facile, en effet, d’entasser, en quelques lignes, des masses d’inexactitudes, pour employer le style de M. le pasteur Gaberel, que l’on ne peut redresser que par de longues dissertations. Et c’est ce qui nous explique le goût de M. Puaux pour les feuilles volantes(2). Après tout, les dissertations existent; et pourquoi, avant de nous proposer son colloque, M. Puaux ne prendrait-il pas la peine de nous donner son avis sur leur valeur?

Quelles que soient les intentions de Mgr l’Evêque, nous nous permettrons aujourd’hui de diviser la question posée par M. Puaux; et laissant de côté toutes les récriminations sur les faits, nous dirons hardiment, sans examiner si les protestants doivent se faire catholiques, qu’ils ne peuvent plus rester protestants sans être, aux yeux les uns des autres, ou idolâtres ou impies.

Nous prouvons notre thèse.

C’est une impiété de refuser à Dieu l’adoration qui lui est due.

C’est une idolâtrie d’adorer comme Dieu un être qui ne l’est pas.

N’est-il pas vrai qu’aux yeux des anciens protestants Jésus- Christ est Dieu, et que Calvin fit brûler Servet pour avoir nié la divinité du Sauveur? Plusieurs, probablement, conservent encore cette portion de la foi de leurs pères.

N’est-il pas vrai que, aux yeux d’un très-grand nombre de réformés contemporains, la divinité de Jésus-Christ est plus que problématique?

Or, ne pas adorer Jésus-Christ, s’il est Dieu, c’est être impie.

L’adorer, s’il n’est pas Dieu, c’est être idolâtre.

Parmi les protestants, les uns l’adorent, les autres ne l’adorent pas.

Pour ceux qui l’adorent, ceux qui ne l’adorent pas sont impies.

Pour ceux qui ne l’adorent pas, ceux qui l’adorent sont idolâtres.

Que penser d’une Religion dont les partisans sont obligés de s’envoyer réciproquement la qualification d’idolâtrie ou d’impiété; à moins que la tolérance moderne ne doive aller jusqu’à l’indifférence par rapport au premier, au plus impérieux, et au plus exclusif des devoirs envers Dieu, l’adoration.

On comprend quel sentiment de convenance nous oblige à ne pas pousser plus avant notre examen et notre réponse.

C’est avec une profonde tristesse que nous traçons ces quelques lignes; car, du train dont va la Réforme, il est facile de prévoir où aboutiront les esprits. Ceux qui nient la divinité de Jésus-Christ continueront à la nier; ceux qui la proclament encore se sentiront chaque jour plus ébranlés dans leur foi. Les arguments de M. Puaux seront faibles contre MM. LES MINISTRES MECREANS DE GENEVE ET L’INCREDULITE DE LA VIEILLE CITE DE CALVIN (3). Une fatale unité se fera pour le protestantisme, dans cette négation universelle que le rationalisme a préparée depuis longtemps; et les catholiques, accusés depuis trois siècles de diminuer l’honneur dû au Sauveur du monde, resteront seuls pour lui dire, comme S. Pierre: Vous êtes le Christ, fils du Dieu vivant.

EMM. D'ALZON.
Notes et post-scriptum
1. Vraie question, p. 6.
2. Vraie question, p. 26.
3. Paroles de M. le pasteur Gaberel.