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Informations générales
  • TD 7.2
  • ARTICLES
  • MEMOIRES D'UN ANCIEN DE LA VIEILLE ASSOMPTION
    CHAPITRE PREMIER
  • L'Assomption, I, n° 1, 1 janvier 1875, p. 1-2.
  • TD 7, P. 2-4; CO 242.
Informations détaillées
  • 1 COLLEGE DE NIMES
    1 ESPRIT DE L'ASSOMPTION
    1 FONDATION DES CARMELITES DE NIMES
    1 JEUNESSE
    1 REFUGE LE
    1 VIEILLESSE
    2 SIBOUR, MARIE-DOMINIQUE
    2 THERESE, SAINTE
    3 AIX-EN-PROVENCE
    3 MOULINS
    3 NIMES
    3 ROME
  • 1 janvier 1875.
  • Nîmes
La lettre

CHAPITRE Ier. Si je prends la plume pour rappeler mes souvenirs, c’est que je vois tant de générations passer dans cette chère Assomption qu’il est à craindre de lui voir perdre son antique esprit. Il a oscillé quelquefois, mais comme les sapins battus par la tempête, après avoir penché leur tête en des sens divers, se hâtent de fixer leur cîme vers le ciel, je voudrais que notre vieil et si bon esprit d’autrefois, après ses épreuves, *tempora mea, comme dit Cicéron, revint à sa primitive direction.

Qui suis-je? Qu’est-ce que cela vous fait, ami lecteur? Pourvu que je vous intéresse en témoin fidèle! Croyez-vous que si je vous ennuie, il me plaise de vous voir bâiller à la seule vue de mon nom?

Je suis des vieux: que cela vous suffise pour comprendre que je sais des choses que vous ne savez pas. J’aime les jeunes, et, comme disait un grand-vicaire de Moulins je ne vois pas pourquoi un sot depuis cinquante ans serait préféré à quelqu’un qui n’a de l’esprit que depuis vingt-cinq. Du reste à l’Assomption, les vieux aiment les jeunes; les jeunes respectent les vieux; grande consolation pour les vieux qui peuvent être ennuyés d’être vieux, et pour les jeunes qui seront vieux à leur tour; dans tous les cas, méthode essentiellement antirévolutionnaire.

Quoi qu’il en soit, on prétend que le P. d’Alzon, venu au monde avec une légère dose d’originalité, avait eu l’idée, à son retour de Rome, où il avait été ordonné prêtre, de fonder à Nîmes deux oeuvres: un couvent de Carmélites et un Collège. -Point du tout: on lui confia les Dames de Miséricorde, et les mauvaises langues assurent lui avoir entendu dire que, s’il s’était douté qu’on l’affublerait un jour d’une pareille besogne, bien habile eût été qui lui aurait fait prendre la soutane. Le P. d’Alzon devait avoir mal dormi le jour où il se permit pareille impertinence.

Quant au Collège, on l’angaria à fonder un Refuge, qu’il dirigea pendant dix ans: après quoi, avec son inconstance bien connue, il songea à faire autre chose.

Toutefois, il n’était pas tellement inconstant qu’il n’eût toujours en tête les Carmélites. Profitant donc du sacre de Mgr Sibour, qui eut lieu à Aix en 1840, il alla trouver les Carmélites de cette ville et leur parla de son projet. Ces saintes filles acceptèrent avec enthousiasme. Il ne s’agissait que d’un local à trouver. Quant à l’argent, une demoiselle de Nîmes devait fournir 40,000 fr.; une demoiselle étrangère, 50,000 fr.: c’était assez beau. La nimoise ne put entrer: sa belle-soeur mourut en huit jours à la pensée de la voir derrière les grilles, et voilà la pauvre Carmélite manquée obligée de servir de mère à des enfants devenus orphelins, parce qu’elle avait voulu être fille de Ste Térèse! Cela semble curieux: pourtant, rien de plus vrai, et en attendant, 40,000 fr. faisaient défaut. Quant à l’étrangère, sa mère se hâta de l’enlever aux griffes du P. d’Alzon! Hélas! dix-huit ans après, le dit Père la revoyait; bien que mariée, elle lui déclarait qu’elle ne se sentait faite que pour être Carmélite. Très peu de jours après elle était morte, et c’est ainsi que les mamans font le malheur de leurs enfants en les empêchant de suivre leur vocation. Voilà la vérité!…

Mais quel rapport y a-t-il entre la fondation de l’Assomption et le futur couvent du Carmel? -Vous êtes bien pressé! Pour vous enseigner la patience, je ne vous le dirai qu’au chapitre deuxième.

UN ANCIEN.
Notes et post-scriptum