ARTICLES

Informations générales
  • TD 7.30
  • ARTICLES
  • QUELQUES VUES SUR LES ALUMNATS DE L'ASSOMPTION
  • L'Assomption, I, n° 20, 15 octobre 1875, p. 173-174.
  • TD 7, P. 30-34.
Informations détaillées
  • 1 ALUMNATS
    1 BACCALAUREAT
    1 CAUSE DE L'EGLISE
    1 DROITS DE DIEU
    1 EDUCATION
    1 ESPRIT CHRETIEN DE L'ENSEIGNEMENT
    1 ESPRIT SACERDOTAL
    1 FAUSSE SCIENCE
    1 FILS DE L'EGLISE
    1 LUTTE CONTRE LE MONDE
    1 LUTTE CONTRE SATAN
    1 MOEURS SACERDOTALES
    1 PUNITION DES ELEVES
    1 RECRUTEMENT SACERDOTAL
    1 RENVOI D'UN ELEVE
    1 VERTU DE FORCE
    1 VIE SPIRITUELLE
    1 ZELE APOSTOLIQUE
  • 15 octobre 1875.
  • Nîmes
La lettre

Bien que l’Assomption ait déjà publié quelques réflexions sur les alumnats fondés par elle, il me semble très utile d’en dire encore quelque chose. Je le dirai sans beaucoup d’ordre, mais je souhaite être persuasif. La question prend chaque jour des proportions plus grandes.

I. Que l’institution des alumnats soit une inspiration providentielle, le moyen d’en douter quand on songe à ses obscurs commencements et à ses progrès merveilleux! Qui parmi nous y songeait avant le Concile? Quelles ressources en hommes, en argent, en bâtiments avait-on? Rien, absolument rien. Pourtant peu à peu les hommes se trouvèrent, l’argent arriva, les enfants aussi. Les enfants, six le premier jour, bien vite réduits à deux, sont aujourd’hui une centaine; très peu donnent une pension insignifiante, le reste est fourni par la charité. Chaque jour des demandes nouvelles nous sont faites, on les repousse avec douleur, messis multa, operarii autem pauci. On aurait les enfants par milliers, mais les professeurs? Pauci, paucissimi.

II. Dieu nous préserve de vouloir critiquer d’autres méthodes d’éducation cléricale, d’autres modes d’enseignement chrétien. Nous demandons seulement la permission d’exposer notre méthode à nous, et d’en indiquer le motif.

Pour former des aspirants au sacerdoce, il faut, ce semble, communiquer une vie pleinement sacerdotale, pour cela leur donner les moeurs ecclésiastiques. Un grand évêque disait qu’il ne suffisait pas à un prêtre d’être homme de Dieu; il lui faut encore être homme d’Eglise. Il lui faut avoir les habitudes de l’Eglise, ses moeurs, ses vertus, jusqu’à ses joies et ses tristesses: il lui faut être imprégné des parfums du sanctuaire; et pour cela en avoir les pensés, les inspirations, la doctrine avec surabondance.

Tout donc doit être pour l’enfant qui aspire à franchir les degrés de l’autel, une leçon pleine de charme où se reflètent à chaque pas les mystères dont il sera un jour le dispensateur. Ceci dépend du maître, des instruments de science mis à la disposition du maître, de l’atmosphère morale où le prêtre futur et ses compagnons doivent respirer. Rien ne doit être factice ou de convention, tout doit y manifester les saintes réalités du but qu’on se propose.

L’influence ne doit pas être imposée, mais inspirée: chose difficile en face du grand nombre. C’est pourquoi on restreint le chiffre des alumnistes. On a besoin, pour les mouler, de la vie de famille; et trouvez-moi la vie de famille avec deux cents, cent et même cinquante élèves. Arrivés à plus de trente, il est à peu près impossible de n’avoir pas recours aux punitions. Or, dans la formation des âmes telle que nous la rêvons, les punitions sont exclues.

III. Or, comment s’y prendre pour ne pas punir? -1° Veiller très attentivement sur l’intelligence, la piété, le caractère des enfants reçus. -2° Leur faire subir des examens où l’on étudie moins leur science que leur capacité de savoir. -3° S’entourer de tous les renseignements que ne fournissent pas toujours d’une façon absolument sincère ceux à qui l’on croirait pouvoir les demander avec le plus de confiance. -4° Une fois entrés, établir un temps d’épreuves de trois à six mois. -5° Au bout de ce temps les déclarer définitivement admis ou les rendre à leurs familles, selon qu’on sera ou qu’on ne sera pas satisfait d’eux. -6° Faire subir de nombreux examens pendant l’alumnat de grammaire et renvoyer les paresseux, les incapables, les mauvais caractères. Je ne parle pas de mauvais sujets qui doivent disparaître impitoyablement, dès qu’on les aperçoit. -7° Faire subir une dernière et sévère épreuve avant de parvenir à l’alumnat d’humanités. On ne punit pas, on avertit; et si les avertissements répétés ne suffisent pas, on renvoie.

IV. On comprend qu’il y a deux méthodes de procéder dans les collèges, même chrétiens: ou multiplier indéfiniment les exclusions, ou garder les élèves qui ne sont pas trop mauvais dans l’espoir de les améliorer. Dans les alumnats on ne conserve que ce qu’il y a de meilleur, parce que l’institution n’est pas diocésaine. Elle ne se propose pas seulement de former des prêtres, mais de très bons prêtres. Nous avons le droit de prendre seulement qui nous voulons, avantage inappréciable et qui écarte toute apparence de blâme envers ceux qui sont obligés d’agir autrement.

V. Avant tout, nous tenons dans les alumnats à ne pas faire de bacheliers. Pourquoi? parce que pour pareille opération on a les collèges et que le baccalauréat est la ruine des vocations. La science enfle;, dit saint Paul, surtout celle de certains examens. On enfle des grenouilles qui n’ont rien de mieux à faire que de se désenfler, mais quant à former des jeunes gens instruits avec les procédés modernes: allons donc!

Je ne dis pas que plus tard on ne présente des bacheliers, mais si tard que ce n’est pas la peine d’en parler.

VI. Ce que nous voulons communiquer par dessus tout, c’est la vie, la vie divine. Je suis venu pour qu’ils aient la vie, disait Notre-Seigneur, et pour qu’ils l’aient plus abondante;. Nous voudrions faire couler le sang de Jésus- Christ avec la plus grande plénitude dans les âmes, et pour cela les préoccuper par-dessus tout de l’amour de Dieu, de son Fils, de la Sainte- Vierge, de l’Eglise, des Saints, en un mot, de cette grande cause où sont engagés les intérêts du Ciel contre ceux de l’Enfer. Ah! qui nous donnera de pétrir nos enfants pour en faire des guerriers contre Satan et le monde; des médecins pour les âmes blessées et malades; des amis des classes ouvrières, où l’on entasse aujourd’hui tant de haine contre tout ce qui est bon, juste, vrai; des docteurs en face de la science moderne; et en face des avilissements modernes, des caractères si fortement trempés qu’ils ne se contentent pas d’une vulgaire vertu, mais qu’ils aient la généreuse ambition de toutes les perfections pour eux et du prosélytisme pour les autres.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum