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Informations générales
  • TD 7.39
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  • UN SAINT PRETRE
    VIE DE M. L'ABBE BESSUN PAR M. L'ABBE BESSON, CHANOINE DE BESANÇON, PLUS TARD EVEQUE DE NIMES
  • L'Assomption, II, n° 34, 15 mai 1876, p. 75-76.
  • TD 7, P. 39-41.
Informations détaillées
  • 1 BON EXEMPLE
    1 CHATIMENT DU PECHE
    1 CLERGE
    1 DOUCEUR
    1 EDUCATION EN FAMILLE
    1 ENERGIE
    1 PERSECUTIONS
    1 PERSEVERANCE
    1 REVOLUTION DE 1789
    1 ZELE APOSTOLIQUE
    2 BERRY, DUC DE
    2 BESSON, LOUIS
    2 BUSSON, CLAUDE-IGNACE
    2 EVERLANGE, LEON D'
    3 HOLYROOD
  • 15 mai 1875.
  • Nîmes
La lettre

Les ravages de la Révolution ont eu cet avantage que bien des caractères s’y sont retrempés, comme si l’épreuve et la souffrance étaient une condition de la grandeur et de la beauté morale. Le clergé surtout, élevé comme à l’ombre de l’échafaud sur lequel montèrent tant de prêtres, victimes des fureurs d’alors, donnèrent (=donna) des exemples de vertus inconnus à des âges plus calmes. La tempête, en séparant du tronc de l’Eglise bien des fruits corrompus, lui permit de communiquer une sève plus forte à ceux qui résistèrent. Triste condition de la faiblesse humaine! Nous avons besoin d’être châtiés pour donner tout ce qu’on a le droit d’attendre de nous. Les exemples offerts par une génération de prêtres à peu près entièrement disparus aujourd’hui, sont une grande leçon. Nous en avons connu plusieurs. Leur première éducation n’eut peut-être pas toute la culture des formes modernes, mais ils avaient forgé eux- mêmes leurs âmes, et l’âme gagne toujours au travail qu’elle s’impose avec énergie.

On avait moins de prêtres alors, peut-être ces prêtres avaient- ils plus la trempe sacerdotale; on se demande comment ils ont pu suffire à tant de travaux. Le tableau que nous trace l’auteur de la vie de M. l’Abbé Busson, en est une preuve admirable. Cette enfance sainement pauvre, sous les yeux d’une mère d’une race vigoureuse et incomparablement chrétienne; ces études parcourues malgré tous les obstacles, ces relations avec des prêtres presque martyrs, ces souvenirs multipliés de la justice révolutionnaire, cette persécution devenue hypocrite quand elle ne peut plus être violente, cette protestation permanente dans le calme, dans l’absence de ressources humaines et dans le travail, ces inspections policières qu’on ne bravait pas, mais qu’on ne redoutait pas non plus, cette puissance morale d’autant plus indomptée qu’elle était plus maîtresse d’elle-même en face de vexations de toute sorte; c’est certes un spectacle digne d’être étudié de nos jours, surtout quand on songe qu’il fut donné, il y a peu d’années, et lorsqu’il est exposé avec tant de vérité, par une plume aussi habile qu’émue.

La vie de M. l’abbé Busson fut mélée à bien des événements: professeur de théologie au séminaire des Missions étrangères, vicaire-général de la grande aumônerie, appelé auprès de la fille du duc de Berry dans l’exil d’holy-Rood, accusé d’opinions trop modérées, refusant quatre évêchés et d’autres positions humainement dignes de flatter l’amour- propre, il ne voulut s’occuper que d’oeuvres obscures, mais auxquelles il donna l’éclat de son zèle et de son intelligence. Il fut, à proprement parler, le fondateur de l’oeuvre des domestiques que, sur son exemple, M. l’abbé Léon d’Everlange établit plus tard parmi nous. La filiale affection de ces excellentes filles se traduisait par tous les moyens, nous n’en citerons qu’un: M. Busson se rendait chaque jour à l’Eglise vers quatre heures du matin, pour que ses enfants pussent se confesser sans que le service de leurs maîtres en souffrit; or, quand il avait neigé, le saint prêtre trouvait toujours balayées les rues qui séparaient sa maison de la paroisse où il exerçait son ministère. On dit que les serviteurs manquent de coeur aujourd’hui; ne peut-on pas dire, après un trait pareil, que les maîtres ne savent plus leur en donner?

L’énergie, la douceur, l’amour de l’étude, le zèle des âmes, la constance au milieu des temps difficiles, sont les principaux traits de cette belle vie. Tout chrétien y trouvera grand profit. Les prêtres y rencontreront des leçons pratiques qui réveilleront leur ardeur sacerdotale, et leur apprendront comment les temps difficiles sont les plus propres à faire éclater les vertus qu’un clame trop long aurait peut=-être endormies.

Si Dieu veut nous réveiller, sachons combattre; après tout, Jésus-Christ n’est pas venu porter la paix, mais la guerre. Ayons confiance, le monde finit toujours par être vaincu.

E. D'ALZON.
Notes et post-scriptum