ARTICLES

Informations générales
  • TD 7.42
  • ARTICLES
  • REPONSE DU T. R. P. D'ALZON
  • L'Assomption, II, n° 45, 1 novembre 1876, p. 166-167.
  • TD 7, P. 42-46
Informations détaillées
  • 1 APOSTOLAT
    1 APOSTOLAT DE LA CHARITE
    1 APOSTOLAT DE LA VERITE
    1 BANQUET ANNUEL DES ANCIENS ELEVES
    1 CHATIMENT DU PECHE
    1 CLERGE
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 COMBATS DE L'EGLISE
    1 DOCTRINE CATHOLIQUE
    1 DONNEES DE LA FOI
    1 ESPRIT DE L'ASSOMPTION
    1 EVEQUE
    1 FECONDITE APOSTOLIQUE
    1 INSTITUTS RELIGIEUX
    1 PERSECUTIONS
    1 REVOLUTION ADVERSAIRE
    1 REVOLUTION DE 1789
    1 TRAVAIL DE L'ETUDE
    1 TRIOMPHE DE L'EGLISE
    2 CHARLEMAGNE
    2 CHARLES MARTEL
    2 CLOVIS
    2 LOUIS, SAINT
    2 LOUIS XVI
    2 LUTHER, MARTIN
    2 MADELEINE-SOPHIE BARAT, SAINTE
    2 PIE IV
    2 PIE, LOUIS
    2 REMI, SAINT
    3 AFRIQUE
    3 ANGLETERRE
    3 BELGIQUE
    3 ESPAGNE
    3 FRANCE
    3 GRECE
    3 ITALIE
    3 JOIGNY
    3 PRUSSE
    3 RUSSIE
    3 SEDAN
  • 24 octobre 1876.
  • Nîmes
La lettre

Messieurs,

Après deux ans d’absence bien involontaire, je vous remercie de m’entourer comme vous le faites et je vous remercie également de vos voeux. Le cercle groupé aujourd’hui dans cette salle est restreint, je ne dis pas qu’il n’en est que mieux choisi, je dis qu’en regrettant certaines absences j’aime à les croire imposées par la nécessité plus forte quelquefois que les meilleurs désirs, et j’espère que l’an prochain le nombre des Anciens Elèves présents nous prouvera que si plusieurs sont éloignés aujourd’hui, c’est qu’ils étaient retenus par des devoirs qu’ils ne pouvaient mettre en ligne avec la joie de venir se serrer la main.

Permettrez-moi, Messieurs, de porter à mon tour un toast. Je bois à l’avenir des principes de l’Assomption. Ces principes sont bien simples, vous le savez; ils se réduisent au Credo et au Pater auxquels, selon les circonstances, l’Eglise donne ses infaillibles commentaires. Rien de plus vaste; ils expliquent tout le passé et vont du jour présent à l’éternité tout entière. Ces principes sont de la plus étonnante fécondité, parce qu’ils ont une souplesse divine. Mais pour leur faire produire selon les temps et les lieux, il faut les mûrir par de fortes études, il faut voir leur opposition radicale avec les erreurs modernes, il faut connaître le bien pour l’opposer au mal, le vrai pour l’opposer au faux. Etudiez, messieurs, ces questions immenses dont le Pater et le Credo sont les imperceptibles et fécondes semences: étudiez la vérité, source de la liberté telle que le Fils de Dieu l’a apportée sur la terre; étudiez avec hardiesse les conséquences de ces principes, vous serez surpris de voir comme ils répondent à tous les problèmes posés de nos jours.

Mais allez plus loin; jetez les yeux sur l’avenir. Il est bien sombre, direz-vous, bien chargé de vapeurs, et au delà, d’épaisses ténèbres. A vous de porter la lumière dans ces abîmes de la nuit. Mais comment!

Qui de vous n’a lu la belle homélie de Mgr de Poitiers pour la fête de Saint-Remy, ce puissant apôtre de la France à son berceau? Qui de vous n’y a admiré ce travail de régénération par lequel les évêques, bien plus que les rois, firent de la France le plus beau royaume de ce monde. Eh bien! à ce moment où la France venait de naître par le baptême de son premier roi chrétien, que voyait-on? D’affreuses invasions, les pays occupés aujourd’hui par la Russie et la Prusse lançant leurs hordes sur le vieux monde pour le châtier de ses crimes, de ses orgies, du sang des martyrs répandu, de l’obstination de l’esprit humain à aller du paganisme à l’incrédulité; partout des villes incendiées, des massacres, des ruines en France, en Espagne, en Grèce, en Italie, les plages africaines subissaient le joug des Vandales, Constantinople celui des Goths. Les grands évêques donnaient d’inutiles avertissements; les désastres continuaient.

Et pourtant un monde nouveau allait apparaître: après Clovis, Charles Martel et Charlemagne; après Charlemagne, S. Louis.

Ainsi de nos jours, spectacle semblable, sinon le même. Où est le monde tel qu’il était à l’apparition de Luther? La Terreur nous répond et depuis le 21 janvier si la Révolution n’a pas tranché, comme pour Louis XVI, les têtes de rois, c’est qu’elle a vu qu’il suffisait de renverser d’un coup de pied leurs trônes vermoulus; nous en avons vu tomber, nous en verrons bien d’autres, le monde va à une immense débâcle dont nos principes ont seuls le dernier mot.

Le monde irait à la mort, si nos principes ne possédaient pas le grand remède de l’avenir. Oui, si le mal est grand, nos principes en sont le remède.

Voyez ce qui s’accomplit, il y a bientôt un siècle, les églises sont fermées, les prêtres dépouillés, chassés, tués, massacrés, toute insulte est bonne contre eux et contre le Souverain-Pontife.

Mais vous n’avez peut-être pas suffisamment étudié le travail de recomposition qui commence aussitôt. Je laisse à quelques années de là, l’épiscopat rétabli, le clergé appelé à rouvrir les temples, le culte payé maigrement, mais enfin entretenu tant bien que mal; je voudrais vous montrer ce travail de germination de tant d’oeuvres, qui a rappelé les Frères des Ecoles chrétiennes, les Trappistes, les Jésuites; qui a nécessité tant de vaillantes congrégations de femmes destinées à tant de dévouements. Comment se fait-il que les Filles de S. Vincent de Paul soient vingt mille? qu’en Belgique, les ordres religieux comptent plus de sujets qu’avant 89? Comment la fille d’un pauvre vigneron de Joigny, créée supérieure malgré elle à 23 ans, a-t-elle pu fonder plus de cent maisons et les peupler de plus de quatre mille religieuses? J’ai nommé Madame Barrat, fondatrice du Sacré-Coeur. Prenez les conférences de Saint-Vincent-de- Paul, où ne s’étendent-elles pas? Et cette vaste association de la jeunesse italienne que nous devrions bien imiter, quel n’est pas son courage? Quel souffle a fait surgir les pèlerinages. Quels actes de foi que ces manifestations, élevant, ce qui, disait-on, n’était plus dans nos moeurs, à l’état d’institution. La France a commencé, l’Angleterre, la Belgique, l’Italie ont suivi; l’Espagne, dans ses nobles souffrances, vient à son tour, et pour son coup d’essai, envoie aux pieds de Pie IX huit mille de ses enfants.

Parlerai-je de l’enseignement? La vérité et le mensonge, l’affirmation divine et la plus complète négation satanique, se sont donné rende-vous sur ce terrain; qui l’emportera? les catholiques, si l’on en juge à leurs progrès lents, et la révolution, si l’on regarde ses fureurs. Le dernier mot nous appartient, Messieurs, si nous avons le courage de faire tous les sacrifices voulus.

Et le clergé, messieurs, n’y a-t-il rien à faire? je dirai tout: il y a vingt ans, on chercha plus que jamais à le séduire; hélas; si on cherchait à acheter des prêtres pour en faire des évêques de cour, des évêques pour en faire des chefs d’Eglise nationale, c’est qu’on savait qu’il y en avait à vendre. A ce point de vue, Sédan, la grande humiliation de la France, à été le douloureux, mais nécessaire affranchissement de l’Eglise.

Eh bien, aujourd’hui, vous avez beaucoup à faire au nom de vos principes, Messieurs, vous avez à défendre la grande cause de la société, de la papauté, de l’Eglise, vous avez à vous emparer de toutes les armes honnêtes, vous avez, à en forger de nouvelles. Vous avez à donner, à agir, à combattre; à donner de vos bourses, si vous ne voulez pas qu’on vole vos fortunes;. à agir dans les oeuvres pour affirmer le bien; à combattre dans la grande bataille engagée pour repousser l’ennemi, et cela au nom des principes que vous avez reçus ici. Votre devoir sera de les défendre, votre douleur de les voir par moments ébranlés, votre honneur de les faire triompher.

AUX PRINCIPES DE L’ASSOMPTION!! (1).

Notes et post-scriptum
1. Ce discours prononcé par le P. d'Alzon le 24 octobre 1876 au banquet des anciens élèves du collège, en réponse à un toast de l'abbé Bruguière, fut publié également par le bulletin de l'A.A.E.A., p.8-10, Nîmes, décembre 1876.