ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES

Informations générales
  • TD 8.70
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  • PATRONAGE DE SAINT JOSEPH
  • Le Pèlerin, N. S., II, n° 71, 11 mai 1878, p. 306-307.
  • TD 8, P. 70.
Informations détaillées
  • 1 BIEN SUPREME
    1 CONNAISSANCE DE SOI
    1 EPREUVES DE L'EGLISE
    1 ESPERANCE
    1 FOI
    1 FRANCHEMENT CATHOLIQUES
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 MARIE
    1 MATERIALISME
    1 ORGUEIL
    1 OUVRIER
    1 PAGANISME
    1 PELERINAGES
    1 PEUPLES DU MONDE
    1 PRESENTATION AU TEMPLE
    1 PROLETARIAT
    1 REVOLUTION
    1 TRAVAIL
    1 UNION A JESUS-CHRIST
    1 VERTUS
    1 VERTUS DE JESUS-CHRIST
    1 VIE CACHEE DE JESUS-CHRIST
    1 VIE DE SILENCE
    2 HERODE I LE GRAND
    2 JACOB
    2 JOSEPH, BIBLE
    2 JOSEPH, SAINT
    2 PHILIPPE, SAINT
    2 PIE IX
    3 BABEL
    3 EGYPTE
    3 JERUSALEM
    3 NAZARETH
    3 OSSA
    3 PARIS, CHAMP DE MARS
    3 PARIS, TROCADERO
    3 PELION
    3 SENNAAR
  • 11 mai 1878.
  • Paris
La lettre

On se demande pourquoi Pie IX a déclaré saint Joseph patron de l’Eglise universelle? Pour plusieurs motifs, font nous voulons indiquer quelques-uns.

De tout temps, saint Joseph a été reconnu pour protecteur des âmes intérieures. Son silence, sa profonde obéissance, l’intimité de sa vie avec Jésus à Nazareth, lui ont attiré des trésors de grâces secrètes, qu’il est facile de deviner, tout en respectant le mystère de ses communications célestes. Il a reçu le plus précieux de tous les dépôts, Jésus et Marie, sur la terre, et l’a gardé avec fidélité. Il est mort entre les bras du Sauveur et de la plus pure des créatures, dont il avait été le chaste époux et le serviteur. Quelle gloire d’autant plus resplendissante au ciel qu’elle avait été plus obscure ici-bas! Quel dédain de la renommée, de l’éclat! Quelle application à son oeuvre unique, parmi celles confiées aux enfants des hommes! Joseph a vécu pauvre, caché, mais il a nourri Jésus, l’a écouté, a vécu de ses instructions, de ses enseignements, de ses exemples, de ses vertus. A lui, dans le silence de l’oraison, de venir en aide aux âmes de choix qui préfèrent les discours et la vérité de Dieu, dans le silence, aux conversations menteuses des hommes, dans le bruit et dans le tumulte. Ah! quel modèle, aujourd’hui surtout que l’amour de la solitude est un vain mot, et que l’on semble avoir tellement peur de se voir, de se regarder dans ses faiblesses et ses vices, qu’on préfère toute distraction à la torture de se contempler. Prions pour obtenir et la force de nous connaître et la force de nous corriger de nos défauts, et celle surtout d’aimer la solitude nécessaire à la vie intérieure, telle que Dieu nous la demande selon notre position.

II. Saint Joseph, à proprement parler, a été le premier pèlerin de la loi nouvelle. On avait sous la loi ancienne les pèlerinages au Temple, et, au quarantième jour de la naissance du divin Enfant, Joseph et Marie en firent un pour faire accomplir dans ce temple figuratif les prescriptions de la loi par celui qui était le terme de la loi. Là nous pouvons voir comme un mélange, où, si l’on aime mieux, l’anneau qui relie les pèlerinages de la loi ancienne avec les pèlerinages de la loi nouvelle. Mais nous avons un pèlerinage tout nouveau, la fuite en Egypte et le retour à Jérusalem. Qu’est-ce qu’un pèlerinage? Un voyage de piété dans un but saint. La fuite en Egypte eut pour but, en mettant Jésus-Christ à l’abri d’Hérode, de sanctifier les futurs pèlerinages des apôtres et cette Egypte dont le paganisme antique avait inventé de si absurdes divinités. Au milieu du culte public rendu à Osiris, au boeuf Apis, aux chiens, aux chats et aux légumes que je ne veux pas nommer, Jésus, petit enfant inconnu, portait son innocence, sa pauvreté, sa bénignité, et Joseph était le chef de la sainte caravane. Oh! messieurs les directeurs de pèlerinage, quelle dévotion ne devez-vous pas avoir pour saint Joseph, le premier des directeurs sous la loi de grâce d’une oeuvre semblable aux vôtres! Et vous, pieux pèlerins, quels modèles, quand vous vous laissez mener, quels modèles ne trouvez-vous pas en Jésus et Marie se laissant conduire par un homme qui ne les consultait jamais, parlait peu et faisait beaucoup.

Après cela il faut bien dire que saint Joseph était un très grand saint. Et telle est peut-être une des raisons prophétiques, qui ont porté Pie IX à proclamer saint Joseph patron de l’Eglise, à une époque où les pèlerinages allaient fournir les moyens de faire de magnifiques actes publics de foi catholique.

III. Le terme du pèlerinage conduit par saint Joseph fut Nazareth, le pays des travaux du charpentier. Quel est un des plus grands problèmes du jour? N’est-ce pas celui du travail? Cette Exposition titanesque, au sens satanique du mot, qui est pour plusieurs un défi de la matière jeté à l’esprit de Dieu, où l’on entasse Pélion sur Ossa pour escalader le ciel, avec des machines, des concerts, des pagodes chinoises, des maisons russes; ces prolétaires venus de tous les pays pour construire la Babel du Trocadéro, non loin du Sennaux du Champ de Mars; ces canons perfectionnés pour mieux se tuer entre nations devenues soeurs, au nom de la fraternité; ces vins d’honneur offerts avec pompe, quand le phyloxera ne nous laissera bientôt plus une vigne sur pied; ces murmures montant toujours de je ne sais quelles couches et de je ne sais quels bas-fonds; ces aspirations à tous les renversements et à tous les abîmes…, qu’est-ce que c’est pour résoudre ce qu’on appelle le problème du travail, en face de l’atelier de Nazareth, de la hache et de la scie de Joseph? Ah! qui nous rendra ces ouvriers honnêtes et contents ici-bas, parce que, comme Joseph, ils se contentent de peu et ont des espérances éternelles? Allons à Nazareth, conduisons-y le plus grand nombre d’ouvriers, et apprenons- leur que le bonheur ne consiste pas à satisfaire les appétits de la chair, mais à les dompter, parce que le bonheur n’est pas du temps, mais de la vie éternelle, à condition que l’on croira à la providence de Dieu, à l’immortalité de l’âme et au salut des hommes par celui qui passa pour le fils du saint ouvrier Joseph.

IV. Mais le plus grand motif d’invoquer saint Joseph, comme patron de l’Eglise universelle, c’est qu’il fut le père nourricier de Notre-Seigneur. Nourricier, entendez bien. Or, celui qui a nourri la tête de l’Eglise en doit aujourd’hui nourrir le corps. Partout l’Eglise est dépouillée; les prêtres, les religieux et les religieuses meurent de faim; le Pape lui-même reçoit l’aumône de ses enfants « Unde ememus panem, ut manducent hi*? Où acheter du pain pour nourrir tout ce monde? » disait dans le désert Notre-Seigneur à saint Philippe. Les chrétiens disent à saint Joseph: « Père nourricier du divin Enfant, du pain pour les ouvriers apostoliques qui en manquent ». En face de cette indigence, saint Joseph a une rude besogne, mais il saura bien en venir à bout. Allez à Joseph, disait Pharaon aux Egyptiens affamés; allez à Joseph, a dit Pie IX au clergé sans pain. Les greniers, non de l’Egypte, mais de la charité divine, s’ouvriront à la voix du céleste intendant. Il est bien plus puissant que le fils de Jacob; invoquons-le avec foi, il nous exaucera avec largesses.

Saint Joseph, obtenez-nous de devenir des chrétiens d’oraison, de pieux et fervents pèlerins, des ouvriers comme vous le fûtes, des hommes confiants en votre protection, même pour nos besoins corporels. Nous attendons de vous cette quadruple faveur.

Notes et post-scriptum