ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES

Informations générales
  • TD 8.112
  • ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES
  • QUATRIEME DIMANCHE APRES LA PENTECOTE
  • Le Pèlerin, N.S., III, n° 130, 28 juin 1879, p. 405-406.
  • TD 8, P. 112.
Informations détaillées
  • 1 ABUS DES GRACES
    1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 GENEROSITE DE L'APOTRE
    1 HUMILITE
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 JESUS-CHRIST CHEF DE L'EGLISE
    1 MIRACLES DE JESUS-CHRIST
    1 PERSEVERANCE APOSTOLIQUE
    1 PRUDENCE DE LA CHAIR
    1 SALUT DU GENRE HUMAIN
    1 SILENCE DE JESUS-CHRIST
    1 VERTU D'OBEISSANCE
    1 VOCATION
    2 PAUL, SAINT
    2 PIERRE, SAINT
  • 28 juin 1879.
  • Paris
La lettre

Jésus est poursuivi par la foule avide d’entendre sa parole et de profiter de ses miracles. Pour pouvoir se faire mieux entendre, il monte sur une barque, s’éloigne de quelques pas de la rive et continue sa prédication; puis pour récompenser les bateliers de leur service, il dit à leur chef: Prenez le barge et jetez vos filets: Duc in altum, et laxate retia vestra. Quoique la pêche de la nuit n’eut rien produit, on obéit et les rets se trouvent pleins de poissons à tel point qu’il faut appeler le secours d’une barque voisine, et les deux furent sur le point de couler bas, tant les poissons étaient abondants. Les leçons les plus admirables peuvent être tirées de ce prodige, figure de la vocation des peuples. Arrêtons-nous à quelques-unes des principales.

D’abord tout lieu est favorable pour parler de Dieu; une grande route, le bord d’un lac, une barque, tout a fourni à Jésus-Christ place pour enseigner; le grand prédicateur n’est jamais monté sur une chaire, et pourtant il évangélisait sans cesse. A la vérité, dira-t-on, il faisait des prodiges: mais cette fois la foule avait été congédiée; quand la pêche commença, on s’était éloigné du rivage, on était au milieu du lac. Jésus-Christ, qui voulait moins instruire par lui-même que préparer ses apôtres, ordonne à ces hommes de jeter leurs filets, et, comme il leur avait déjà donné l’obéissance de la foi, ils exécutent ce qui leur est commandé, malgré l’insuccès de leurs travaux nocturnes. La pêche miraculeuse a lieu; les pêcheurs avaient obéi. Ainsi en est-il toujours: l’obéissance, dans l’oeuvre de l’évangélisation, est la condition essentielle. Il faut être envoyé par celui qui a le droit d’envoyer; il faut avoir reçu mission. Et quomodo praedicabunt, nisi mittantur? Puis il faut travailler sans découragement; une nuit sans résultats n’empêchera pas Pierre de jeter ses filets une fois de plus, et le succès couronnera ses efforts. Obéissance et persévérance: deux grandes conditions pour mettre l’instrument évangélique entre les mains de Dieu. Ici Jésus-Christ ne fait pas le miracle, il le fait faire par les apôtres, il n’évangélisera pas la terre entière; c’est d’eux qu’il sera dit: In omnem terram exivit sonus eorum, et in fines orbis terrae verba eorum. Mais il est prudent, aussi Jésus-Christ a-t-il assisté sans cesse ceux qu’il envoie. Ecce ego vobiscum sum omnibus diebus usque ad consummationem saeculi. Pourtant il est des temps où il s’éloigne, c’est quand l’envoyé veut agir seul et par lui- même, tout rapporter à sa gloire personnelle, se croire un sujet important, nécessaire. Ce qui résulte est nul, quelquefois funeste. Non, il faut obéir, persévérer et se maintenir sous l’action de Jésus-Christ par l’humilité.

Voyez Pierre, le patron de la première barque. Effrayé de ce qu’il contemple, il tombe à genoux et dit à Jésus: « Seigneur, éloignez-vous de moi, car je ne suis qu’un homme pécheur: Exi a me, quia, homo peccator sum« . Jésus-Christ ne n’entend pas ainsi. Désormais, lui dit-il, tu seras employé à la pêche des hommes. Des filets, non ceux de Pierre, mais ceux qui lui confiera Jésus, seront jetés par lui et les apôtres sur l’univers entier, des multitudes de poissons seront pris, mais il y en aura de diverses espèces: les bons seront mis à part et les autres rejetés au loin. Tous seront évangélisée, les uns profiteront de la parole divine, les autres en abuseront, et seront rejetés. Telle est l’application des effets divins de la parole de Dieu.

Mais revenons aux apôtres: Et continuo, relictis retibus, secuti sunt eum: aussitôt, ayant quitté leurs filets, ils suivirent Jésus. Quelle promptitude dans la correspondance à l’appel et comme sont condamnés, par la rapide obéissance des apôtres, ces hommes appelées et qui hésitent toujours! Est-ce la voix de Dieu? Et plus ils se le demandent, plus ils retardent, plus la voix s’éloigne. Jusqu’à ce qu’enfin ils ne l’entendent plus: gens en très grand danger, ils ont perdu leur vocation, ils ont été sourds à l’heure convenable, et Jésus est devenu muet pour eux. Ils pouvaient être des vases de choix, ils ne seront que des vases vulgaires, comme le potier en fabrique pour les usages les plus communs. Ils ne porteront pas en eux les délicats et précieux parfums de la grâce: ainsi s’expliquent tant de vocations perdues. Jésus pourtant avait parlé, on a repoussé son invitation. Uxorem duxi, et ideo non possum venire; c’est toujours quelque triste excuse de ce genre que l’on trouve au fond de son coeur alourdi par les émotions terrestres.

Ah! c’est que, pour obéir sans délai, il faut une bien rare condition: le désintéressement et l’abandon à la Providence. *Et continuo relictis retibus, secuti sunt eum. Les apôtres n’avaient que leurs filets, ils les abandonnent incontinent; ils en vivent, qu’importe? Il faut suivre Jésus dans sa pauvreté et son indigence. Qui arrêtera celui qui n’a plus rien, et qui compte sur Dieu pour le pain de chaque jour? Celui qui attend la faim, la soif, la nudité, comme Paul le fabricant de tentes? Seigneur, donnez-nous beaucoup de ces hommes et le monde sera bientôt converti.

Notes et post-scriptum