ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES

Informations générales
  • TD 8.129
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  • DIXIEME DIMANCHE APRES LA PENTECOTE
  • Le Pèlerin, N. S., III, n° 136, 9 août 1879, p. 503.
  • TD 8, P. 129.
Informations détaillées
  • 1 ENNEMIS DE L'EGLISE
    1 FAUSSE SCIENCE
    1 FOI
    1 FRANC-MACONNERIE
    1 HUMILITE
    1 HYPOCRISIE
    1 JESUS-CHRIST MODELE
    1 MONDE ADVERSAIRE
    1 MORALE INDEPENDANTE
    1 ORGUEIL
    1 SAINTETE DE L'EGLISE
    1 TRIOMPHE DE L'EGLISE
    1 VIE DE PRIERE
    2 BERT, PAUL
    2 FERRY, JULES
    2 JEROME, SAINT
    2 MARGUE
  • 9 août 1879.
  • Paris
La lettre

De tout temps on a vu des gens pleins de la meilleure opinion d’eux-mêmes et pleins du plus grand mépris pour les voisins; cela avait lieu avant Jésus-Christ, cela se voyait de tout temps, cela se rencontre encore. Et cette coutume n’est pas prête à finir. Aujourd’hui il y a recrudescence. La science moderne, les savants modernes, la société moderne, les hommes modernes: que signifie tout ce verbiage, sinon que nous rougissons d’un passé qui aurait mille fois plus le droit de rougir de nous? Nous nous posons sur un piédestal, d’où la très proche postérité n’aura probablement rien de plus pressé que de nous faire dégringoler. En attendant, nous nous vantons, nous nous rengorgeons, nous nous glorifions de ce que nous ne sommes pas comme tout le monde, et surtout comme ces chrétiens stupides qui se mêlent de défendre les Jésuites contre M. Ferry, et qui trouvent que M. Paul Bert, malgré sa science, pourrait être assez savant pour ne pas citer des textes faux.

Ah! disent-ils, non pas dans les églises, où ils ne vont jamais, mais enfin quelque part, mon Dieu (s’il y a un Dieu), je vous remercie de n’être pas comme le reste des hommes. Je puis bien descendre comme l’espèce humaine d’un orang outang, mais enfin je ne suis pas comme tout le monde, Sicut caeteri hominum. Par exemple je ne jeûne pas; j’aime mieux assister aux ballets dansés en léger costume, sans perdre de ma moralité. Voyez comme je crie contre ceux qui anathématisent dans leurs paroles ce que je ne rougis pas de montrer dans mes actes. Enfin je suis un homme de philanthropie et de décorum, et si j’ai besoin de m’amuser, je choisis mon temps, le vendredi- saint par exemple. Après cela je suis honnête et même austère, le monde moderne ayant tout changé, pourquoi ne changerait-on pas le sens des mots? pourquoi ne dirait-on pas: le beau Ferry, véridique Bert, Margue aux doux parfums?

Et le pharisien, ou homme moderne (à votre choix) continuant, laisse tomber de ses lèvres un gros volume d’éloges sur lui- même et de mépris pour les arriérés.

Ces hommes sont partout avec leur haine, fille de leur insuffisance doublée de leur ambition; ils sont partout pour détruire tout ce qui est grand, noble, bon; la vraie grandeur, la noblesse et la bonté de l’âme leur sont un reproche perpétuel, et, du plus modeste fauteuil jusqu’au plus haut perchoir, ils veulent critiquer, renverser pour monter. Qu’ils aillent, il y a un terme à tout: quatre planches et six pieds de terre.

A côté de ces animaux de gloire, comme les appelle saint Jérôme, et j’ajoute: d’autre chose, voyez les humbles publicains. On a peine à les voir, que de gens passent près d’eux sans les avoir aperçus! En effet, si on les voyait trop, c’est qu’ils ne seraient pas assez humbles; que disent-ils? Seigneur, pitié de moi, pécheur. Domine propitius esto mihi peccatori. Ah! ce n’est pas seulement à un homme à prononcer cette prière: c’est à l’Eglise, au nom de tous les hommes qu’elle a faits ses enfants par le baptême. Tel est son cri incessant par la bouche des saints, humbles à l’imitation de celui qui a dit: Apprenez de moi que je suis doux et humble de coeur. Telle est la grande séparation, les humbles et les orgueilleux. L’un se retire justifié, il s’est humilié; l’autre s’est vanté, et, malgré ses vertus extérieures dont il est si fier, la justice s’éloigne de lui.

Quiconque, ajoute le Sauveur, s’exalte sera humilié, et quiconque s’humilie sera exalté.

Grand secret des saints: l’humilité de la prière. La prière humble enfante la foi qui renverse les montagnes. Le perpétuel travail des saints pour sauver l’Eglise a été l’effort de la foi par l’humilité et la prière. Tel est le secret auquel la science moderne ne comprendra rien et le levier que tous les politiques francs-maçons ne pourront remuer, c’est la force qui du fond des solitudes et des retraites les plus obscures donne aux saints le pouvoir de triompher des ennemis de l’Eglise, alors qu’on attend le moins. Soyons humbles, prions avec foi, et Dieu fera des miracles de foi et de justice pour nous.

Notes et post-scriptum