ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES

Informations générales
  • TD 8.142
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  • SEIZIEME DIMANCHE APRES LA PENTECOTE
  • Le Pèlerin, N. S., III, n° 142, 20 septembre 1879, p. 604.
  • TD 8, P. 142.
Informations détaillées
  • 1 AMBITION
    1 CIEL
    1 ENFER
    1 ENNEMIS DE L'EGLISE
    1 ENSEIGNEMENT DE JESUS-CHRIST
    1 HUMILITE
    1 JUIFS
    1 ORGUEIL
    1 PASSION DE JESUS-CHRIST
    1 PLAN DE DIEU
    1 SAINTETE
    2 ACHILLE
    2 OVIDE
  • 20 septembre 1879.
  • Paris
La lettre

Je laisse de côté la guérison de l’hydropique pour parler de la grande leçon d’humilité que Notre-Seigneur donne aux orgueilleux. Il était entouré de docteurs, de scribes, de gens d’affaires, de jurisconsultes, de tout ce que l’orgueil incrusté au plus profond de l’être, et tous ces gens voulaient la première place. N’est-ce pas l’histoire de tous les temps? Qui abdique la possibilité de dominer? Qui, au nom des lois les plus égalitaires, ne dit pas tout haut: « Pas de distinction; tous égaux »; ne dit pas tout bas: « Je saurai bien sauter sur la tête de ces imbéciles, assez sots pour croire ce que je leur dis? » Ainsi va le monde, et il n’en va pas mieux pour cela. Les pharisiens d’alors disaient ce que disent les pharisiens d’aujourd’hui, et les pharisiens d’alors détestaient Jésus, parce qu’il leur disait net leurs quatre vérités, comme les pharisiens d’aujourd’hui haïssent l’Eglise, qui continue les désagréables discours de son fondateur. Les pharisiens d’alors crucifièrent Jésus-Christ, qui ressuscita le troisième jour, et fonda l’Eglise, et les pharisiens d’aujourd’hui persécutent l’Eglise, qui les enterrera ou assistera à leur enfouissement, et marchera à de nouveaux combats et de nouvelles victoires. C’est aussi simple que tout ce qui est voulu de Dieu.

Petits bons hommes, agitez-vous, enflez-vous d’orgueil, cherchez à être les premiers, voilà que Dieu a soufflé sur vous, et voilà que de votre impuissance il ne reste qu’un peu de cendre: Quod non bene compleat cernam, au dire d’Ovide dissertant sur Achille.

Que le plus habile docteur, juriscondulte, législateur, cherche à être quelque chose ou quelqu’un, cela se comprend; mais qui a des idées pareilles est essentiellement médiocre. Ah! mon ami, il ne s’agit pas d’aller s’asseoir à un festin, comme celui où Notre Seigneur donna une si belle leçon d’humilité, et de se placer à la droite de la maîtresse de la maison. Il y a un autre festin, le banquet de l’éternité, où l’on n’entre qu’avec la robe nuptiale. En d’autres termes, pour participer au festin du ciel, il faut avoir lavé sa conscience, et sérieusement. Or, je crains que la vôtre ne soit terriblement sale. Dans ce cas-là on ne vous dira pas: « Mon ami, montez plus haut », amice, ascende superius: on vous dira: « Mon ami, passez la porte », et, si vous ne vous dépêchez pas de la passer, on dira aux serviteurs: « Prenez cet homme et jetez-le dans les ténèbres extérieures, là où il y aura des pleurs et des grincements de dents », gemitus et stridor dentium. C’est un lieu où je puis vous assurer que depuis longtemps on envoie les gens de votre espèce. Songez-y, et laissant vos idées égalitairement ambitieuses de côté, pensez que, si vous le voulez bien, Notre-Seigneur vous fera monter très haut, mais à une condition, c’est que vous deviendrez très humble, et vous vous séparerez rondement des pharisiens du temps présent. Croyez-le bien, ils ont moins d’esprit qu’ils ne le disent, et à certaines heures sincères ils sont aussi persuadés que vous de leur nullité. Pourquoi donc ont-ils tant de succès? Hélas! si je disais que c’est parce que la masse des honnêtes est encore plus absurde qu’eux, on me lapiderait; or je ne veux pas être lapidé, c’est pourquoi je juge utile de me taire et de mettre une porte de circonspection à mes lèvres.

Notes et post-scriptum