ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES

Informations générales
  • TD 8.149
  • ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES
  • DIX-NEUVIEME DIMANCHE APRES LA PENTECOTE
  • Le Pèlerin, N. S., III, n° 145, 11 octobre 1879, p. 647.
  • TD 8, P. 149.
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DE JESUS-CHRIST POUR LES HOMMES
    1 ANCIEN TESTAMENT
    1 APOSTASIE
    1 COMMUNION FREQUENTE
    1 CONCILE DE TRENTE
    1 CONSEQUENCES DU PECHE
    1 ENSEIGNEMENT DE JESUS-CHRIST
    1 EUCHARISTIE
    1 GRACE
    1 JUIFS
    1 PHILOSOPHIE MODERNE
    1 SACRILEGE
    1 SAINTE COMMUNION
    1 SAINTS DESIRS
    1 SCEPTICISME
    2 BOSSUET
    2 MIRABEAU
  • 11 octobre 1879.
  • Paris
La lettre

L’évangile du roi qui convie un grand nombre de personnes à un festin et qui voit ses serviteurs insultés, battus, mis à mort par les invités quand il leur fait dire: « l’heure est venue », fournit matière à plusieurs interprétations. D’abord il est évident que Jésus-Christ parle des pharisiens, dont les pères mettaient à mort les prophètes, quand ceux-ci les avertissaient de répondre aux avances du Seigneur. Quem prophetcrum patres vestri non occiderunt? Et l’on comprend que les docteurs de la loi ne fussent pas satisfaits d’une parabole fort transparente.

Ceci s’applique encore à tout peuple qui, après avoir reçu le bienfait de la loi, le repousse en persécutant les représentants de Dieu, et c’est juste ce que l’on voit tous les jours.

Mais je ne veux pas insister sur un point de vue assez évident par lui-même.

Le festin auquel invite le véritable roi, c’est la divine Eucharistie. Que de chrétiens y sont invités et la repoussent, et s’irritent contre pareille invitation! Les libertins, dit Bossuet, aiment toujours à douter de ce qui les condamne. On doute ou du moins on cherche à douter; de doute en doute on perd la foi, et, selon l’expression de Mirabeau, un des plus grands libertins de la terre, on se décatholicise.

Or, après une opération aussi radicale, il est impossible de ne pas prendre la vérité condamnatrice en horreur; et l’on se débarrasse par tous les moyens des ambassadeurs de Dieu; on les insulte, on les expulse, si cela ne suffit pas, on les met à mort. C’est bien leur faute, pourquoi ne restaient- ils pas chez eux?

Cependant le festin a été préparé, il faut qu’il soit servi. Les savants, les puissants, les habiles l’ont dédaigné; que l’on appelle les pauvres, les gens de peu, eux ne le refuseront pas. Et en effet, la table royale se remplit, mais tout pauvres qu’ils sont, ils doivent se revêtir de la robe nuptiale, qui du reste leur est offerte en pur don en entrant; qui se présente sans cette robe de fête fait insulte au roi, qui ajoute cette largesse à celle pour laquelle il a convoqué cette multitude.

Quand tous sont entrés, le roi veut s’assurer par lui-même si tout est en ordre; or, il se trouve qu’un homme n’a pas la robe nuptiale, et le roi lui dit: « Mon ami, comment êtes-vous entré sans avoir la robe nuptiale? » Et lui garde le silence. Le roi ordonne de lui lier les pieds et les mains et de le jeter dans les ténèbres extérieures. Cet homme c’est le chrétien quand il communie indignement.

Jésus-Christ invite tous les hommes sans distinction au céleste banquet. Vous le refusez, malheur à vous! vous l’acceptez, à merveille! mais il faut prendre la robe convenable: il faut se purifier. Malheur à l’âme souillée qui s’approche de la sainte table, mais aussi malheur à toutes les âmes qui restent dans leur indignité et ne s’en approchent pas! Que faire? se purifier et aller au festin; prendre le vêtement des noces et prendre part à ces solennités merveilleuses où le roi montre sa générosité par les largesses qu’il distribue à pleines mains.

Il y a là deux erreurs. Erreur de celui qui se présente sans préparation, ne traitant pas comme il convient le corps de son Dieu: Non dijudicans corpus Domini, et l’erreur de ceux, plus nombreux, qui rendent inutiles les inventions de l’amour d’un roi qui se donne lui-même en nourriture à ses sujets. Il faut communier avec préparation, mais il faut souvent communier au pain quotidien et supersubstantiel. Parce qu’on pousse à la communion, on ne nie pas le besoin de préparation; parce qu’on recommande de se préparer, on n’écarte pas de la manne eucharistique. Préparez-vous, et communiez tous les jours s’il se peut, selon le désir du concile de Trente: « Prenez et mangez, ceci est mon corps; prenez et buvez, ceci est mon sang ». Ineffable invitation. Proclamons notre indignité, mais préparons-nous et approchons. Si vous ne mangez la chair du fils de l’homme, si vous ne buvez son sang, vous n’aurez pas la vie en vous; mais si la vie s’enfuit, où tombons-nous? Dans les ténèbres extérieures. Restons dans la lumière, restons dans la vie, allons au festin avec la robe nuptiale, et profitons de tous ce qui nous y est offert.

Notes et post-scriptum