ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES

Informations générales
  • TD 8.173
  • ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES
  • LES PREMIERS JOURS DE 1880
  • Le Pèlerin, N. S., III, n° 157, 3 janvier 1880, p. 838.
  • TD 8, P. 173; CO 223.
Informations détaillées
  • 1 ATHEISME
    1 AUMONE
    1 CATECHISME
    1 CIEL
    1 COMMUNARDS
    1 EDUCATION EN FAMILLE
    1 EGOISME
    1 ENFER
    1 HISTOIRE DE L'EGLISE
    1 LACHETE
    1 LUTTE ENTRE L'EGLISE ET LA REVOLUTION
    1 MARTYRS
    1 MECHANTS
    1 MISERICORDE DE DIEU
    1 MISSION DES LAICS
    1 PERSECUTIONS
    1 PRUDENCE
    1 REVOLUTION ADVERSAIRE
    1 SOCIETES SECRETES
    1 SPOLIATEURS
    1 TRIOMPHE DE L'EGLISE
    1 VOLONTE DE DIEU
    2 FRANCOIS DE SALES, SAINT
    2 TALLEYRAND
    3 FRANCE
  • 3 janvier 1880.
  • Paris
La lettre

Quels souhaits faire pour vous, chers lecteurs, au commencement d’une année que tant de persécutions annoncent comme une année terrible, quasi de malheurs et de ruines? D’abord, que la volonté de Dieu soit faite en la terre comme au ciel! Les méchants semblent bien faire la leur au rebours de celle de Dieu, mais cela finit par tourner mal, sinon en ce monde, au moins dans l’autre, où quoiqu’on dise, il y a l’enfer. L’enfer, sans lequel je crois bien qu’ils ne seraient pas si furieux contre le cléricalisme chargé de prêcher le feu éternel. Eh! bien, oui, il y a l’enfer. Je souhaite du fond du coeur que personne n’y aille, ni vous qui me lisez, ni moi non plus, pas même les ennemis de l’Eglise, s’ils consentent à se convertir.

Un vieille évêque paralytique me racontait, il y a quarante ans, qu’un évêque apostat sortait de chez lui; il lui avait parlé de la conversion vraie ou fausse (cela ne me regarde pas) de M. de Talleyrand « C’est bien dur à croire », ajoutait-il; puis, se tournant avec effort vers son crucifix: « Enfin, mon Dieu, vous avez bien pardonné au bon larron », et il murmura à demi-voix: « Oui, mais ce sont de ces coups que vous ne faites pas tous les jours ».

Dieu en peut faire de semblables, mais pas souvent. Donc ne nous mettons pas dans cette situation très pénible du bon larron et de M. de Talleyrand. Croyons à l’enfer pour l’éviter; ce sera un puissant moyen d’avoir la chance d’aller au ciel. Et quand à ceux qui ne croient ni au ciel ni à l’enfer, tenons-nous très loin d’eux; ils nous entraîneraient peut-être.

Je vous souhaite de ne pas prendre scandale de ce que vous voyez, car vous avez de tristes spectacles sous les yeux: des coquins triomphants, et tant de gens honnêtes si profondément endormis, tant d’égoïstes qui se réfugient dans leur intérêt étroit et ne savent pas se compromettre, quand avec un peu de courage on serait si puissant. Mais non, on songe à soi, rien qu’à soi, et l’on reste pieusement dans l’immobilité qui prépare les catastrophes. Revenez par la pensée aux premières siècles de l’Eglise. Qu’ont été les premiers siècles? Une série de boucheries dix fois répétées, et puis l’Eglise a vaincu. Certes , il y avait alors de grandes défaillances, mais il y avait les martyrs, et les martyrs ont fini par avoir raison des Césars.

Je vous souhaite d’étudier votre religion, pour pouvoir la défendre, pour en causer en famille, pour en parler là où votre position vous permet de témoigner de votre foi avec autorité ou avec modestie, toujours avec fermeté. Tous les chrétiens doivent être aujourd’hui apôtres. Voyez la Révolution. Pourquoi tant de campagnes sont-elles gangrenées? Parce que les émissaires du diable y ont pénétré avec audace et que trop de catholiques ont été des chiens muets incapables d’aboyer au voleur, comme le veut le très doux saint François de Sales.

Quel souhait vous faire encore? Je vais vous demander l’impossible. Ecoutez bien: sachez vous organiser. Qui songe à mener les troupes a la bataille? Il est vrai que la vie de garnison est bien plus commode que celle du bivouac. Voyez comme à l’aide des sociétés secrètes les autres sont organisés. Et nous? Passons là-dessus. Trop insister serait imprudent, mais ce que tous peuvent faire, c’est de fouiller leurs poches pour en extraire le superflu et le donner aux pauvres provisoirement par des mains catholiques et non philanthropiques. Ah! oui, donnez beaucoup. La confiscation individuelle est proscrite, mais voyez les appétits communards provoquant la confiscation en masse. Oter ses biens à un citoyen, c’est affreux; ôter toute propriété à tout propriétaire, rien de plus naturel pour ceux qui comptent profiter de ce vol universel. Prévenez-les donnez beaucoup. Vous avez bien quelques péchés à vous reprocher; rachetez-en la multitude par vos aumônes.

Je pourrais, chers lecteurs, vous souhaiter bien d’autres choses. Je m’arrête. Mes voeux ainsi formulés sont suffisants, et si vous écoutez ces conseils, soyez convaincus que quelque bien en résultera pour vous, pour la France et pour notre mère l’Eglise.

Notes et post-scriptum