ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES

Informations générales
  • TD 8.175
  • ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES
  • EPIPHANIE
    ENCORE LES MAGES
  • Le Pèlerin, N. S., III,n° 158, 10 janvier 1880, p. 858.
  • TD 8, P. 175; CO 224.
Informations détaillées
  • 1 APOSTASIE
    1 APOTRES
    1 BON PRETRE
    1 CONSTITUTION CIVILE DU CLERGE
    1 ENNEMIS DE JESUS-CHRIST
    1 EPREUVES DE L'EGLISE
    1 EXPULSION
    1 EXTENSION DU REGNE DE JESUS-CHRIST
    1 HARDIESSE DE L'APOTRE
    1 HERESIE
    1 HISTOIRE DE L'EGLISE
    1 JUIFS
    1 MAHOMETANISME
    1 MARTYRS
    1 PAGANISME
    1 PROVIDENCE
    1 PRUDENCE DE LA CHAIR
    1 REVOLUTION ADVERSAIRE
    1 SALUT DU GENRE HUMAIN
    1 TRAITRES
    1 TRIOMPHE DE L'EGLISE
    1 UNIVERSALITE DE L'EGLISE
    2 CALVIN, JEAN
    2 ENEE
    2 ETIENNE, SAINT
    2 HERODE I LE GRAND
    2 JACQUES, SAINT
    2 JUDAS
    2 LUTHER, MARTIN
    2 MAHOMET
    2 ZWINGLI, ULRICH
    3 ALLEMAGNE
    3 ANGLETERRE
    3 BETHLEEM
    3 ETATS-UNIS
    3 FRANCE
    3 GENEVE
    3 JERUSALEM
    3 JUDA, ROYAUME
    3 JURA, DEPARTEMENT
    3 SUISSE
    3 TROIE
  • 10 janvier 1880.
  • Paris
La lettre

Ils vinrent et ils s’en retournèrent. Les mages, quittant Bethléem après y avoir adoré l’Enfant-Jésus, seraient-ils l’image prophétique des prêtres français, qui, après avoir adoré le Verbe incarné dans les églises de la patrie, seront contraints par le cours des révolutions d’aller prêcher la foi? Les mages cherchaient à éviter Hérode, qui comptait se servir d’eux pour mettre à mort le véritable roi de Juda. Plaise à Dieu que tous ses serviteurs fuient, eux aussi, les Hérodes du XIXe siècle! On en a vu à Genève et dans le Jura. Ils diminuent, c’est vrai. Ce n’est pas une raison pour qu’il ne s’en trouve pas d’autres: sur douze apôtres il y avait un traître. Mais écartons ces sombres pensées. Les apôtres, nous l’avons déjà fait observer, ne quittèrent Jérusalem et n’allèrent prêcher l’évangile aux quatre vents de la terre que lorsque la persécution les y contraignit. Mais aussi quels fruits merveilleux produits par leur prédication! Les pharisiens croyaient étouffer, soit dans le sang d’Etienne et de Jacques, soit dans le bannissement des autres disciples, le souvenir du blasphémateur Jésus; ils n’avaient aidé qu’à apprendre aux martyrs à donner leur vie avec joie, aux échos de la parole sainte le courage de la faire entendre à tous et contre tous. Ah! sans doute, les apôtres partis, Jérusalem fut plus définitivement condamnée. Mais la lumière divine allait verser ses rayons plus purs, plus féconde, sur le genre humain tout entier et l’arracher aux ténèbres du paganisme. Les idoles allaient tomber de leur piédestal, la fumée des sacrifices se dissiper, les temples crouler ou être transformés en sanctuaires du vrai Dieu. Puis vint la plume des hérétiques, le cimeterre de Mahomet, et les successeurs des apôtres durent lutter avec d’autres armes. L’Eglise considérée dans son ensemble, fut toujours victorieuse.

Aujourd’hui l’horizon est sombre, les tempêtes menacent. Ce qui se passera à l’intérieur de la France, je ne le veux pas considérer; mais si tant de missionnaires en sont sortis par les temps calmes, combien ne prendront pas leur vol vers les plages étrangères pendant les jours troublés qui se préparent?

On dit, il est vrai, que bien des prêtres ne seront pas à la hauteur du péril, que plusieurs céderont à l’ouragan et tomberont dans l’apostasie. Quand cela serait vrai de quelques-uns, il en restera toujours assez qui, dignes de l’onction de leur sacerdoce, ou combattront pour la foi au dedans, ou en saisiront le flambeau et l’agiteront sur les ténèbres païennes, incrédules, schismatiques. Enée, dans l’incendie de Troie, emportait ses dieux. Plus heureux dans la dévastation générale faite par les révolutions, les prêtres catholiques pourront à la fois et laisser leur Dieu sous les ruines de leurs églises pour en préparer la reconstruction, et emporter celui qui est présent partout où on lui commande de descendre là où il sera écouté, obéi, adoré.

Mais il ne s’agit pas d’apostats, dira-t-on; nous avons des prêtres confesseurs de leur foi à voix basse, de ces hommes que le danger épouvante et se taisent au besoin, pour qu’on ne puisse les accuser d’imprudence. J’avoue que cette espèce d’hommes est très peu apostolique. L’histoire de l’Eglise nous en fournit des exemples. L’Allemagne, l’Angleterre, la Suisse en contenaient un trop grand nombre, lorsque parurent Zuingle, Calvin, Luther. La France, il y a moins d’un siècle, compta cent mille prêtres qui prêchèrent des serments défendue. Les prêtres indignes, faibles, souvent ignorants, ou se relevèrent dans le repentir, ou s’enfoncèrent dans le plus universel mépris. Il en resta assez pour conserver la pure doctrine et la sainteté des moeurs chrétiennes; quelques uns de nos évêques moururent martyrs, d’autres prirent le chemin de l’exile, peu rentrèrent en France; il en resta assez pour imposer les mains à quelques rare lévites dans les granges écartées, sous la menace de perquisitions qui eussent conduits à l’échafaud. Mais voyez la disposition providentielle. Que n’ont pas préparé les prêtres bannis en Angleterre, aux Etats-Unis, partout! Quelle action secrète, lente mais irrésistible, n’ont-ils pas exercée au sein des familles!

Ce serait un beau travail que celui où serait raconté l’apostolat des prêtres immigrés. Je me persuade que si le clergé, le clergé séculier surtout, menacé d’expulsion, en était réduit à franchir les frontières, ce serait sans doute un immense malheur pour la France, ce serait l’aurore d’une époque de bénédictions pour une foule de nations assises à l’ombre de la mort.

Notes et post-scriptum