- TD 8.183
- ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|PRONES
- LE SEMEUR
- Le Pèlerin, N. S., IV, n° 161, 31 janvier 1880, p. 905-906.
- TD 8, P. 183.
- 1 ANGLICANISME
1 CELIBAT
1 COMMUNE
1 CONGREGATION DE LA PROPAGANDE
1 CONSTITUTION CIVILE DU CLERGE
1 DESINTERESSEMENT DE L'APOTRE
1 ENSEIGNEMENT DE JESUS-CHRIST
1 GESTION FINANCIERE
1 MOISSON
1 PREVOYANCE
1 PRIERE POUR L'EGLISE
1 REPUBLICAINS ADVERSAIRES
1 REVOLUTION ADVERSAIRE
1 SAGESSE DE DIEU
1 SALUT DES AMES
1 SEPARATION DE L'EGLISE ET DE L'ETAT
1 SOUFFRANCE APOSTOLIQUE
1 SPOLIATEURS
1 TRAVAUX AGRICOLES
1 UNION DE L'EGLISE ET DE L'ETAT
2 CALCHAS
2 GAMBETTA, LEON
2 GREVY, JULES
2 PAUL, SAINT
3 ALLEMAGNE
3 CANTERBURY
3 PARIS
3 SUISSE - 31 janvier 1880.
- Paris
« Celui qui sème sortit pour semer« . On a bien souvent parlé du blé que cet honnête travailleur confie aux sillons, je voudrais aujourd’hui dire quelque chose non sur ses mérites, mais sur ses besoins. Car enfin, si avec les moissons qu’il prépare il pourvoit à la nourriture spirituelle de ceux qui profiteront de ses sueurs, n’est-il pas juste qu’on se demande comment il vit et de quoi il vit? Ah! si tous les laboureurs évangélique étaient comme saint Paul! S’ils vivaient de la vie de souffrances, de persécutions, de naufrages, de flagellations, de péril de faux frères, si leur aliment était la faim et leur breuvage la soif, nous pourrions ne nous point occuper de leur subsistance! Mais il n’y a qu’un saint Paul. La Propagation de la Foi, cette oeuvre si admirable, empêche des légions de missionnaires de périr d’inanition, c’est très bien, quoique beaucoup trop peu, pour les apôtres du dehors. Mais voilà que l’on commence à réduire de traitement des évêques, on parle de leur prendre leurs cathédrales. Après les évêques, viendront les curés à qui l’on fait pour le moment patte de velours, dans l’espoir de les séparer de leurs chefs. Attendez un peu; le conseil municipal de Paris y préclude par ses aspirations. Laissez que les honnêtes gens qui le composent deviennent la Commune, (et qui jurerait que ce ne sera pas bientôt, serait un insensé), oui que la Commune arrive, et vous verrez ce que les semeurs de l’Eglise auront à mettre sous la dent!
Evidemment, à moins d’un miracle de la Providence, nous sommes destinés à être témoins de faits étranges, mais logiques, étant donné l’esprit de la Révolution. Or, parmi les plus logiques de ces faits, il faut mettre la suppression du budget des cultes, excepté peut-être pour ceux qui consentiraient à prêter serment à quelque nouvelle constitution civile du clergé. Peut-être même l’inutilité du procédé en Suisse et en Allemagne dégoûtera-t-elle les gens pressés d’arriver au but. Dans tous les cas, de quoi vivront les semeurs légitimes? Peut-être le nombre en diminuera-t-il. Enfin, il en restera, et, pour peu qu’il en reste, pensez-vous qu’ils vivent de l’air du temps? Moi, je suppose qu’il leur faut du pain. Qui le leur donnera? J’entends ici les gémissements de ceux qui regrettent l’état ancien, où le clergé grassement doté ne demandait rien à personne. Pour moi, je regrette peu cet état. Pensez-vous que l’archevêque anglican de Cantorbéry, avec ses six millions de revenu, en fasse un usage bien ecclésiastique? Il pense à préparer la dot de ses filles. A quoi peut donc penser un archevêque qui a femme et enfants? Hélas! dans les pays catholiques certaines gens qui ne sont pas évêques et n’ont pas de femmes légitimes, à quoi emploient-ils leur argent? Non, non, on a volé, spolié l’Eglise, mais Dieu sait admirablement ce qu’il fait. Le clergé n’a pas besoin d’être trop riche, mais pourtant il a besoin de manger. Qui lui donnera du pain? Oui, à qui sera-t- il obligé de le demander, peut-être dans un an, peut-être dans deux? Si ceux qui ont dit: « Le cléricalisme voilà l’ennemi, triomphent, comme ils l’espèrent, pensez-vous qu’ils auront grand souci de sustenter le clergé? A moins qu’il ne fassent du traitement des curés un instrument de servitude, tenez pour sûr qu’ils le supprimeront pour rendre taisante une partie de la meute des affamés.
Les affamés de la République, mais c’est affreux! Ecoutez les cris poussés contre tout ce qui a quelque chose. Toutefois, on a pour le moment sous la main le budget du clergé; qu’on le leur jette, ce n’est qu’un os, mais pendant que la tourbe radicale le broiera sous sa dent famélique, M. Grévy pourra faire quelques économies et M. Gambetta commander quelques dîners à Trompette, en attendant que les deux illustres présidents soient dévorée à leur tour, car on les dévorera. Qu’ils le tiennent pour certain.
Cet oracle est plu sûr que celui de Calchas.
Après tout, qu’on fasse d’eux ce qu’on voudra; je m’en préoccupe très peu. Je m’occupe des semeurs apostoliques et de leurs moyens d’existence, avant très peu de temps. Je conjure les lecteurs du Pèlerin d’examiner ce qu’il est utile de préparer. Pour cela je leur demande beaucoup de prières. Le divin Maître a dit à ses apôtres, et, dans les apôtres, à tout le clergé catholique: *Ne craignez point, petit troupeau ». Non, il ne faut pas craindre, mais il importe d’être prêt.
Entendons-nous. Nous devons préparer des fonds; c’est la mission des laïques et des prêtres. Comment on organisera la distribution rendue nécessaire peut-être plus tôt qu’on ne pense, c’est affaire à nos premiers pasteurs, et je me garderai bien d’aborder un pareil problème. Ce qui est évident, c’est que pour le résoudre: 1° Il faut des fonds; à nous de les chercher; 2° A nos évêques, quand on aura créé un mouvement, d’en diriger l’emploie. Je n’ai voulu que pousser le cri d’alarme. Est-il inopportun? Mille fois non. Il fallait dire: Prenez garde, bientôt les semeurs manqueront du blé qui fait pousser les épis; ils manqueront du blé qui les nourrit eux-mêmes, et alors vous courrez grand risque de n’avoir plus de semeurs. Consentez-vous à en arriver à ce point?