ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|ARTICLES DIVERS

Informations générales
  • ARTICLES|ARTICLES DU PELERIN|ARTICLES DIVERS
  • SINGES ET SAINTS
    Singes et Saints.
  • Le Pélerin, N. S., IV, N° 165, 28 février 1880, p. 972-973.
  • CO 219
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DE DIEU POUR SA CREATURE
    1 ANIMAUX
    1 ATHEISME DE L'ETAT
    1 CATECHISME
    1 FAUSSE SCIENCE
    1 FIDELITE A LA GRACE
    1 GRANDEUR MORALE
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 MATERIALISME
    1 SAINTETE
    1 TRINITE
    1 VERBE INCARNE
    2 DARWIN, CHARLES
  • 28 février 1880.
  • Paris
La lettre

Dites tout ce que vous voudrez, le monde se divise en deux grandes parts: les singes et les saints.

Les singes sont tous ceux qui veulent descendre de ces illustres ancêtres et de mesdames leurs épouses les guenons.

Les singes sont un progrès, par quelles transformations ont- ils passé avant d’être singes? étaient-ils bimanes? quadrumanes? la science ne sait pas tout, peut-être fallu des siècles pour opérer la suffisante évolution de leurs pattes.

Il en a fallu bien d’autres pour passer de l’état de singe à celui d’un aussi bel homme que M. Darwin ou M…

Bref, descendre d’un singe est une gloire pour certains, cette ressemblance et cette descendance m’inspirent peu d’attraits: j’aime mieux être un original.

Mais que deviendra plus tard l’homme sorti du singe? en quoi consiste son évolution? aura-t-il une queue quelque part avec un oeil au bout? redeviendra-t-il quadrupède? moi je suis assuré que pour mieux se mettre en rapport avec la science moderne, les oreilles vont très considérablement lui pousser. Et après? ah après! après le singe, tout est fini. Pour les singes transformés ce doit être de même et je comprends le cri des nihilistes: Vive la terre!

Va, mon ami, va engraisser de ton cadavre l’espèce des carottes qu’on t’a si souvent tirées. Mon pauvre singe, tu en as avalé de bien dures, va fournir du fumier aux choux que planteront tes héritiers sur la tombe; quelle douce espérance! mais le petit fils d’un singe peut-il espérer mieux que nourrir les choux qui nourrissent les lapins?

Et les saints? Ah! pour les saints, c’est autre chose. Nous sommes tous appelés à la sainteté.

Qu’est pour l’homme la sainteté?

C’est l’imitation la plus complète de Jésus-Christ sous ses divers aspects.

Chaque chrétien doit le copier selon sa vocation. J.-C. homme est la plus admirable copie de la Trinité, et les saints sont la copie de J.-C. De là un niveau supérieur que n’atteindront jamais les singes montés sur les plus grands cocotiers, ni leur fils non plus, eussent-ils escaladé la plus haute chaire de science moderne; parce que ni les singes, ni leurs descendants ne comprendront rien à sa grandeur morale. Or, la sainteté est la grandeur morale élevée à son plus haut point.

Qu’est-ce que la grandeur morale? demandera un singe évolué. Ce que c’est? Ce à quoi vous ne comprendrez jamais rien; inutile de vous l’expliquer, j’y renonce. Pourtant l’enfant baptisé, dès qu’il peut savoir quelques lignes de catéchisme, le comprend, et c’est ce qui constitue la différence entre ce petit livre et ceux des singes modernes.

Voilà pourquoi encore on ne veut plus de catéchisme dans les écoles. Il en dit trop, et les savants modernes veulent pouvoir débiter sans contrôle toutes leurs singeries, dont le catéchisme foudroie sans y faire attention toutes les insanités.

Cependant, si nous sommes condamnés à avoir une certaine famille de singes, nous sommes assurés d’avoir toujours des saints, appliquons-nous à le devenir: cela s’opère après la grâce de Dieu par un acte très intelligent de la volonté.

Un jour viendra où tous sauront ce qu’il aura mieux valu avoir été, un singe, transformé ou un saint copie vivante de Jésus-Christ.

Le Transformisme.

Correction Paternelle

-Ah! petit d’ôle, tu veux être mieux que tes parents!.

La Chandelle de la Chandeleur.

Son oncle d’Hendecourt état venu gouverner la ferme.

Et lorsque sa douleur fut calmée, Gillette se souvint de la vieille chandelle de la Chandeleur, et ce souvenir l’obséda.

Certes elle ne voulait point l’allumer, mais la revoir. Elle aimait à se rappeler tous les détails étranges de la scène qui avait eu lieu dix ans auparavant, l’apparition de l’homme au manteau rouge et la chambre comble de jouets.

Un soir la curiosité l’emporta sur la raison, et la fille d’Eve, tremblante comme la feuille, tira l’étui, ouvrit… mais sur-le-champ, honteuse de sa curiosité, elle referma. Il lui sembla qu’elle avait revu l’image du démon.

Le lendemain elle tremblait moins quand elle recommença et osa regarder longtemps la vieille circ jaune. Elle lui sembla bien longue; un tiers à peine en était usé…..

Mais elle résolut de ne jamais l’allumer, de la regarder seulement bien souvent; elle n’y manquait pas quand elle était seule.

Enfin, enfin, un jour pour un moment, poussée par la tentation, elle battit le briquet, approcha le feu de la mèche…..

Beelzébuth parut.

-Que voulez-vous, belle enfant?

-Rien, je ne t’ai point appelé, va-t’en! et elle soufflait précipitamment le cierge bénit dont sa curiosité transformait la lumière bienfaisante en un moyen de perdition.

Les choses saintes ne servent que dans l’ordre voulu, et si on les emploie pour le mal, elles tournent leur action contre le pécheur.

La chandelle éteinte, Beelzébuth disparut. La pauvre mère pleurait dans le purgatoire et aurait voulu expier la faute de sa fille.

La duchesse de l’Ecluse arriva en son château et on donna un bal sur la place.

Le deuil de Gillette finissait, elle vint au bal et mit ses plus beaux habits.

Mais la fille du mayeur en avait de bien plus beaux, il ne fut bruit dans le village que de cette toilette incomparable de la fille du mayeur. Gillette en fut jalouse.

Le dimanche suivant, on aurait pu la voir debout avant l’aurore; elle ne faisait ni sa prière ni sa méditation, et ne se préparait point à la messe; elle songeait au bal et aux habits qu’elle y porterait; cette pensée l’avait empêchée de dormir toute la nuit; elle ouvrit l’étui, approcha le brûlin et alluma la chandelle.

-Que souhaitez-vous, belle fille? dit Beelzébuth se montrant aussitôt.

-Une robe plus belle que…..

-Je comprends, je l’ai apportée, la voici.

-Bien! va-t’en, dit précipitamment Gillette; bourrelée de remords, elle éteignit la lumière; l’esprit du mal obéit et il était sûr dès lors de son fait.

Cependant, c’est à peine si la circ avait brûlé une seconde, et Gillette calcula qu’elle pourrait ainsi durer longtemps.

Sa robe lui seyait à ravir. Elle éclipsa tout le monde au bal sur la place et elle se crut parfaitement heureuse en rentrant au milieu d’un murmure d’admiration…

En se déshabillant, elle sentit qu’une goutte d’eau lui était tombée sur la main.

C’était une larme de sa mère que les anges avaient apportée.

Notes et post-scriptum