TEXTES DIVERS EDITES

Informations générales
  • TEXTES DIVERS EDITES
  • DISCOURS DU T.R.P. D'ALZON.
    [ASSEMBLEE GENERALE DES COMITES CATHOLIQUES DE FRANCE]
  • Assemblée Générale des Comités Catholiques de France, (7, 8, 9, 10 et 11 Avril 1874.) Paris, Bureau du Comité Catholique de Paris, 1874, P. 108-120.
Informations détaillées
  • 1 ADVERSAIRES
    1 AME
    1 APOSTOLAT DE LA VERITE
    1 APOTRES
    1 ART DE LA MEDECINE
    1 ATHEISME
    1 AUTORITE DIVINE
    1 AUTORITES REPUBLICAINES
    1 BACCALAUREAT
    1 BRANCHES DE L'ENSEIGNEMENT
    1 CANDIDATS AU BACCALAUREAT
    1 CAUSE DE L'EGLISE
    1 CHATIMENT DU PECHE
    1 CIEL
    1 CLASSES SCOLAIRES
    1 COMITES CATHOLIQUES
    1 CONCILE DE TRENTE
    1 CONCILE DU VATICAN
    1 CONGRES CATHOLIQUES
    1 CONSCIENCE MORALE
    1 DEFENSE DE L'EGLISE
    1 DIEU
    1 DIVINITE DE JESUS-CHRIST
    1 DOCTRINE CATHOLIQUE
    1 DOGME
    1 DROITS DE L'HOMME
    1 EGLISE ET ETAT
    1 ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE
    1 ENSEIGNEMENT DE LA VERITE
    1 ENSEIGNEMENT DES SCIENCES
    1 ENSEIGNEMENT OFFICIEL
    1 ENSEIGNEMENT PRIMAIRE
    1 ENSEIGNEMENT PROFANE
    1 ENSEIGNEMENT SUPERIEUR
    1 EVANGILE DE JESUS-CHRIST
    1 EVEQUE
    1 EXAMENS SCOLAIRES
    1 FACULTES CATHOLIQUES
    1 FACULTES DE THEOLOGIE
    1 FOI
    1 FORMATION DES AMES DES ELEVES
    1 GRADES UNIVERSITAIRES
    1 HERESIE
    1 IDEES REVOLUTIONNAIRES
    1 INDEPENDANCE CATHOLIQUE
    1 INFAILLIBILITE PONTIFICALE
    1 INSTRUCTION RELIGIEUSE
    1 INTELLIGENCE
    1 LEGISLATION
    1 LIBERTE DE CONSCIENCE
    1 LIBERTE DE L'ENSEIGNEMENT
    1 LIBRE PENSEE
    1 LOI DIVINE
    1 LUTTE ENTRE L'EGLISE ET LA REVOLUTION
    1 MAITRES
    1 MAITRES CHRETIENS
    1 MALADES
    1 MARTYRS
    1 MATERIALISME
    1 MEDECIN
    1 MORALE
    1 MORT
    1 NATURE
    1 PAPE
    1 PASSION DE JESUS-CHRIST
    1 PECHE ORIGINEL
    1 PRIMAUTE DU PAPE
    1 RELIGIEUX ENSEIGNANTS
    1 SAGESSE DE DIEU
    1 SATAN
    1 UNIVERSITES CATHOLIQUES
    1 UNIVERSITES D'ETAT
    1 VERBE INCARNE
    1 VERITE
    2 BESSON, LOUIS
    2 CLOVIS
    2 JEROME, SAINT
    2 PAUL, SAINT
    2 PILATE
    3 FRANCE
    3 JERUSALEM, GOLGOTHA
    3 ROME, VATICAN
  • 8 avril 1874
  • Paris
La lettre

Messeigneurs, Messieurs,

Remercions tout d’abord les orateurs qui, hier et aujourd’hui, ont considéré à son point de vue général le sujet qui nous occupe. Ma tâche en est abrégée d’autant, et je n’ai plus qu’à vous présenter quelques rapides aperçus sur une question particulière, question cependant qui a son importance, puisqu’il s’agit d’examiner les motifs pour lesquels nous devons solliciter l’établissement d’un enseignement supérieur, et, pour m’emparer des termes mêmes du programme: « Sur quel terrain les catholiques doivent se placer pour revendiquer la liberté de cet enseignement. »

Sur quel terrain devons-nous nous placer? Mais, Messieurs, tout simplement sur le terrain catholique; seulement, ma pensée doit être précédée de deux observations: l’une relative à la liberté des cultes; l’autre relative à la liberté de conscience.

Nous sommes placés en face de l’Etat, qui, au nom de la liberté des cultes nous refuse la liberté de l’enseignement supérieur. L’Etat respecte, mais sans les reconnaître, les principes catholiques; il tient à ce que l’on s’en passe dans l’enseignement supérieur, sans songer que cette liberté même implique, comme une de ses conditions essentielles, la création de l’enseignement supérieur catholique.

On disait tout-à-l’heure: L’enseignement de l’Eglise a sa raison d’être dans ces paroles de Jésus-Christ: « Allez, enseignez les nations. » Oui il faut qu’elle aille, il faut qu’elle enseigne, et qu’elle enseigne librement; il faut, puisque seule elle a reçu des paroles d’infaillibilité, qu’elle ait le droit de fixer la limite à laquelle elle doit s’arrêter. Toutes les fois qu’une branche des sciences se présente à la pensée humaine, et que l’Eglise, en face de cette science plus ou moins éloignée, en apparence, de son enseignement, viendra dire: « Ceci m’appartient, ceci est mon domaine, » au nom de l’infaillibilité de l’Eglise, ceci sera de son domaines. Je ne sache pas, en fait de propriété intellectuelle, un droit supérieur à celui de l’institution qui a reçu de Dieu, non pas le droit seulement, mais l’obligation d’enseigner.

Dès lors, vous comprenez qu’en face de la liberté des cultes, et, au nom de cette liberté, nous devons demander l’enseignement supérieur libre le plus complet.

L’Eglise dépositaire de la vérité a, sans doute, avant tout, le droit d’enseigner la vérité religieuse; mais de même que plusieurs grands révolutionnaires n’ont pas craint d’affirmer qu’il n’y a pas une seule question politique qui n’ait pour base une question religieuse, de même je dis qu’il n’y a pas de problème scientifique qui n’ait pour base un problème ou pour mieux dire un dogme religieux. (Très-bien! Très-bien!) Je demande pour l’Eglise le droit d’enseigner ses dogmes, et les sciences où elle peut porter comme l’écoulement de ses dogmes.

La seconde considération qui se présente, par rapport à ceux que j’appellerai avec tristesse nos adversaires, est relative à la liberté de conscience.

Mais cette liberté de conscience elle nous appartient à nous avant tout. Pourquoi? Parce que, si la conscience est quelque chose, elle ne l’est que par l’Eglise catholique. La liberté de conscience de nos adversaires est si grande qu’elle va jusqu’à n’avoir pas de conscience, et je le prouve: Comment pouvez-vous supposer l’existence de la conscience sans admettre l’existence de l’âme qui en est le trône, et l’existence de Dieu qui en est le juge parce qu’il en est l’auteur? Or, vous savez toutes les protestations qui se sont produites contre la réalité de la partie intellectuelle de l’homme. Comment voulez-vous que la conscience subsiste si vous supprimez Dieu, qui, par les peines ou les récompenses, lui donne sa sanction nécessaire? Pour les catholiques, la conscience repose sur ces trois faits: L’existence de l’âme qui est le sujet de la conscience, la loi divine qui en est la règle, et Dieu, qui en donne la sanction. Alors seulement je comprends ce que c’est que la conscience. La conscience étant, après tout, une chose humaine, peut être faussée; mais la loi de Dieu est là. Comme il y a quelque chose de corrompu dans la nature humaine, il faut quelque chose qui la redresse par la crainte du châtiment et l’espoir de la récompense. Sans la notion de Dieu rien de tout cela n’est possible.

Je suis resté jusqu’à présent dans l’ordre naturel; j’avance et je demande où l’on a jamais trouvé dans le monde une plus exacte analyse de la conscience que dans la morale catholique? Où avez-vous rencontré ces saintes délicatesses de la conscience comme dans l’Eglise et ses enseignements?

C’est donc au nom de la conscience que nous réclamons pour l’Eglise catholique le droit de la façonner, en proclamant les grandes vérités qui sont la base de la loi religieuse.

Quand une fois nous avons montré ces lois, alors nous pouvons pénétrer dans le coeur humain et le former. Ce qu’il y a de plus triste, c’est qu’aujourd’hui nous voyons des hommes qui parlent beaucoup de conscience et qui ne font que travailler à sa destruction par la négation de l’âme et par la négation de Dieu. (Très-bien! Très-bien!)

Nous allons donc nous placer d’abord sur le terrain catholique.

Enfin, Messieurs, nous sommes bien quelque chose dans la France, nous autres catholiques!… Et si nous sommes quelque chose comme catholiques, nous avons bien le droit de réclamer ce qui nous est nécessaire; nous avons le droit, nous qui avons le dépôt de la vérité, d’en demander la plénitude. Le monde chrétien se partage en deux espèces d’intelligences:

Celles qui craignent qu’on leur impose une vérité trop lourde, et celles qui en demandent la plénitude.

Aux catholiques du premier ordre je dirai: S’il est certain que la vérité soit la nourriture de l’intelligence, si l’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole sortie de la bouche de Dieu, il est incontestable que plus l’homme aura de vérité, plus il deviendra intelligent; cette manne, tombée du ciel, lui donnera un développement intellectuel qui le fera participer a toutes les communications que Dieu daignera lui faire. Or, comme pour nous, catholiques, Dieu n’a parlé à l’homme, depuis Jésus-Christ, que par son Eglise, c’est à l’Eglise que nous devons nous adresser avant tout pour avoir la vérité. Mais la vérité n’est pas quelque chose d’éparpillé; ce n’est pas un assemblage de propositions plus ou moins cohérentes, la vérité, c’est Dieu: « Ego sum veritas, » a dit Notre-Seigneur Jésus- Christ. C’est pourquoi il faut demander avant tout que l’Eglise ait le droit d’imprégner toute chose de la vérité divine, parce qu’alors nous donnerons à l’enseignement un cachet divin. Enfin, lorsque je considère cette mission de l’Eglise, et le droit, je devrais dire l’obligation rigoureuse qu’elle a d’enseigner, car il ne lui est pas permis de ne pas prêcher la vérité; lorsque j’examine la source de ce droit, de cette obligation, je me représente le prétoire où le Fils de Dieu fait homme se trouve en face du représentant du peuple alors le plus puissant du monde; je me représente cet homme écrasé sous le poids de ses douleurs et de la haine de tout un peuple et proclamant à la face du monde cette grande vérité: Ego in hoc natus sum, et ad hoc veni in mundum ut testimonium perhibeam veritati. Je suis venu dans ce monde pour rendre témoignage à la vérité. On le crucifie, et c’est de son côté ouvert que naît l’Eglise: Le berceau de l’Eglise est au Calvaire. Pendant trois siècles, douze millions de martyrs sont encore les grands témoins de la vérité, et chacun d’eux, en livrant son corps aubûcher ou sa tête au bourreau, répétait comme Jésus- Christ: Ma destinée, la voici: Je suis né et je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité. Et du haut de ce trône infaillible dont vous compterez les marches en comptant les pierres sépulcrales de tant de Papes morts pour rendre à la vérité ce glorieux témoignage, vous entendez encore le Pontife, captif au Vatican, en face des Pilates des temps modernes qui lui disent: Qu’est-ce que la vérité? Vous l’entendez encore répondre: Voici la raison de mon existence, voici la raison de l’existence de la papauté; Ego in hoc natus sum et ad hoc reni in mundum, ut testimonium perhibeam veritati. (Applaudissements unanimes).

Si la vérité repose sur de telles bases, elle a le droit de se faire connaître; si la vérité a cette source divine, elle a le droit de choisir les manifestations qui lui conviennent et qu’elle croit lui être plus favorables. La vérité est prêchée par les Apôtres et par les Martyrs; la vérité est prêchée par les évêques unis au Pape, établis pour la défense de l’Eglise de Dieu; cela est évident. Mais cela suffit-il?

Non, il faut qu’elle se manifeste dans le monde; il faut quelle paraisse; et elle paraîtra par les moyens qu’elle jugera à propos d’employer. Et puisque aujourd’hui le sentiment général c’est la nécessité d’un enseignement supérieur, je dis que l’Eglise a le droit de prendre cet enseignement supérieur, et elle le prendra, en reformant de nouveau ces grandes institutions qui jetteront tant de lumières dans le cours des siècles chrétiens.

Ici, je demande la permission de vous faire une rapide analyse de ce que j’entends par les Universités catholiques, les sanctuaires de l’enseignement supérieur.

Ces universités se divisent en trois catégories:

Les Facultés de théologie.

Les Facultés de lettres et de sciences.

Les Facultés de médecine et de droit.

Quant aux Facultés de théologie, je n’aurais, pour ainsi dire, rien à vous exposer, si je n’avais à vous montrer leur opportunité spéciale dans les temps modernes, lorsque le Concile du Vatican aura eu le temps de commencer à prendre son épanouissement dogmatique. Certes, je touche à de graves questions; en face des ténèbres qui se faisaient de toutes parts, il fallait des lumières plus abondantes, il en fallait même pour l’enseignement populaire, car plus l’enseignement des maîtres sera élevé, plus aussi s’élèvera l’enseignement d’en-bas. Il est donc nécessaire de favoriser, autant que possible, le développement de l’enseignement supérieur.

N’oublions pas que, si NN.SS. les évêques sont chargés de préparer ces Facultés, comme le couronnement de ces Facultés c’est de créer des docteurs, et que le titre de docteur donne le droit d’enseigner dans toute l’Eglise de Dieu, il n’y a que le Souverain-Pontife qui puisse donner la puissance de conférer un titre pareil. C’est encore par là qu’il faut revenir à la chaire infaillible. Or, sans revenir sur les discussions du passé, vous savez qu’il y a eu des opinions différentes; il n’y en a plus qu’une aujourd’hui; la soumission a été d’autant plus admirable qu’elle a été plus complète, et, dans la soumission de ceux qui n’étaient pas de la majorité, nous avons vu d’immenses sacrifices, que nous ne saurions trop bénir…..(Vifs applaudissements.)

Mais la vérité est restée là; elle est restée là avec le Pontife infaillible, et vous comprenez que le souverain pontificat, qui n’a pas reçu de privilèges pour lui, mais pour les autres, tout en gardant son infaillibilité dont il ne peut se départir, la communique cependant à un certain degré; et, dans tous les cas, il protège, avec sa surveillance, l’enseignement supérieur des Facultés de théologie catholique.

Voilà pour la théologie proprement dite.

Mais permettez-moi de remonter ans cette constitution de l’Eglise, et, du chapitre IV, de passer au chapitre III, où la juridiction du Pontife souverain est établie, et d’en tirer, avec le Concile de Trente, cette salutaire réflexion que l’enseignement qui vient de là est plus fécond dans ces facultés de théologie.

Les simples fidèles doivent concourir à l’établissement de ces facultés par un concours matériel; ils doivent favoriser l’indépendance des maîtres par leurs générosités, et subvenir à leurs besoins, mais ils n’ont pas à aller au- delà.

Quant aux Facultés de lettres et de sciences qui forment la seconde catégorie des Universités, M. l’abbé Besson en parlera; je ne veux toucher qu’un point à cet égard, le baccalauréat. Pour les catholiques, l’avantage spécial de l’enseignement supérieur sera le programme du baccalauréat. Pourquoi? Parce que c’est là une question suprême: aurons-nous le privilège de faire des programmes du baccalauréat aussitôt que l’enseignement de nos facultés sera complet?

Permettez à un ancien maître d’école de vous faire quelques observations sur ces programmes. Je fais appels à tous ceux de mes collègues des comités qui ont enseigné; je suis sûr de n’être démenti par aucun d’eux quand je dirai que le grand obstacle à l’enseignement religieux, ce sont les appproches, ce sont les affres et les programmes du baccalauréat.

(C’est vrai! c’est vrai!)

Quand on vient dire à un jeune homme, à la veille de son examen du baccalauréat: Mon ami, il faut vous occuper d’instruction religieuse; quelle impatience contre son maître qui vient le distraire de sa préparation et lui prendre plusieurs heures pour l’occuper d’autre chose que de son examen! On ne peut pas aller contre la nature humaine. L’élève qui veut être bachelier, fût-il le plus pieux, quand il se prépare aux épreuves du baccalauréat, s’impatientera contre tout enseignement qu’il regarde comme supplémentaire; certains élèves iront jusqu’à le maudire. L’enseignement religieux sera donc sacrifié; il en restera à peine la centième partie.

On a demandé deux examens du baccalauréat; j’en voudrais trois; le premier, après les classes de grammaires; le second, après les classes d’humanités; le troisième -si nous avons un enseignement catholique- après la philosophie. Mais il faut savoir se borner dans ses désirs.

D’ailleurs, messieurs, avec des professeurs tels que ceux que nous sommes obligés d’accepter dans les chaires de l’Etat, avec de tels examinateurs, -Dieu me préserve d’aucune allusion personnelle; j’ai pour mon compte des actions de grâces à rendre aux examinateurs qui ont passer les épreuves du baccalauréat à des élèves auxquels je m’intéressais spécialement; -il n’en est pas moins vrai qu’il y a, dans l’Université de France, liberté complète de culte et de conscience. Or, je vous demande où est la loi qui me garantira que jamais un maître libre-penseur ne sera troublé par les réponses d’un élève chrétien. Cette loi, depuis trente ans je la cherche, je ne l’ai pas trouvés.

Donc, il nous faut nos programmes; et, pour faire subir les examens de nos programmes religieux, il faut des maîtres religieux. Il nous faut nos examinateurs à nous; des examinateurs honorables, qui marchent sur le même rang que les examinateurs de l’Etat. Les examinateurs de l’Etat sont des professeurs de Facultés de sciences ou de lettres; donc, pour nos examens de baccalauréat, il nous faut des professeurs de nos Facultés de sciences ou de lettres.

J’arrive à la dernière catégorie; je veux parler de l’enseignement du droit et de la médecine.

Ce n’est pas tout d’avoir passé un certain nombre d’années dans un collège; il faut prendre une carrière. Or, sauf certaines carrières spéciales, l’école Polytechnique, l’école Saint-Cyr, l’école Forestière il y a deux facultés principales qui président aux destinées des jeunes gens: la Faculté de médecine et la Faculté de droit. Eh bien! dans la Faculté de médecine, voulez-vous que nous acceptions que la loi éternelle soit méconnue? Que les jeunes étudiants chrétiens qui se destinent à soigner et guérir les malades soient formés par des hommes qui disent: Dieu est une hypothèse dont la science n’a pas besoin? Voulez-vous qu’ils soient formés par des hommes qui ne considèrent dans l’homme qu’un certain organisme? C’est impossible. Et l’âme, comment sera-t-elle respectée? Pour nous, chrétiens, qui avons la foi, nous savons que ce n’est pas tout de vivre, et, que l’important, c’est de bien mourir, nous voulons des médecins qui traitent les malades comme doivent être traités les chrétiens; c’est-à-dire qu’après avoir indiqué les remèdes pour le corps, on s’occupe de l’âme prête à paraître devant Dieu. Il nous fut donc des médecins chrétiens, et des faculté chrétiennes de médecine.

Je dirai la même chose des Facultés de droit.

Le droit est un ensemble de lois dont l’Eglise ne s’occupe pas et qu’en général elle suppose bonnes. Saint Paul a dit: Le prince est le ministre de Dieu pour le bien, Minister Dei in bonum. L’Eglise suppose qu’on fera des lois pour le bien; mais quand on vient attaquer le principe même de la loi, ceci vaut la peine qu’on y réfléchisse. Or, qui de vous ignore qu’aujourd’hui il y a une grande lutte entre la foi catholique qui dit que tout pouvoir vient de Dieu, et la croyance des libres-penseurs, qui dit que toute vérité part d’en-bas, que toute autorité part de l’homme. C’est la lutte entre Satan et Jésus-Christ; sauf qu’il ne s’agit plus du divin Maître, mais de ses disciples. C’est la répétition de la grande tentation: Haec omnia tibi dabo si eadens adoraveris me. Satan est satisfait quand Dieu n’est plus traité comme la source du pouvoir. Qu’on adore l’homme dans les lois, c’est tout un principe pour lui; il n’en demande pas davantage. La source du droit est profanée et cette grande chose qui n’était qu’un écoulement divin dans son essence, est mise à l’écart; elle a cessé d’être la puissance du Verbe, tout cela est méconnu. Il y a quelques années on attaquait l’existence de Dieu en criant: A bas Dieu, vive l’enfer! On fait plus aujourd’hui, selon l’expression d’un philosophe fameux: On tire son chapeau et on passe.

Voilà quelques-unes des considérations que je voulais vous présenter..On s’est demandé s’il fallait faire une pétition; je serais de cet avis. Une des commissions de l’enseignement est chargés de préparer un travail dans ce sens et de formuler les résolutions à prendre.

Les bases de ce travail, je puis les indiquer, les voici:

Le droit d’avoir un baccalauréat pour les catholiques;

Le droit d’avoir des Facultés de médecine et de droit;

Le droit de former des personnes civiles, de certaines associations;

Le droit de posséder.

Car si, comme je le disais tout-à-l’heure, l’homme ne vit pas seulement de pain, il faut pourtant qu’il ait du pain; il faut, par conséquent, que nos Facultés aient le droit de posséder. Et, quant à moi, la forme de pétition me paraît d’autant plus désirable, que cette demande, présentée énergiquement à l’Assemblée, serait la prise de possession, par les catholiques, de leur place spéciale au point de vue de la vérité.

Je termine en vous rappelant que toutes les nations du monde vivent par une pensée qui leur est propre. La France a été une époque où l’arianisme dominait à tel point, que saint Jérome assurait que le monde se réveilla étonné d’être arien.

Clovis vint; éclairé par Jésus-Christ, il fonda la France; il la fonda par une alliance entre elle et le Fils de Dieu. La raison d’être de la France a été d’être le soldat de l’Homme-Dieu, et sa gloire pendant plusieurs siècles, a été comme un rejaillissement de la splendeur du Verbe fait homme; elle s’est vouée à Jésus-Christ, et Jésus-Christ la comblée d’honneur. Eh bien! la France a oublié un instant son rôle glorieux, sa destinée, sa tradition; il faut la lui rendre grande, pure, féconde, en proclamant encore la divinité de Notre-Seigneur Jésus-Christ, en la proclamant comme vérité éternelle par l’enseignement dans ce qu’il peut communiquer de plus élevé et de plus fécond aux intelligences apauvries. Le jour où ils auront repris notre antique mission, les catholiques auront ressuscité la France, et Dieu leur accordera ce bienfait d’être les véritables sauveurs de la patrie! (Applaudissements prolongés.)

Notes et post-scriptum