OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|SUJETS DE MEDITATIONS POUR LE TEMPS ENTRE LE 14 JANVIER ET LA SEPTUAGESIME

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|SUJETS DE MEDITATIONS POUR LE TEMPS ENTRE LE 14 JANVIER ET LA SEPTUAGESIME
  • LUTTE CONTRE SOI-MEME
  • Méditations sur la Perfection Religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 107-110.
  • CO 4
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 LUTTE CONTRE LE CORPS
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    1 REFORME DU CARACTERE
    1 REFORME DU COEUR
  • 1875
La lettre

Militia est vita hominis super terram(1). Ma vie est une lutte perpétuelle. -Outre les ennemis du dehors, j’ai en moi quatre ennemis principaux: 1° mon tempérament; 2° mes sens; 3° mes passions; 4° mon caractère.

I. Le tempérament.

Oui, Dieu a mis mon âme dans une sorte de prison. Mon corps, sa constitution influent sur une foule d’aptitudes. Je suis vif ou mou, emporté ou endormi, impatient ou calme, selon que prédomine en moi un peu plus de sang ou de lymphe, un peu plus de bile ou de nerfs. C’est humiliant, c’est une étrange misère, mais c’est ainsi. Toutefois, ces obstacles à ma sanctification peuvent tourner à une perfection plus grande si je sais les dominer. Le tempérament, la partie la plus grossière de mon être, peut très bien s’assouplir si je sais le vouloir. Il s’agit seulement que je veuille.

II. Les sens.

J’en dirai de même des sens. Ils me tirent au dehors tant qu’ils peuvent. Mes oreilles sont avides d’entendre, mes yeux de voir; je me répands avec transport dans le monde extérieur, j’y cherche la jouissance, j’y cherche le plaisir, souvent le plaisir défendu, la pâture à mon amour-propre, l’abaissement des idées supérieures dont je devrais me nourrir. Quand les sens ne seraient pour moi qu’un principe de légèreté, de distraction, ce serait déjà trop pour la noblesse de ma destinée, mais ils m’entraînent bien plus loin, et dans combien de circonstances n’ai-je pas senti l’homme animal tyranniser l’homme spirituel, aller jusqu’à lui donner la mort? Chose triste: ce qui se rapproche de Dieu devient, par le despotisme de mes sens, l’esclave d’un peu de matière sensible. Quand les sens redeviendront-ils esclaves? Quand mon âme reprendra-t-elle son rôle de reine?

III. Les passions.

Hélas! j’en connais la puissance et la tyrannie plus cruelle encore que celle des sens. Pourquoi suis-je colère, sombre, haineux, jaloux, vaniteux, avare, plein d’orgueil? N’ai-je pas détesté souvent chez les autres ces défauts et les passions qui en sont la source? Je sens un feu qui me consume; j’en rougis, j’en souffre, et pourtant je m’y complais. Contradiction inexplicable, excepté par la dégradation originelle. Je suis emporté en tous sens, je sens que je vais à l’abîme, je vois ma perte assurée et j’y cours. N’aurai-je jamais la force de rompre tant de chaînes que les passions m’imposent et de reconquérir une bonne fois ma liberté? Que de fois je l’ai voulu! Que de fois j’ai essayé! Que de fois j’ai été sur le point de vaincre! Que de fois j’ai été vaincu! Où en suis-je aujourd’hui? Suis-je esclave de mes passions? Sont-elles mes esclaves? ou plutôt d’utiles instruments dont je me défie, mais qui, bien employés, peuvent m’aider aux plus excellentes choses? Pourquoi ai-je des passions? et pourtant, si je n’en avais pas, de quoi serai-je capable? Cruelle alternative! rien de dangereux comme mes passions; rien d’utile comme les passions vaincues, purifiées, sanctifiées.

Mon Dieu, faites que, maître de mes passions, je ne les emploie qu’à votre service!

IV. Le caractère.

Ce que le tempérament est à mon corps, le caractère l’est à mon âme. C’est un ennemi plus noble, mais plus fort. Sa supériorité accroît le danger de ses assauts. Où ne m’a pas emporté mon caractère? A mesure qu’il subit l’influence du temps, il acquiert des raideurs, des exigences, il subit des décadences, il se décompose en quelque sorte pour me faire souffrir et faire souffrir les autres.

Mon Dieu, courbez mon caractère sous votre volonté, et que tous ses défauts se transforment par la grâce de celui que l’Apôtre appelle le caractère, la forme de votre substance(2). Qu’à l’imitation de votre Fils je grave en moi ce par quoi je vous ressemblerai selon mon néant, et que mon caractère soit ainsi l’image de vos perfections!

Notes et post-scriptum
2. Le texte auquel le P. d'Alzon fait allusion se trouve dans l'Epître aux Hébreux, I, 3, où il est dit du Fils de Dieu qu'il est l'empreinte de la substance du Père: *Qui cum sit...figura substantiae eius*. Le grec porte: (mots grecs). C'est du texte grec que s'inspire la traduction du Père.1. "La vie de l'homme sur la terre est celle du soldat." (Iob. VII, 1.)