OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE TEMPS DE LA SEPTUAGESIME

• OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE TEMPS DE LA SEPTUAGESIME
• SEMAINE DE LA SEXAGESIME
  NOE ET L'ARCHE.
• Méditations sur la Perfection Religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, 1925, p. 178-180.
• CO 5

• 1 APOSTOLAT DES RELIGIEUX
  1 EGLISE
  1 FIDELITE A L'ESPRIT DE LA REGLE
  1 INCARNATION DE JESUS-CHRIST
  1 MISERICORDE DE DIEU
  1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
  1 SEPTUAGESIME
  1 SOLITUDE
  1 VERTUS RELIGIEUSES
  2 NOE
• 1875

Pourquoi Jésus-Christ est-il resté quatre mille ans avant de paraître? Et pourquoi Noé est-il resté cent ans à construire l’arche? Pourquoi. Parce que Jésus-Christ voulait faire sentir davantage les bienfaits de sa venue, comme Dieu voulait donner, par la construction de l’arche, un temps de miséricorde dont les hommes ne profitèrent pas.

Pour moi, laissant de côté le mystère de l’arche considérée comme figure de l’Eglise, j’y veux envisager un grand enseignement de la vie religieuse.

I. Qui ne crie pas contre la vie de séparation menée par les religieux? Qui ne s’étonne pas qu’il leur faille le silence, la solitude, le cloître? Pourtant, rien de plus utile. Là se brisent certains liens, là l’esprit se retrempe et répare les affaiblissements de la dissipation. Là de vains bruits viennent expirer, les passions s’apaisent. Dehors, à certains moments, les plus grands périls, la mort. Les hommes qui voyaient Noé construire ce grand édifice en bois le tournaient en dérision; ils se croyaient les plus intelligents, les plus habiles, et ils se trompaient. Leur sagesse fut courte, en face de l’obéissance de Noé. De même, que d’hommes [haussent] les épaules en passant devant un couvent! Encore, si l’on se contentait d’en rire, mais on veut les démolir, et dans tous les cas les voler. Pourtant, quand on n’envisagerait que le bien des habitants d’un monastère, quel précieux résultat n’obtiendrait-on pas en maintenant les couvents; que d’existences dangereuses y trouvent le repos. Mais ce n’est pas ce que je veux envisager ici, je préfère m’arrêter à la liberté qu’y trouvent les âmes de se porter à la perfection.

Ah! Seigneur, soyez béni de m’avoir appelé à la vie religieuse, à la vie du couvent où, comme dans l’arche, je suis à l’abri des eaux, de l’abîme, des cataractes du ciel et des affreux orages que le vent de votre colère pousse contre les plus hautes montagnes, pour submerger jusqu’au dernier des hommes coupables et révoltés contre vous.

II. Noé ne resta pas toujours dans l’arche. A l’heure fixée de Dieu il en sortit pour aller repeupler la terre avec sa famille. De même, le religieux de l’Assomption ne doit pas, comme les anachorètes, rester toujours loin des hommes. Il doit même revenir quelquefois au milieu d’eux pour repeupler le monde de chrétiens; mais tout cela doit se faire dans l’ordre et l’obéissance. Et comme le Saint-Esprit nous dit qu’il y a un temps de se taire et un temps de parler, le religieux ne doit jamais oublier que si, comme apôtre, il doit parler souvent, comme homme de règle il doit se recueillir, se taire, et pour cela se cacher dans son arche.

Merci, mon Dieu, d’avoir ainsi distribué ma vie, que tantôt dans votre asile je puisse me sanctifier, et ensuite en sortir pour aller vers les hommes et leur faire de votre part le bien que vous leur voulez procurer par mon ministère.

A moi de savoir me taire et de savoir parler, selon qu’il conviendra au bien de mon âme et au bien de mes frères.