OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE CAREME

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE CAREME
  • LUNDI DE LA PREMIERE SEMAINE DE CAREME
    [SUR L'EVANGILE DE LA FERIE: Matth. XXV, 31-36]
  • Méditations sur la Perfection Religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 203-205.
  • CO 6-7
Informations détaillées
  • 1 APOSTOLAT DE LA CHARITE
    1 AUMONE
    1 CAREME
    1 CHARITE ENVERS DIEU
    1 CHARITE ENVERS LE PROCHAIN
    1 FINS DERNIERES
    1 JUGEMENT DERNIER
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    2 MATTHIEU, SAINT
    3 JERUSALEM
  • 1875
La lettre

I. Jésus-Christ veut nous donner un détail du jugement dernier, et, après nous avoir montré la séparation des bons d’avec les méchants il semble ne faire porter le poids de la sentence favorable ou de la damnation que sur l’observation ou la violation de la grande loi de la charité. Jésus-Christ n’oublie les intérêts de son Père que pour pouvoir s’occuper mieux de ceux du prochain. Et dans les récompenses qu’il accorde, dans le feu éternel auquel il condamne, il ne parle que des soulagements apportés aux misères des pauvres. Grande leçon, et dans laquelle il importe d’examiner comment on peut faire l’aumône et jusqu’où doit s’étendre le sacrifice du superflu; car, d’une part, je ne puis pas soulager tous les pauvres, toujours il y en aura que je n’aurai pas nourris, abreuvés, vêtus, visités. D’autre part, il y a bien peu d’hommes qui n’aient pas fait quelque bonne oeuvre dans leur vie. Aussi la question doit se poser ainsi: Ai-je fait ce que j’ai pu? Ah! si nous avons fait ce que nous avons pu, restons tranquilles. Mais en cette matière, qui fait de bonne foi ce qu’il peut, et les religieux eux-mêmes font-ils toujours tout ce qu’ils peuvent?

Peut-être la question pratique peut-elle être tranchée ainsi: j’aimerai mon prochain comme moi-même pour l’amour de Dieu, et je m’efforcerai de lui montrer mon amour autant qu’il dépendra de moi. Je ne dirai pas: Je ne suis tenu qu’à cela, mais je dirai: Puis-je aller dans la charité autant que mon coeur le désire? Or, quand je désire sincèrement faire la charité, j’en viens incontestablement à bout en une foule de circonstances. Ce que Dieu me demande, c’est de lui donner, dans la mesure du possible, dans la personne des pauvres, ses représentants, et de ne pas écouter le coupable égoïsme qui, au nom soit du bien-être, soit de la prudence, refuse de donner quand il le pourrait.

II. Mais quand il est question du supplice éternel et de la vie éternelle, il est difficile de penser que notre divin Maître n’ait voulu songer qu’aux corps seulement et à la charité qui leur est faite. Sous ces corps, la foi me montre des âmes. Elles aussi ont faim de vérité et soif de justice. Qui les nourrit? Qui les abreuve? Terrible question que celle-là. Et quand je vois des laïques, de simples chrétiens s’occuper de l’évangélisation des classes ouvrières, je me demande si toutes les oeuvres qu’ils fondent, quel qu’en soit le succès, ne sont pas une accusation contre les prêtres et les religieux qui ne se consument pas en un travail apostolique qui ramènerait les foules. Mais on n’a pas le temps pour ces pauvres délaissés, et ils paraissent comme les enfants de Jérusalem de qui le prophète disait: Parvuli petierunt panem et non erat qui frangeret eis(1).

Seigneur, donnez-moi un grand zèle pour soulager les pauvres, mais surtout pour nourrir leurs âmes. A ce point de vue, les déshérités des biens terrestres ne sont pas seuls à plaindre. Que d’âmes indigentes, qui ne connaissent rien de ce qu’elles devraient savoir dans leur intérêt éternel! Mon Dieu, donnez-moi les grâces nécessaires pour leur faire comprendre leur pauvreté morale, pour la soulager en les conduisant vers vous et en les rendant riches de vos dons. Ce sera mon meilleur titre, vous-même l’avez dit, à vos récompenses dans l’éternité.

Notes et post-scriptum
1. "Les petits enfants ont demandé du pain, et il n'y avait personne pour leur en donner." (Thren. IV, 4.)