- OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE CAREME
- JEUDI DE LA TROISIEME SEMAINE DE CAREME
[SUR L'EVANGILE DE LA FERIE: Luc. IV, 38-44] - Méditations sur la Perfection Religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 253-255.
- CO 6-7
- 1 BAVARDAGES
1 CAREME
1 DESINTERESSEMENT DE L'APOTRE
1 MIRACLES DE JESUS-CHRIST
1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
1 SATAN
1 SOLITUDE
1 VOEU D'OBEISSANCE
2 LUC, SAINT - 1875
I. Jésus-Christ ne dédaigne aucun détail. Il vient de guérir un homme dans la synagogue; il entre chez Pierre, il trouve la belle-mère de celui-ci avec la fièvre; il commande à la fièvre, la chasse, et la belle-mère de Pierre se met à les servir. Mais le bruit de cette guérison s’est répandu dans le voisinage, et au coucher du soleil voilà qu’on lui apporte des malades de toute sorte, et il les guérit tous. Il n’y a donc aucune espèce de maladie que Jésus-Christ ne puisse guérir, et quels que soient les maux de mon âme, je puis, si je le veux, être guéri par Jésus. Pourquoi attendre et pourquoi différer? Ah! c’est que je tiens à mon mal. Il ne m’inspire pas une horreur suffisante, et j’ai peur de ne plus en jouir.
II. Or, parmi les démons, il s’en trouvait qui, chassés des possédés par la puissance du divin Sauveur, l’appelaient Fils de Dieu, et Jésus ne leur permettait pas de le proclamer ainsi. Grande leçon, où nous apprenons l’importance du silence dans une foule de bonnes oeuvres. Parler, c’est les compromettre. Quoique le Fils de Dieu fût au-dessus de tous les obstacles, il voulait nous enseigner en combien de circonstances il importe de savoir se taire et résister à certaines curiosités bienveillantes en apparence, et au fond très nuisibles à l’oeuvre de Dieu. Il est si doux de parler du bien que l’on a fait, des mérites que l’on a acquis, des obstacles vaincus. N’ai-je pas cédé plus d’une fois au charme de cet entraînement, et le résultat n’a-t-il pas été de me faire perdre devant Dieu le fruit de mon travail, et devant les hommes la réputation d’homme sage et prudent? Quand mettrai-je un frein à ma langue, et quand m’appliquerai-je à faire le bien sans bruit?
III. Et quand le jour se fit, Jésus se retira dans la solitude. Ainsi doit faire le vrai religieux. Il ne doit avoir, une fois sa mission accomplie, rien de plus pressé que d’aller se cacher pour ne pas laisser flétrir sa couronne par les vapeurs trop souvent pestilentielles de la louange. Le religieux apostolique doit sans doute rester où on lui indique, mais être prêt à se consacrer à de nouveaux travaux; non par inconstance, mais par détachement. Les foules voudront le retenir comme elles voulaient retenir Jésus, mais ce n’est pas ce qui lui est demandé. Il a répandu sa semence, à d’autres de la faire germer; telle est la vie du religieux missionnaire: « Quia et aliis civitatibus oportet me evangelizare regnum Dei. Il faut que j’annonce aussi aux autres villes la bonne nouvelle du royaume de Dieu. » Pourquoi? Jésus donne sur-le-champ la réponse: « Quia ideo missus sum: car c’est pour cela que j’ai été envoyé. » Jésus est envoyé, le prêtre est envoyé, le religieux est envoyé. Et la puissance de leur travail consiste dans la divinité de leur mission. Moi aussi je suis envoyé, quel que soit le travail que j’accomplisse. « Et erat praedicans in synagogis Galileae: Et il prêchait dans les synagogues de Galilée. » Il ira, le divin Maître, jetant sa parole qui portera ses fruits, selon la volonté du Père céleste. Que sont aujourd’hui les contrées foulées par les pieds du Sauveur? Quels furent les résultats de sa prédication? Qui peut le dire? ou plutôt nous en constatons la stérilité. Qu’importe! Il fut envoyé; sa parole, perdue dans les synagogues de la Galilée, féconde l’enseignement de l’Eglise catholique. Cela suffit à Jésus, et cela doit me suffire.