OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE CAREME

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE CAREME
  • VENDREDI DE LA QUATRIEME SEMAINE DE CAREME
    [SUR L'EVANGILE DE LA FERIE: Ioan. XI, 1-45]
  • Méditations sur la Perfection Religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 276-281.
  • CO 6-7
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DU CHRIST
    1 CAREME
    1 FOI
    1 HAINE CONTRE JESUS-CHRIST
    1 HYPOCRISIE
    1 MANQUE DE FOI
    1 MIRACLES DE JESUS-CHRIST
    1 PROVIDENCE
    1 PUISSANCE DE DIEU
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    1 SAGESSE DE DIEU
    1 SAGESSE HUMAINE
    2 ISAIE, PROPHETE
    2 JEAN, SAINT
    2 LAZARE
    2 MARIE DE BETHANIE
    2 MARTHE, SAINTE
    2 SIMEON, VIEILLARD
    2 THOMAS APOTRE, SAINT
    3 JERUSALEM
    3 JUDEE
  • 1875
La lettre

Nos méditations sur les Evangiles du Carême se termineront ici. La mort et la résurrection de Lazare sont le couronnement de ce qui précède, la première préparation aux mystères qu’il nous reste à contempler.

I. Lazare était malade. Ses soeurs, pleines de confiance en Jésus, l’envoient prévenir: « Seigneur, voilà que celui que vous aimez est malade: Domine ecce quem amas infirmatur. » Et Jésus répond: « Cette maladie n’ira pas à la mort: Infirmitas haec non est ad mortem, sed pro gloria Dei, ut glorificetur Filius hominis per eam: mais elle est pour la gloire de Dieu afin que le Fils de l’homme soit glorifié par elle. » Jésus aimait les deux soeurs et Lazare; pourtant, il resta deux jours au même endroit. Quelle étonnante conduite, et que les voies de Dieu sont différentes des voies des hommes! Ne semblerait-il pas que, Lazare malade, l’amitié de Jésus pour lui et ses soeurs devait le pousser à aller le visiter? Nullement: « Tunc quidem mansit in eodem loco duobus diebus: Il resta cependant deux jours encore dans le même lieu. »

Quand comprendrai-je que le meilleur moyen pour faire l’oeuvre de Dieu consiste à dédaigner les moyens humains, du moins à ne pas faire consister les succès dans leur emploi?

II. Après ce temps, Jésus dit à ses disciples: « Eamus in Iudaeam iterum: Retournons en Judée. » Etonnement de ceux-ci. « Quoi! les Juifs cherchent à vous lapider et vous voulez retourner au milieu d’eux? » « Il y a, répond Jésus, douze heures au jour. Il s’agit de faire ses actions dans la lumière. » Or, cette lumière, c’est la lumière divine, dont l’éclat est bien au-dessus de la sagesse humaine. Et Jésus ajoute: « Lazare, notre ami, dort, je vais le réveiller de son sommeil. » L’intelligence habituelle des disciples ne soupçonne rien dans ces paroles. Il faut que Jésus leur explique catégoriquement que Lazare est bien réellement mort. « Et je m’en réjouis afin que vous puissiez croire, à cause de ce que mon absence a causé. » En effet, si Jésus eût été là, il n’eût pas laissé son ami rendre le dernier soupir, il l’eût guéri; mais une guérison était un prodige moindre qu’une résurrection. Quant aux apôtres, ils n’y comprenaient absolument rien. Et Thomas se contente de dire: « Eamus et nos et moriamur cum eo. Allons-y, nous aussi, et mourons avec lui. » Il ne s’agit point pour eux que Lazare revienne à la vie. Il s’agit que Jésus, en retournant du côté de Jérusalem, s’expose à une mort certaine, et qu’ils sont menacés de la subir avec lui. Sans doute, ils la subiront plus tard, mais après que la résurrection de Lazare aura été le témoignage anticipé de la mort de leur Dieu.

Pour nous, admirons et efforçons-nous, en élevant nos âmes au-dessus de la terre, de prendre des sentiments supérieurs à ceux de ses timides disciples, et surtout à ceux de ses implacables ennemis.

III. « Venit itaque Iesus et invenit eum quatuor dies iam in monumento habentem: Jésus vint donc et il le trouva mis dans le sépulcre depuis quatre jours. » Etait-ce assez pour constater que la vie s’était bien retirée, et qu’il n’y avait plus là qu’un cadavre? Beaucoup de Juifs étaient venus de Jérusalem porter des consolations à Marthe et à Marie: tristes consolateurs dont le coeur plein de fiel se réjouissait en secret de la mort de l’ami de Jésus, et dont la haine s’accroîtra tellement du retour à la vie de celui qu’ils regrettent hypocritement, qu’ils jureront la perte de celui qui consolera réellement les saintes soeurs affligées, en leur rendant leur frère. Marthe apprend la première que Jésus arrive. Elle se précipite vers lui: « Domine si fuisses hic frater meus non fuisset mortuus: Seigneur, si vous aviez été ici mon frère ne serait pas mort; mais, je sais que Dieu vous accordera tout ce que vous lui demanderez. » Jésus répond: « Votre frère ressuscitera. » « Ah! sans doute, s’écrie la pauvre affligée, il ressuscitera au dernier jour. » Elevons nos âmes dans la foi pour écouter la parole du Sauveur: « Ego sum resurrectio et vita: Je suis la résurrection et la vie. » Depuis le commencement des choses, aucune parole semblable n’a été prononcée. « Qui credit in me, etiamsi mortuus fuerit, vivet, et qui vivit et credit in me non morietur in aeternum. Credis hoc? Celui qui croit en moi, quand même il serait mort, vivra. Et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela? » Elle dit: « Oui, je crois que vous êtes le Christ, Fils du Dieu vivant, qui est venu en ce monde. » Mais Marthe appelle Marie. Celle-ci accourt. Les Juifs la suivent, et Jésus, voyant leurs larmes, frémit en lui-même. « Où l’avez-vous déposé, dit-il: Ubi posuistis eum? »

IV. -Ici commence la scène maîtresse. Les Juifs se livrent à un double sentiment. Ceux qui n’avaient rien de préconçu ne peuvent s’empêcher de dire: « Ecce quomodo amabat eum: Voyez comme il l’aimait! » Mais ceux que la haine rongeait, tournant tout à mal, reprennent: Quoi! celui qui a guéri l’aveugle-né ne pouvait-il pas empêcher Lazare de mourir? Jésus pourtant, malgré son frémissement intérieur, s’approche du tombeau. C’était une caverne, et une pierre le couvrait. « Enlevez la pierre, » dit-il. Marthe tente une objection: « Seigneur, il sent mauvais; voilà quatre jours depuis sa sépulture. » Et Jésus parlant en Dieu: « Ne t’ai-je pas dit que si tu crois tu verras la gloire de Dieu? » On obéit; la pierre est levée. Et Jésus, les yeux au ciel:  » Père, je vous rends grâces de m’avoir exaucé. Je sais bien que vous m’exaucez toujours, mais je dis ceci afin que le peuple qui m’entoure croie à ma mission. » Ayant dit cela, d’une voix forte il cria: « Lazare, veni foras: Lazare, viens dehors. » Et aussitôt apparut celui qui était mort, les pieds et les mains liés par des bandelettes, et la face enveloppée d’un suaire. Jésus dit: « Débarrassez-le et laissez-le aller. » Et beaucoup de ceux qui étaient venus crurent en lui.

Beaucoup, pas tous.

Double effet des miracles: accroissement de foi et d’incrédulité, d’amour et de haine.

La mort de Jésus est résolue chez les uns; ceux qui devaient être les premiers à croire sont préparés à croire à la résurrection [du Sauveur]. Il en sera ainsi toujours: Positus in ruinam et resurrectionem(1).

Sauveur qui avez ressuscité Lazare, ressuscitez mon âme à la vie éternelle en prononçant pour moi ces mots divins:Ego sum resurrectio et vita: Je suis la résurrection et la vie.

Notes et post-scriptum
1. "Etabli pour la ruine et la resurrection." (Luc. II, 34.) Prophétie du vieillard Siméon disant à Marie, lors de la Présentation au Temple en parlant de Jesus: "Celui-ci a été établi pour la ruine et la résurrection d'un grand nombre en Israël, et comme un signe qui excitera la contradiction." C'est un écho du prophète Isaïe (VIII, 14), disant du Seigneur: "Il sera une pierre d'achoppement et une pierre de scandale pour les deux maisons d'Israël, un piège et un sujet de ruine pour les habitants de Jérusalem."