OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE MOIS DE MARIE

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE MOIS DE MARIE
  • DOUZIEME JOUR
    RAISON D'ETRE DE LA SAINTE VIERGE
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 394-398.
  • BH 5
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DE DIEU POUR SA CREATURE
    1 BIEN SUPREME
    1 CHARITE DE MARIE
    1 CHARITE ENVERS DIEU
    1 COMPASSION DE LA SAINTE VIERGE
    1 DON DE SOI A DIEU
    1 FIDELITE A LA GRACE
    1 FOI DE LA SAINTE VIERGE
    1 JOIE SPIRITUELLE
    1 JUSTICE DE DIEU
    1 LACHETE
    1 MERE DE DIEU
    1 MOIS DE MARIE
    1 PASSIONS MAUVAISES
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    1 SENTIMENT DES DROITS DE DIEU
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    2 AMBROISE, SAINT
    2 ELISABETH, SAINTE
  • 1875
La lettre

Arrêtons-nous à cette pensée: pourquoi la Sainte Vierge? Sans doute pour donner une mère au Fils de Dieu. Mais pourquoi Marie a-t-elle été choisie? Assurément par une pure grâce; toutefois Dieu prévoyait que de toutes les créatures aucune ne correspondrait aux grâces comme Marie. Sans doute, il faut dire: Elegit eam Deus et praeelegit eam(1), mais enfin, si elle a été choisie, Dieu de toute éternité en choisissant connaissait la perfection du choix qu’il faisait.

Or, dans la correspondance à la grâce, je vois en Marie plusieurs caractères, et j’en étudierai aujourd’hui deux principaux que je trouve dans les premières paroles du Magnificat I° Elan de Marie vers Dieu; 2° joie de Marie au service de Dieu.

I. Elan de Marie vers Dieu.

Elisabeth a félicité Marie de toutes les grâces dont elle était comblée, et Marie, ne s’arrêtant point à ce qui lui est personnel, s’écrie: Magnificat anima mea Dominum: mon âme glorifie le Seigneur.

Je trouve là toute la raison de mon être. Dieu m’a créé pour lui, et comme il est mon centre, qu’ai-je de mieux à faire que de travailler pour lui, de vivre pour lui, de faire de ma vie une perpétuelle louange? En ceci sont confondues les pensées de ceux qui ne rapportent pas tout à Dieu et ne font pas de Dieu seul le terme de toutes leurs actions. Crime, folie, malheur pour ces pauvres dévoyés qui ne comprennent pas combien il importe de travailler pour le but le plus noble et le plus élevé.

Or, ce n’est pas, chez Marie, seulement un calcul, c’est un élan d’amour. Qu’a-t-elle à faire ici-bas que de louer Dieu, de consacrer son existence entière à Dieu? Quand une âme s,élance ainsi vers son Créateur, il est impossible que le Créateur, qui l’a tirée du néant pour lui, ne lui rende pas amour pour amour, quoique ce soit lui qui ait aimé le premier, et que ce ne soit pas au Créateur à rendre, mais à la créature. Situation étonnante, où il semble que la créature commence, tant Dieu paraît empressé à répondre.

Seulement, ne nous faisons pas illusion; Marie, dans les lumières dont elle est inondée, a prévu, à coup sûr, les épreuves dont elle serait assaillie et elle en a fait une occasion de louer son Dieu d’une manière plus parfaite.

Image admirable de ce que doivent être mes dispositions. Oui, je suis créé pour Dieu. Ma vie sort de lui, se conserve en lui, se perdra éternellement en lui. Il faut que j’en sois persuadé et que je vive très uniquement pour lui, afin de dire sans cesse comme Marie: mon existence n’est qu’un acte perpétuel de louange envers Dieu: Magnificat anima mea Dominum et tout mon effort consiste à l’aimer et à le louer à chaque instant de ma vie plus parfaitement.

II. Joie de Marie au service de Dieu.

Son bonheur est placé où il doit l’être. Que de personnes ne rencontre-t-on pas qui se croient heureuses; mais, que le temps s’écoule, et bientôt la déception arrive. Pourquoi? parce que, dans l’emportement des passions, elles n’ont pas vu qu’une seule chose était nécessaire: Dieu et sa possession. Elles se plaignent et vous en entendez qui disent: Dieu n’est pas juste.

Mais réfléchissez. Dieu ne serait pas juste, si, vous ayant créé pour le bonheur, il avait voulu que vous le trouviez dans les affections du coeur, dans la fortune, dans les honneurs, dans les plaisirs; mais est-ce que Dieu veut que vous trouviez le bonheur là? Evidemment non. Si donc vous le voulez trouver là où il ne l’a pas mis, est-il étonnant que Dieu vous dise: tant pis pour vous si vous avez des désenchantements. N’accusez pas Dieu, n’accusez que vous-même.

D’autres personnes souffrent, quoiqu’elles aient placé leur bonheur en Dieu, disent-elles. Mais que de mensonges dans leur manière de faire! quelle lâcheté! quels retours égoïstes! Est-il étonnant que Dieu ne les exauce qu’en proportion de ce qu’elles cherchent, et si elles cherchent mal, pourquoi Dieu se donnerait-il à elles de façon à leur être une joie?

Où en est mon âme, et quand prendrai-je la résolution de ne chercher, de ne vouloir que Dieu, par les moyens que Dieu me propose et non par ceux que je prétends choisir? Qui est le maître? Est-ce lui, est-ce moi? S’il est le maître et moi le serviteur, n’est-ce pas à lui de commander et à moi d’obéir pour arriver au bonheur que je poursuis si vainement en dehors de lui?

Pour Marie, il en est bien autrement. Elle glorifie Dieu par-dessus tout: Magnificat anima mea Dominum, et Dieu lui donne par avance quelque chose des joies du ciel: Et exultavit spiritus meus in Deo salutari meo. Mais il y a une joie particulière en Marie. « Mon esprit a tressailli d’allégresse en Dieu mon Sauveur. » Quel est ce Sauveur? Son propre fils. Voilà sa joie spéciale, c’est d’être la mère de son Sauveur.

Toutefois, observe saint Ambroise, si secundum carnem una mater est Christi, secundum fidem tamen omnium fructus est Christus(2). En sorte qu’il est conçu en nous tous, si nous recevons le Verbe de Dieu dans un coeur pur et une âme sans tache.

Nous aussi nous pouvons donc nous réjouir, si nous le voulons, et dire avec Marie: ma vie est consacrée à la gloire de Dieu et ma joie est proportionnée au don que je lui ai fait de moi-même.

Notes et post-scriptum
1. "Dieu l'a élue et choisie d'avance." (Office de la Sainte Vierge.)
2. "Si, selon la chair, la Mère du Christ est une, selon la foi, cependant, le Christ est le fruit de tous."