OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE MOIS DE MARIE

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE MOIS DE MARIE
  • QUATORZIEME JOUR
    VOYAGE A BETHEHEM
    PAUVRETE DE MARIE
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 403-408.
  • BH 5.
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 COMPASSION DE LA SAINTE VIERGE
    1 ENFANCE DE JESUS-CHRIST
    1 HUMILITE DE LA SAINTE VIERGE
    1 IMITATION DE LA SAINTE VIERGE
    1 MARIE NOTRE REINE
    1 MOIS DE MARIE
    1 PAUVRETE DE JESUS-CHRIST
    1 PAUVRETE DE MARIE
    1 PUISSANCE DE DIEU
    1 PUISSANCE DE LA SAINTE VIERGE
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    1 REGNE
    1 SOLITUDE
    1 SOUVERAIN PROFANE
    1 VERTU DE FORCE
    1 VIE SPIRITUELLE
    2 AUGUSTE, EMPEREUR
    2 DAVID, BIBLE
    2 JOSEPH, SAINT
    2 LUC, SAINT
    2 MATTHIEU, SAINT
    3 BETHLEEM
    3 JERUSALEM
    3 NAZARETH
    3 ROME
  • 1875
La lettre

Factum est in diebus illis exiit edictum a Caesare Augusto ut describeretur universus orbis(1).

Contemplons tout d’abord le contraste. Un homme, à force de luttes, d’intrigues, de combats, maître du monde ancien, en ordonne le dénombrement. En même temps, un petit enfant, qui n’est pas encore né, est porté par ses parents à la ville de ses pères et n’y trouve qu’une crèche pour venir au monde. Qui est le plus grand des deux? Est-ce l’empereur, est-ce le petit enfant?

Allons plus loin; la mère de cet enfant à qui elle ne donnera qu’une crèche pour berceau est elle-même plus grande que celui qui donne ses ordres à l’univers. Auguste peut être le maître d’une partie de la terre pour quelques années; Marie va être la reine de la terre et du ciel pendant l’éternité.

Enfin, Marie se prépare à la naissance de son Fils. Or, que se passe-t-il?

1º. Solitude de Marie; 2° pauvreté de Marie; 3° angoisses de Marie; 4° puissance de Marie.

I. Solitude de Marie.

Contemplons le profond abandon où se trouve Marie au moment de l’oeuvre admirable à laquelle elle doit coopérer. L’édit de César Auguste l’oblige de quitter avec Joseph Nazareth pour se faire inscrire dans la ville de ses ancêtres, Sans doute pour constater la généalogie de son Fils, mais aussi pour faire ressortir l’oubli où sont tombés ses parents, et le profond délaissement auquel ils sont réduits dans la ville de David, leur aïeul. Qui les reconnaît? Qui les reçoit? Personne. Ils passent au milieu d’inconnus. Ou, de la famille, il n’est plus qu’eux dans le pays, ou les parents les méprisent. Ce qui est sûr, c’est qu’ils ne trouvent pas même une place dans l’hôtellerie; ils en sont réduits à l’étable des troupeaux. In propria venit et sui eum non receperunt(2). Marie, Joseph, Jésus seront seuls. Ils ont pour compagnie les anges, mais les hommes à qui le salut est apporté ne veulent pas d’eux.

Solitude douloureuse mais nécessaire à l’âme qui veut aller à Dieu. Solitude douloureuse avant tout pour Marie; solitude féconde, car dans cette solitude Marie porte le salut du genre humain. Il faut que, moi aussi, j’aime la solitude et que j’accepte tout ce que Jésus voudra faire pour moi dans le délaissement.

II. Pauvreté de Marie.

Il est inutile d’insister. Quelle plus grande pauvreté pour une mère que d’être obligée de mettre au monde son Fils, qu’elle adore comme son Dieu, au milieu de vils animaux, réunis pour la nuit dans une étable? Oui, mais c’est ainsi que les oeuvres divines s’accomplissent.

A Rome, l’empereur était entouré de la puissance universelle. A Jérusalem, le grand prêtre avait sa splendeur. Le prêtre de la nouvelle loi ne peut rien recevoir de sa mère. Le Roi des rois est livré à l’indigence la plus absolue. Voilà ce qui l’attend, et Marie en souffre, non pas tant pour elle que pour son Fils qu’elle va mettre au monde.

Et pourtant il convient qu’il en soit ainsi, car le mystère du salut éclatera avec d’autant plus de force qu’il aura été plus évident que l’homme avec ses ressources n’y est pour rien. Il faut bien que tout, là, soit de Dieu. Quand le moment sera venu, Jésus-Christ donnera à son oeuvre la richesse extérieure, mais ce sera le surcroît. D’abord le royaume de Dieu. Mais qu’il est dur pour Marie de ne pouvoir, comme mère, rien offrir à son Dieu que quelques pauvres langes apportés de Nazareth!

III. Angoisses de Marie.

Tout semble concourir à torturer le coeur de Marie. Pourquoi Dieu n’a-t-il pas permis qu’elle enfantât avant son départ de Nazareth? Pourquoi Dieu n’a-t-il pas voulu qu’elle n’enfantât qu’au retour du voyage? A Nazareth, elle eût pu abriter le nouveau-né sous un humble toit, le toit de la famille. Mais non; d’une part le Sauveur du monde devait naître à Bethléem, et il fallait que dès le premier instant de sa naissance, il accomplît ce qu’il devait dire de lui-même: le Fils de l’homme n’a pas où reposer sa tête(3).

Le Fils veut accomplir les prophéties, mais que leur accomplissement est dur pour cette mère! Le Fils tient à montrer son triomphe sur le monde par la pauvreté, mais que ce dénuement inflige de tortures au coeur de celle qui va lui donner le jour!

Mais allons au fond. Marie souffre si elle n’est qu’une vierge pieuse. Marie trouve dans son adhésion à la volonté de Dieu une grande force pour souffrir, si réellement elle a les sentiments de la Mère de Dieu. Grande leçon pour moi qui souffrirais bien moins des vicissitudes de la vie, si ma foi était plus grande.

O Marie, au nom des épreuves que Jésus a imposées à votre amour au moment de sa naissance, par le courage avec lequel vous les avez supportées, apprenez-moi à rendre mes épreuves profitables à ma sanctification.

IV. Puissance de Marie dans l’absence de tout secours humain.

Mais ce qu’il faut surtout admirer ici, c’est la puissance divine éclatant là où les moyens humains sont les plus faibles. Il semble que Dieu veuille constamment tout de rien. Oui, Marie n’a rien, Jésus n’a rien dans son entrée à Bethléem, et c’est pour cela que la puissance de Dieu se montrera avec plus de lumière.

Ah! si nous avions cette conviction dans nos oeuvres, que d’obstacles ne seraient pas surmontés en raison même de leur gravité. Dieu se joue de nous si nous voulons être quelque chose. L’homme a voulu devenir Dieu par lui-même, et il a été précipité de sa dignité. Mais ensuite un Dieu s’est fait homme pour que l’homme devint Dieu: Deus factus est homo ut homo fieret Deus(4).

Concluons 1° à la nécessité de laisser Dieu agir en nous; 2° à la gloire qu’il nous réserve en nous rendant participants de la divinité, à condition que nous le laisserons agir à l’exemple de Marie.

Notes et post-scriptum
1. "Or, il arriva qu'en ces jours-là il parut un édit de César Auguste, ordonnant un recensement de toute la terre." (Luc. II, I.)
2. "Il est venu chez lui, et les siens ne l'ont point reçu." (Ioan. I, 11.)
3. "*Filius autem hominis non habet ubi caput reclinet*." (Matth. VIII, 20. -Luc. IX, 58.)
4. *Augustinus. De Nativit. Domini*. (Serm. IX.)