OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE MOIS DE MARIE

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE MOIS DE MARIE
  • DIX-NEUVIEME JOUR
    MARIE CHERCHANT ET RETROUVANT JESUS
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 427-432.
  • BH 5.
Informations détaillées
  • 1 FIDELITE A LA GRACE
    1 IDEES DU MONDE
    1 LUTTE CONTRE LE MONDE
    1 MOIS DE MARIE
    1 NEGLIGENCE
    1 PERSEVERANCE
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    1 VERTU DE FORCE
    1 VIGILANCE DE L'APOTRE
    2 JOSEPH, SAINT
    2 LUC, SAINT
    2 MARC, SAINT
    2 MATTHIEU, SAINT
    3 JERUSALEM
    3 NAZARETH
  • 1875
La lettre

Retournée à Nazareth, la Sainte Famille accomplit les devoirs de la religion. Elle monte au Temple. Jésus y monte aussi, mais ses parents l’y perdent. D’où plusieurs leçons: 1° nécessité de veiller sur les grâces accordées; 2° nécessité de chercher les bienfaits perdus; 3° nécessité de s’élever au-dessus des idées humaines dans les choses du salut.

I. Nécessité de veiller sur les grâces accordées.

Grande leçon que nous donne l’apparente négligence de Marie et de Joseph à l’égard de Jésus. A l’âge de douze ans, ils le prennent avec eux à Jérusalem pour la célébration de la Pâque, ils accomplissent leurs obligations légales et puis s’en retournent à Nazareth. Mais où donc est Jésus? Sans doute, pensent-ils, avec quelqu’un de leurs parents ou de leurs amis. Confiance imprudente: Jésus n’y était pas.

Exemple douloureux de ce qui arrive à bien des âmes peu vigilantes. Elles étaient appelées aux communications les plus intimes avec Dieu. Notre-Seigneur, pendant de longues années, s’étant donné à elles, elles l’avaient suivi partout, dans la solitude, les oeuvres de charité, la pauvreté, les humiliations, les persécutions, le travail; tout avait montré un zèle ardent pour leur Maître. Tout à coup, après l’accomplissement d’un grand devoir, elles se confient en leur passé, elles s’en rapportent à leurs habitudes et, par un défaut de vigilance, il se trouve que Jésus-Christ a disparu; les grâces ont été soustraites.

D’où vient un pareil malheur? Soit d’une confiance présomptueuse, soit d’une négligence qui s’est endormie quand il fallait veiller. Enfin la grâce s’est dissipée et l’on s’en est aperçu, mais trop tard.

Hélas! en combien de circonstances ne perdons-nous pas ainsi Jésus par notre faute? Et ce ne sont pas les chrétiens relâchés dont il s’agit, il s’agit des chrétiens fervents. Qui était plus fervent que Marie et Joseph? Qui avait jusqu’alors plus veillé sur Jésus? Qui l’avait plus protégé? Qui l’avait plus aimé? Et pourtant ils le perdent. Certes, ils avaient des excuses légitimes, sans doute, mais pourtant Jésus n’est plus là. Est-ce de leur faute? On n’ose le penser. Est-ce seulement une permission de la Providence, pour nous montrer avec quelle attention nous devons conserver Jésus en nous quand nous avons le bonheur de le posséder?

Quelles réflexions cette perte de Jésus ne doit-elle pas m’inspirer?

II. Nécessité de chercher les bienfaits perdus.

Consummatisque diebus cum redirent, remansit puer Iesus in Ierusalem.(1). Voilà Jésus qui reste à Jérusalem. Certes, il y a là aussi un autre mystère. Mais le plus important est de voir comment Jésus exerce ses sévérités envers ceux qu’il aime le plus, quand ils ne lui sont pas entièrement fidèles.

Existimantes autem illum esse in comitatu, venerunt iter diei, et requirebant eum inter cognatos et notos(2). Certains interprètes disent que les hommes retournaient à part et les femmes de même. Joseph croyait Jésus avec Marie et Marie le croyait avec Joseph. Or, ne pouvant supposer qu’il ne fût pas avec l’un d’eux, ils ne s’aperçurent de son absence que le soir après un jour de marche, iter diei. On le cherche dans sa parenté; ce n’est pas, dit Origène, le séjour de Jésus, et c’est dans le Temple seulement qu’on le trouve. Mais que de préoccupations, que d’angoisses jusqu’à ce qu’il soit retrouvé!

Exemple instructif. Ah! sans doute, nous pouvons perdre Jésus, même sans qu’il y ait de notre faute. Les dispositions du divin Maître sont telles que rien ne peut faire prévoir quand, au milieu des sécheresses et des ténèbres, il lui plaira de nous dissimuler sa présence. Il ne se retire pas, mais il fait semblant de se retirer: et ipse se finxit longius ire(3), comme pour les disciples d’Emmaüs. Persévérons, ayons courage. Dieu sera là, prêt à se montrer de nouveau, comme Jésus à ses parents dans le Temple de Jérusalem.

III. Nécessité de s’élever au-dessus des choses humaines dans les choses du salut.

Que fait Jésus? Enfant, mais Enfant Dieu, il a le courage de se séparer de ses parents. On le retrouve in medio doctorum(4). C’est qu’en effet, si nous perdons Jésus, nous avons peut-être mérité de le perdre, pour ne pas nous en être tenus à une doctrine solide. Nous avons suivi la voie du sentiment, il faut suivre la voie de la vérité.

Invenerunt illum in templo, sedentem in medio doctorum, audientem illos et interrogantem eos(5) Il les écoute, il les interroge, il s’instruit et en même temps il les instruit plus qu’ils ne sont capables de l’instruire. Or, tout le monde était sous le charme: Stupebant autem omnes qui eum audiebant(6).

Admirable disposition. Vingt ans plus tard, la plupart de ses admirateurs le condamneront à mort à cause de leur jalousie, mais en ce moment ils ne se défient pas de lui. C’est pourquoi Jésus leur parle, et ils l’écoutent maintenant, et ce sera une preuve de leur culpabilité lorsqu’ils le repousseront, plus tard, quand il enseignera sicut potestatem habens(7).

Or, sa mère le cherche, le trouve, lui adresse de tendres reproches.

-Pourquoi me cherchiez-vous? Ne saviez-vous pas qu’il faut que je sois aux affaires de mon Père(8)?

Ah! quand prendrons-nous le parti de nous occuper des affaires de Dieu?

Notes et post-scriptum
1. "Les jours (de la fête) étant passés, lorsqu'ils s'en retournèrent l'Enfant Jésus resta à Jérusalem." (Luc. II, 43.)
2. "Pensant qu'il était avec ceux de leur compagnie, ils marchèrent durant un jour, et ils le cherchaient parmi leurs parents et leurs connaissances." (Luc. II, 44.)
3. "Il fit semblant d'aller plus loin." (Luc. XXIV, 28.)
4. "Au milieu des docteurs." (Luc. II, 46.)
5. "Ils le trouvèrent dans le temple, assis au milieu des docteurs, les écoutant et les interrogeant." (Luc. II, 46.)
6. "Et tous ceux qui l'entendaient étaient ravis." (Ibid. 47.)
7. "Comme ayant autorité." (Matth. VI, 29.) Marc I, 22 et Luc IV, 32, font la même remarque, attribuant la profonde impression produite par Jésus sur ses auditeurs à l'autorité toute divine de son enseignement. Il parlait en maître, et non comme les scribes et les pharisiens, froids commentateurs des traditions des anciens; c'est ce qui frappait le plus dans sa parole et lui suscitait la jalousie et la haine de ses ennemis.
8. "*Quid est quod me quaerebatis? Nesciebatis quia in his quae Patris mei sunt oportet me esse*?" (Luc. II, 49.)