OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE MOIS DE MARIE

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS POUR LE MOIS DE MARIE
  • VINGT-DEUXIEME JOUR
    MARIE DELAISSEE
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 441-445.
  • BH 5
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 CHARITE DE MARIE
    1 COMPASSION DE LA SAINTE VIERGE
    1 EPREUVES SPIRITUELLES
    1 ESPERANCE
    1 MERE DE DIEU
    1 MOIS DE MARIE
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    1 SOLITUDE
    1 VIE DE SILENCE
    2 ISAIE, PROPHETE
    2 JEAN, SAINT
    2 JOB, BIBLE
    2 LUC, SAINT
    2 MATTHIEU, SAINT
    3 CANA
  • 1875
La lettre

Dieu est admirable dans ses saints et dans les épreuves qu’il leur impose. Il tient à ce que l’on sache qu’il a ses exigences, et il saura mettre Marie à une place d’humilité. A Cana [il lui dira]: « Femme, qu’y a-t-il entre vous et moi(1) et (2)? »

Une femme louera le sein qui l’a porté, les mamelles qui l’ont allaité, il déclarera bien plus heureux ceux qui se nourrissent de la parole de Dieu(3).

On lui parlera de sa mère et de ses frères. « Qui est ma mère, et qui sont mes frères? »(4) répond Jésus, qui ne veut, dans sa mission, être arrêté par aucun obstacle humain.

Mais l’état de Marie n’est pas moins admirable: 1° état de délaissement; 2° de solitude; 3° de résignation dans le silence.

I. Etat de délaissement.

Quel modèle que celui de Marie pour l’âme qui veut être vivifiée par les épreuves qui font les saints! Pendant trente ans, sauf trois jours, Marie n’a pas quitté Jésus; elle connaissait le prix de son trésor, le conservait très amoureusement, et à mesure que Jésus croissant en âge, en sagesse et en grâce, lui manifestait des perfections nouvelles, elle se prenait à l’aimer toujours plus, son coeur se dilatait toujours davantage, et Marie, Mère et Vierge, sentait des tendresses nouvelles pour son Fils et son Dieu.

Or, le temps vint où la séparation fut nécessaire. Quelquefois, ils se rencontrèrent, mais de façon à ce que la présence de Marie ne gênât en rien le ministère de Jésus. Enfin, le temps des communications intimes était passé. A la place, le délaissement, d’autant plus cruel que les douceurs du passé en faisaient davantage sentir l’amertume et les privations.

Quels mérites n’acquit pas Marie loin de Jésus! non pas que Jésus fût loin, sa présence sensible seule avait disparu. Il n’avait pas cessé d’aimer sa mère, mais dans [l’exemple de] Marie il voulait apprendre à tous les âmes. qui tendraient à la perfection qu’il est des circonstances où il faut savoir quitter Jésus pour Jésus.

Seigneur, que je ne vous quitte jamais pour un autre motif, mais que, quand vous le voudrez, je sache vous quitter pour vous prouver à quel point je vous aime.

II. Etat de solitude.

Qu’était la solitude de Marie? Certes, elle pouvait avoir certaines relations, mais le monde ne lui était-il pas une solitude, du moment que Jésus n’était plus auprès d’elle?

Grave question que celle-là! Et quand comprendrai-je cette solitude du coeur dans laquelle il me serait si bon de m’établir, si je veux faire quelques progrès dans la vie intérieure. Sans doute, il est des moments où la solitude du cloître a ses avantages, mais ce n’est pas celle-là qui m’est demandée, du moins comme au Trappiste, au Chartreux ou à la Carmélite. On me demande la solitude du coeur. Je suis loin de tout par la pensée. Jésus s’est retiré de moi, je le cherche, je ne le trouve pas; je me place en face de lui, il ne me regarde pas; je crie, il ne m’écoute pas; il s’est changé pour moi en un maître cruel, dit le prophète: mutatus es mihi in crudelem(5), et, il faut que j’accepte cette cruauté dédaigneuse en apparence.

J’irai trouver Marie, je chercherai à la consoler de sa solitude, et elle me consolera de la mienne.

III. Etat de résignation et de silence.

Grand sacrifice que le silence, quand on a tant de douleurs à dire, tant de plaintes à formuler! Qui aurait, plus que Marie, à se plaindre de Jésus quand il la sèvre si brusquement de ses consolations passées? Eh bien! quelle plainte exprime Marie? Le silence. Et l’espoir que ce n’est pas pour toujours fait sa force, selon l’expression du prophète: in silentio, et in spe erit fortitudo vestra(6).

Voilà la force véritable, un silence plein d’espoir. Ce qui est de la terre est toujours court. Marie le savait, se taisait et espérait.

Seigneur, donnez-moi la force de l’espoir et du silence, et toutes les épreuves seront abrégées pour moi.

Notes et post-scriptum
2. Cette locution hébraïque marque, selon le cas, des nuances de pensées assez diverses, mais toujours quelque divergence de vues. Le titre, femme, *mulier*, n'a pas chez les Orientaux l'apparence de dureté qu'il a chez nous; on l'adresse aux personnes les plus aimées, et il comporte une nuance de respect.1. Ioan. II, 4.
3. Luc. XI, 27, 28.
4. Matth. XI, 47-50.
5. Iob. XXX, 21.
6. "Votre force sera dans le silence et dans l'espérance."(Is. XXX, 15.)