OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS SUR NOTRE-SEIGNEUR DANS L’EUCHARISTIE

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|MEDITATIONS SUR NOTRE-SEIGNEUR DANS L'EUCHARISTIE
  • JESUS NOTRE JUGE
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1925, I, p. 512-518.
  • BH 5
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 APATHIE SPIRITUELLE
    1 BIEN SUPREME
    1 DIVINITE DE JESUS-CHRIST
    1 EUCHARISTIE
    1 GLORIFICATION DE JESUS-CHRIST
    1 HUMILITE DE JESUS-CHRIST
    1 HYPOCRISIE
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 INGRATITUDE
    1 JESUS-CHRIST JUGE
    1 JESUS-CHRIST NOURRITURE DES AMES
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    1 ROUTINE
    1 SACRILEGE
    1 SAINTE COMMUNION
    1 TIEDEUR
    1 VERTU DE FORCE
    1 VERTU DE PENITENCE
    2 DAVID, BIBLE
    2 ISAIE, PROPHETE
    2 JEAN, SAINT
    2 MATTHIEU, SAINT
    2 PAUL, SAINT
    2 THERESE, SAINTE
  • 1875
La lettre

Qui manducat et bibit indigne indicium sibi manducat et bibit(1). Quelle parole terrible! L’Eucharistie est le principe de la vie des saints; mais elle est en même temps la condamnation des indignes. Je veux étudier cette vérité qui m’inspirera une terreur salutaire et écartera de mon âme cette familiarité dangereuse dans laquelle se trouve le germe de tant de fautes.

Je veux méditer sur Jésus-Christ à l’Eucharistie, jugeant: 1° les sacrilèges, 2° les ingrats, 3° les tièdes, 4° les saints.

I. Jésus jugeant les sacrilèges.

Il y a trois manifestations de Jésus-Christ: [La première] à la crèche, dans la faiblesse: parvulus natus est nobis et Filius datus est nobis(2); il nous est né, il nous est donné.

La seconde, dans sa puissance, au jugement dernier: Tunc… videbunt Filium hominis venientem in nubibus coeli eum virtute magna et maiestate(3).

Entre ces deux manifestations, il y a celle de tous les jours, où il est faible et puissant à la fois; faible par l’état où il apparaît, puissant par le prodige qui le réduit à un pareil état.

Mais il n’en est pas moins celui à qui le Père a donné tout jugement, et, dans l’Eucharistie, il est juge, et plus spécialement juge de ceux qui attaquent l’Eucharistie, juge par conséquent des sacrilèges.

Il est véritablement notre Dieu, il est véritablement notre nourriture. Quelle admirable bonté! Il me donne la plus grande marque d’amour à la seule condition que je le recevrai dans une âme pure, et je n’y consens pas! Je veux [donc] le profaner [si je le reçois], non dans mon coeur préparé comme un temple, mais dans mon coeur repaire de Satan, à qui je me dispose à le livre, à qui je le livre, en effet.

Mais j’admets que je ne sois pas coupable moi-même; que d’autres le sont, et combien n’ai-je pas à travailler pour dédommager Jésus-Christ de tant d’insultes abominables!

II. Jésus juge des ingrats.

Toutes les fois que Jésus-Christ descend dans mon coeur, il en voit, de son regard divin, toutes les dispositions, toutes les ingratitudes. Hélas! qu’elles sont nombreuses! et quelle triste énumération ne peut-il pas en faire! Depuis que j’ai l’âge de raison, que d’avances par lesquelles j’ai été prévenu! A quoi ont-elles servi? Suis-je de ces ingrats sur la tête de qui se multiplièrent inutilement les bienfaits? Avec quelle froideur ne communié-je pas bien souvent? Quelle absence de préparation, quelle rapidité dans mes actions de grâces ! Or, tout ce que Jésus-Christ m’eût accordé est perdu par ces communions mal préparées, par ce actions de grâces mal faites. Son amour qui vient à moi des mains pleines de bienfaits s’indigne de mes dédains, et je veux que cet amour méprisé ne se transforme pas en haine quand il viendra pour me juger!

Ah! que je mérite d’être condamné à cause de mes mépris! N’est-ce pas la très grave accusation qu’il porte contre moi,et que je ne saurais trop méditer!

III. Jésus jugeant les tièdes.

Quand je considère tant d’hommes que Jésus-Christ a voulu s’unir par l’Eucharistie, et qui n’en ont pas [mêm [même] entendu parler, je suis épouvanté. Je ne le suis pas moins à la vue de tant de chrétiens baptisés, qui ne le reçoivent pas. Je ne parle pas de ceux qui le reçoivent mal, mais que dire des chrétiens qui le reçoivent dans la plus effrayante tiédeur? Si les flammes de l’amour de Jésus-Christ ne les réveillent pas, qu’est-ce qui pourra les réveiller?

Les avances du divin Maître étaient autant de germes précieux qui devaient se transformer en vertus. Qu’en ai-je fait? Quel développement leur ai-je donné? A quoi m’a servi de vivre avec l’apparence d’un bon chrétien, si je n’en ai pas la réalité? Je suis venu, dit Jésus-Christ, afin que les miens aient la vie et l’aient plus abondante(4). Qu’est notre vie? quel engourdissement! quelle routine et quelle rouille! Jésus-Christ m’apporte la vie, il m’apporte la sainteté. Une seule communion, disait sainte Thérèse, devrait suffire pour faire de nous des saints. Pourquoi ne parviens-je pas à profiter de tant de bienfaits?

Mais voilà ce qui va arriver. Je suis tombé dans la tiédeur et, par conséquent, dans l’insensibilité; rien ne m’émeut et me voilà incapable d’aucun bien. Quel prélude à ma condamnation, car enfin je ne puis inspirer à mon juge qu’un dégoût très légitime. Que se passera-t-il quand je tomberai entre ses mains, si déjà, à cause de ma tiédeur, il commence à me rejeter de sa bouche(5)?

O Jésus, donnez-moi un renouvellement de forces, et que, sortant de ma léthargie coupable, je me réveille avant mon jugement, afin d’être prêt, parce que j’aurai fait valoir les dons que vous m’avez confiés!

IV. Jésus-Christ juge des saints.

Jugement merveilleux et plein de consolation. En effet, qu’est-ce qu’un saint sinon l’image fidèle de Jésus-Christ. Il y en a de plus ou moins exactes, mais qu’importe si ces images vivantes ont fait tous leurs efforts pour ressembler le plus possible à leur divin modèle? Venez, les bénis de mon Père(6), leur sera-t-il dit. Et pourquoi? Parce qu’ils sont les amis de Jésus-Christ, parce qu’ils sont ses copies, parce que toute leur vie a été un accroissement de perfection dans le bienfait eucharistique. Un pain leur a été donné, et ils ont marché, avec courage, dans la force de cette nourriture, à travers le désert de la vie(7) et (8). Quand viendra l’heure du jugement, serai-je jugé digne de comparaître sans être jugé? Celui qui fait la volonté de Dieu ne vient pas au jugement, in iudicium non venit(9).

Ah! quel moyen d’éviter ce jugement terrible, en étant assuré que je fais la volonté de Dieu: n’est-ce pas de me juger moi-même en face de l’Eucharistie? Probet autem seipsum homo, et sic de pane illo edat et de calice bibat(10). Mais, ô Jésus, je ne veux pas seulement m’éprouver; éprouvez-moi vous-même par les lumières que vous me communiquerez, les délicatesses de coeur que vous m’inspirerez: Proba me, Domine, et tenta me(11) et (12). Alors, ô Juge plein de bonté, ayant reçu une sentence d’absolution sur la terre, j’aurai le ferme espoir qu’elle sera confirmée dans le ciel. Ainsi soit-il!

Notes et post-scriptum
8. Le P. d'Alzon fait ici allusion au pain que l'ange donna au prophète Elie pour le rendre capable de voyager quarante jours et quarante nuits à travers le désert; belle figure de l'Eucharistie, que l'Eglise rappelle dans l'office du Saint Sacrement, 3e répons du Ier nocturne.1. "Celui qui mange et boit indignement, mange et boit sa condamnation." (I Cor. XI, 29.)
12. Le Père a écrit: *Tenta me, Domine, et proba cor meum*. Sous cette forme le texte est inexact. Nous l'avons rétabli d'après le Ps. XXV. Mais le Père qui citait de mémoire pensait peut-être au verset 23 du Ps. CXXXVIII: "*Proba me Deus et scito cor meum*: O Dieu éprouvez-moi et connaissez mon coeur." Toutefois, comme dans ce texte David conjure le Seigneur de constater son innocence et de l'en récompenser, et que, dans le premier, il s'offre plutôt à la rigueur de l'examen de Dieu, il nous semble que celui-ci répond mieux à la pensée du Père.
2. "Un petit enfant nous est né et un Fils nous a été donné." (Is. IX, 6.
3. "Alors... on verra le fils de l'homme venant sur les nuées du ciel avec une grande puissance et une grande majesté." (Matth. XXIV, 30.)
4. *Ego veni ut vitam habeant et abundantius habeant*. (Ioan. X, 10.)
5. *Quia tepidus es, et nec frigidus nec calidus, incipiam te evomere ex ore meo*. (Apoc., III, 16.)
6. *Venite, benedicti Patris mei*. (Matth. XXV, 34.)
7. *Comedit et bibit, et ambulavit in fortitudine cibi illius, quadraginta diebus et quadraginta noctibus, usque ad montem Dei Horeb* (III Reg. XIX, 8.)
9. Ioan, V, 24.
10. "Que l'homme s'éprouve donc lui-même et qu'ainsi il mange de ce pain et boive de ce calice." (I Cor. XI, 28.)
11. "Eprouvez-moi, Seigneur, et sondez-moi." (Ps. XXV, 2.)