OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE.|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE.|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES
  • LE CARACTERE
    [DEUXIEME MEDITATION]
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1927, II, p. 136-141.
  • CO 41
Informations détaillées
  • 1 CAPRICE
    1 CARACTERE
    1 COLERE
    1 CONNAISSANCE DE SOI
    1 DEFAUT DOMINANT
    1 DEFAUTS
    1 EGOISME
    1 ERREUR
    1 ESPRIT ETROIT
    1 ETUDE DES PERFECTIONS DE JESUS-CHRIST
    1 FIDELITE A LA GRACE
    1 HOMME CREE A L'IMAGE DE DIEU
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 INTELLIGENCE
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 MAITRISE DE SOI
    1 PARESSE
    1 PERSEVERANCE
    1 REFORME DU CARACTERE
    1 SUSCEPTIBILITE
    1 TIEDEUR
    1 VOLONTE
    1 VOLONTE PROPRE
    2 ADAM
  • 1875
La lettre

Lorsque Dieu dit: « Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance »(1), il donna au premier homme la possibilité de reproduire cette ressemblance divine avec cette merveilleuse variété de traits qui, par la combinaison des diverses perfections du modèle et des imperfections inhérentes à toute créature, lui auraient donné [de reproduire] le type [exemplaire] dans la variété, de telle sorte que chaque image humaine eût ressemblé, mais par des côtés différents, à Dieu.

Le péché, en déformant l’image, nous donne des caractères déformés. Il faut: 1° les étudier pour connaître le nôtre; 2° examiner comment nous les ramènerons à leur primitive beauté.

I. Qu’est-ce qu’un caractère déformé?

Un caractère qui a subi les ravages du péché: 1° ou dans l’intelligence; 2° ou dans la volonté; 3° ou dans la puissance d’agir.

1° Déformation du côté de l’intelligence. a) Ce sont des ténèbres. On est incapable de remonter aux principes, d’avoir des vues d’ensemble, d’où la disposition aux vues étroites. Le caractère alors s’enfonce dans un entêtement d’autant plus profond qu’il ne voit qu’un côté de la question. Ne lui parlez pas de largeur dans les idées. Il n’en a pas plus qu’il n’aura de largeur dans le dévouement.

b) Quelquefois, un autre élément s’ajoutant, l’intelligence n’est pas cultivée, d’où résulte une médiocrité dans le niveau où l’on s’arrête, une médiocrité dans les modèles de la vie, et si l’on veut élever le niveau, imprimer une action, on se trouve exposé aux plus étranges objections.

c) L’esprit personnel puise aussi sa source dans les ténèbres de l’intelligence. Elle est incapable de s’élever, au-dessus d’elle-même. Elle se replie sur son fond. On ne part que de soi, on ne songe qu’à soi, et tout ce qui ne se rapporte pas à soi est nul. Quel triste caractère que le caractère personnel, et comme il ressemble à Satan se séparant de Dieu pour tout rapporter à lui.

2° La déformation du caractère du côté de la volonté est aussi lamentable.

Volonté capricieuse. -On va en sens divers. On ne s’arrête à rien, parce qu’on change sans cesse d’avis. Caprice, légèreté! Qui dira tout ce que la volonté déformée n’entreprend pas, n’abandonne pas. Elle poursuit un idéal. Elle se blesse de tout. Elle est jalouse de tout. Elle est susceptible à propos de tout. Mais c’est un point si évident, qu’il est inutile d’insister.

3° Déformation [du caractère du côté] de la puissance d’action. -Plus on est fort, plus on est maître de soi. Mais quand la maîtrise sur soi-même échappe, on se laisse facilement emporter. On s’impatiente, on se désespère, on s’exaspère, on se met en colère, et, dans cette voie, où s’arrête-t-on?

La [déformation de] la puissance d’action se traduit aussi par l’impuissance, impuissance volontaire, c’est la paresse. Le paresseux veut et ne veut pas(2). Hélas! Hélas! la paresse arrête bien plus d’âmes qu’on ne le suppose dans le chemin de la perfection.

En quoi mon caractère est-il déformé? En quoi puis-je lui redonner sa forme originale? En lui rendant la ressemblance divine.

II. Que fais-je pour la réformation du caractère? Plusieurs moyens se présentent:

1° Bien étudier, pendant la retraite, et après, les défauts de son caractère et les causes de ces défauts. Sans doute, il y a certaines sources premières qui remontent toutes à la concupiscence, mais il y a diverses manifestations de ce germe empoisonné. Or, c’est ce qu’il faut chercher à connaître positivement. Il faut se placer en face de ces laideurs de l’âme pour en rougir, s’en humilier et les guérir.

2° Il faut faire effort. -Pendant la retraite, Dieu verse la grâce à pleines mains. Recevons-la, profitons-en et fortifions-en notre volonté. Ne tardons pas, mettons sur-le-champ la main à l’oeuvre. Quelquefois la conscience faussée cherche de vains prétextes pour s’excuser. Soyons sincères dans nos efforts. Ne restons pas à la théorie, à la contemplation vaine. Surtout, soyons pratiques, et que la continuité de nos efforts nous donne la féconde habitude de l’empire sur nous-mêmes, car il importe surtout que le caractère réformé ne se détruise pas aussitôt, comme ces empreintes fidèles mais qui, marquées sur le plâtre, se brisent à la moindre chute.

3° Il faut lutter avec ordre. -Si nous commençons par les traits les plus délicats, ils s’effaceront vite s’ils ne reposent pas sur les lignes fondamentales. Donc, examinons l’ordre des reconstructions à suivre. Qu’y a-t-il de plus ébranlé aux fondations, que faut-il indiquer plus positivement? Ce serait une profonde illusion, à moins d’un de ces coups de la grâce, si rares qu’il n’y faut pas compter, d’espérer un changement radical dès le premier jour; pour être durable, dans l’ordre ordinaire des choses, il faut qu’il ait lieu peu à peu. Dieu le fera, mais il a mis six jours à créer le monde. Ah! si dans six ans nous étions transformés, quelle joie ne devrions-nous pas en avoir?

4° Enfin, prenons Jésus-Christ pour modèle. Un des prodiges de son amour est de nous avoir présenté dans sa sainte humanité le plus beau type que nous puissions imiter. Voilà le nouvel Adam, l’Adam céleste. Primus homo de terra terrenus, secundus homo de coelo coelestis(3). Quel encouragement! Déjà un homme, image de Dieu, est dans le ciel. Etudions cet homme, scrutons ses perfections.

Dieu nous donnera de lui ressembler si nous contemplons son anéantissement, sa douceur, sa bonté, sa patience, son amour pour Dieu et les hommes, son zèle pour la gloire de son père, sa prudence et son courage dans le péril, son énergie dans le sacrifice, en un mot, si nous apprenons à mieux découvrir en lui la parfaite copie des perfections divines. Que nous demande-t-il d’imiter plus parfaitement? C’est ce que nous devons nous demander et lui demander. Voilà qu’il nous dit: Exemplum dedi vobis, ut quemadmodum ego feci vobis ita et vos faciatis(4). Etudions ses exemples, faisons comme il a fait, et Dieu nous donnera d’acquérir un grand et beau caractère, un caractère de saint.

Notes et post-scriptum
1. *Faciamus hominem ad imaginem et similitudinem nostram. (Gen. I, 26.)
2. *Vult et non vult piger*. (Prov. XIII, 4.)
3. "Le premier homme, *formé* de la terre, est terrestre; le second homme, *venu* du ciel, est céleste." (I Cor. XV, 47.)
4. "Je vous ai donné l'exemple afin que ce que je vous ai fait, vous le fassiez aussi." (Ioan. XIII, 15.)