OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE.|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE.|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES
  • LA PERFECTION DU RELIGIEUX DE L'ASSOMPTION
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1927, II, p. 170-176.
  • CO 48
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DE L'EGLISE A L'ASSOMPTION
    1 APOSTOLAT
    1 BAVARDAGES
    1 CACHET DE L'ASSOMPTION
    1 CAUSE DE L'EGLISE
    1 CONNAISSANCE DE DIEU
    1 CONTRARIETES
    1 DESESPOIR
    1 ENFANTEMENT DES AMES
    1 ESPRIT SURNATUREL A L'ASSOMPTION
    1 FRERES CONVERS ASSOMPTIONNISTES
    1 HUMILITE
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 MOTIFS DE L'APOSTOLAT
    1 PERFECTION
    1 PERFECTIONS DE DIEU
    1 PREDICATION
    1 PRIERES AU PIED DE LA CROIX
    1 RETRAITE DES RELIGIEUX
    1 SOLITUDE
    1 TRAVAIL DE L'ETUDE
    1 VIE DE PRIERE
    1 VOIE UNITIVE
    2 ABRAHAM
  • 1875
La lettre

La perfection est le but de tous les chrétiens, selon la vocation que Dieu leur a donnée. La perfection des religieux, en général, est au-dessus des autres; mais le religieux de l’Assomption a la sienne propre. Voué à la vie apostolique, s’il consacre ses forces et son temps au chant, à l’austérité, au jeûne, au travail des mains, il lui restera peu de temps soit pour les travaux qui sont le but de sa famille religieuse, soit pour la préparation à ces travaux.

Prenons la parole de saint Pierre, et disons avec lui en parlant des apôtres: Nos vero orationi et ministerio verbi instantes erimus(1), et, bien que nous devions revenir sur la prière et la mortification, examinons d’un premier coup d’oeil ce que doivent être, pour le religieux de l’Assomption, la prière et le ministère de la parole.

I. La prière de l’Assomptioniste.

1° Elle doit être basée sur la contemplation des attributs de Dieu. Ignoti nulla cupido(2): on n’aime pas ce que l’on ne connaît pas. Quoique l’auteur de l’Imitation(3) trouve qu’il vaut mieux aimer que disserter, sans se perdre dans les subtilités de la scolastique, établissons qu’il importe de connaître Dieu et de le connaître selon les principes les plus exacts de la théologie. Je ne connaîtrai jamais assez la plénitude de l’être de Dieu, son indépendance, sa puissance, sa sagesse, sa beauté, sa justice, sa miséricorde. Tout cela veut de ma part des efforts et de très grands efforts pour me maintenir dans le profond sentiment d’admiration de ce que Dieu est en lui- même, et d’adoration à cause de son suprême domaine sur moi.

2° Elle doit se pénétrer de la connaissance de Notre-Seigneur, le vrai modèle de l’homme apostolique. Eh! qui donnera à notre âme le zèle de la gloire de Dieu, l amour des âmes, sinon la méditation du prix auquel Jésus-Christ les a estimées? Il importe donc de revenir souvent et souvent sur cette vie de l’Homme-Dieu, où la divinité prête à l’humanité de notre Sauveur des forces plus grandes pour aimer les pécheurs. C’est par la prière au pied de la croix que nous apprendrons comment Jésus-Christ a enfanté les âmes, et comment, à notre tour, nous devons les enfanter, non pas que nous ayons la vertu qui sortait de lui, mais parce qu’il nous la communiquera si nous la lui demandons.

3° Notre prière doit être solitaire et recueillie. Oui, nous avons besoin de retraite et de solitude, et il faut bien se persuader que si le surcroît de travaux nous ôte le bienfait d’une vie retirée et silencieuse, nous devons y aspirer au moins pour un certain temps chaque année. Mais que d’occasions où nous pourrions nous recueillir et où nous nous dissipons; où nous pourrions nous taire, et où des conversations inutiles nous empêchent de prier comme il conviendrait!

4° Enfin, elle doit être continue dans sa ferveur. Qu’un temps soit donné à la prière, à l’oraison, rien de mieux. Mais si les anges louent sans cesse Dieu dans le ciel, pourquoi séparer notre intelligence et notre coeur de la pensée et de l’amour de Dieu? A ce point de vue, les Frères convers peuvent prier comme les religieux de choeur; les uns et les autres peuvent marcher sans cesse devant Dieu et être parfaits. Si Abraham, au milieu de ses troupeaux et de ses nombreux serviteurs, put atteindre une si haute perfection en se maintenant sans cesse sous l’oeil de Jéhovah, pourquoi, dans tous les instants de la journée, ne pourrais-je pas parvenir à une perfection de prière aussi grande?

Je ne parle pas de la prière de l’Office, il faudra m’en occuper à part.

II. Ministère de la parole.

Qu’il est admirable ce ministère tel que Notre-Seigneur le communiqua à ses apôtres par l’action toute-puissante du Saint-Esprit!

Or, cette évangélisation, confiée aux religieux de l’Assomption, implique:

1° L’amour de l’Eglise. -Nous sommes les soldats du royaume de Jésus-Christ, et comme jamais, l’Eglise n’a été plus attaquée, il importe de la défendre avec le plus ardent amour. Ne nous faisons pas illusion. On ne veut plus de Dieu, de Jésus-Christ, de son Eglise. C’est pourquoi rien n’est beau comme de se dévouer à la cause de Dieu, de Jésus-Christ, de l’Eglise. Certes, ce n’est pas une exagération de dire que tout croule autour de nous. On voudrait entraîner l’Eglise dans la ruine universelle. La beauté de notre vocation consiste à prendre les armes pour elle.

2° La préparation convenable. -Se précipiter dans la mêlée sans les armes nécessaires serait une suprême imprudence. Donc, il faut nous préparer. Il faut lutter vaillamment, mais avec une certaine science, et cette science ne nous étant pas donnée directement comme aux apôtres, il faut l’acquérir par l’étude, et c’est là la sanctification par le travail, si nécessaire à ceux qui veulent se consacrer au combat de Dieu. Mais quelle persévérance, quel courage au milieu des dégoûts de cette préparation, quel esprit surnaturel n’y faut-il pas apporter! Car, en même temps, nous avons à nous livrer à des travaux qui ressortent de notre intelligence et nous avons à les tremper dans des intentions divines.

3° L’action. -Nous sommes prêts pour la lutte. Or, voici un double danger auquel nous sommes exposés. Ou bien nous triompherons, ou bien nous serons vaincus.

Si nous sommes vaincus, le découragement ne peut manquer de s’emparer de nous. Or, c’est le moment, au contraire, de redoubler de confiance. Voilà l’heure solennel le de l’espérance. Pourquoi? Parce que nous ne sommes jamais plus forts que lorsque nous nous sentons plus faibles(4). Les jugements humains n’ont ici aucune place. Jésus-Christ n’a-t-il pas vaincu l’enfer par sa mort? Et les hommes apostoliques ne font l’oeuvre de Dieu que dans les contradictions. Je dois donc m’attendre à toute contradiction et persécution et ne pas me laisser décourager.

Mais je puis avoir des succès, et voilà précisément le plus grand danger, car, en faisant du bien aux autres, je m’expose à me faire beaucoup de mai. Donc, c’est dans une très grande humilité que je dois abriter le peu de bien que je suis capable de faire. Et à ce point de vue, le religieux de l’Assomption voyant le peu qu’il fait, alors qu’il a paru faire beaucoup, doit traiter rondement les succès qu’il peut avoir, les rapportant tous très simplement et très résolument à Dieu.

Seigneur, faites que je sois un homme de prière, un homme d’évangélisation, et que dans le travail je me sanctifie, je procure l’avancement de votre règne et le salut des âmes. Ainsi soit-il.

Notes et post-scriptum
1. "Quant à nous, nous serons tout entiers à la prière et au ministère de la parole." (Act. VI, 4.)
2. "On ne désire pas ce qu'on ignore." Aphorisme du poète Ovide (*Art d'aimer*, III, 397) devenu un dicton philosophique.
3. L. I, ch. I, 3.
4. *Cum enim infirmor tunc potens sum*. (Cor. XII, 10)