- OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE.|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES
- DU DON DE SOI-MEME
- Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1927, II, p. 179-181.
- CO 50
- 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
1 CHARITE ENVERS DIEU
1 DETACHEMENT
1 DON DE SOI A DIEU
1 INCONSTANCE
1 LUTTE CONTRE LE PECHE
1 VIE DE SACRIFICE
1 VOLONTE PROPRE - 1875
Au fond, la vie religieuse consiste à se donner, et la perfection de cette vie consiste dans la manière dont on se donne.
Les degrés du don de soi-même.
Le don de soi-même a divers degrés. Quel est celui que j’ai atteint?
1° On s’est donné et on s’est repris aussitôt, et parce qu’on s’est donné jadis, on croit que le don de soi-même persévère. Etrange illusion! Je me suis repris bien vite, et je me suis hâté d’abandonner cette vie, qui appartenait ou devait appartenir à Dieu, pour vivre de ma vie propre. Je vis avant tout de moi-même. Je ne suis mû que par des motifs personnels. Il est facile de se laisser aller à cette vie qui, n’impliquant aucun effort intérieur contre les défauts de mon âme, me laisse toute liberté pour me révolter contre les devoirs de la vie extérieure que j’accomplis fort mal du reste, et contre lesquels je murmure sans cesse. Et avec cela, je crois m’être donné!
2° On s’est donné, on s’est repris. On se donne aujourd’hui, on se reprend bien vite. Demain, on se donnera encore, pour se reprendre après-demain. Ainsi va la vie de bien des religieux; fluctuation perpétuelle entre le bien et le mal, la ferveur et les chutes, d’où résulte un état d’inconstance des plus dangereux. Facilité à promettre, plus grande facilité à manquer à ses engagements. On veut et on ne veut pas, et on est ainsi emporté à tout vent, non pas de doctrine, mais d’impression. Hélas! n’est-ce pas l’état où je flotte depuis mon entrée dans la vie religieuse, et ne ferai-je jamais un effort pour en sortir?
3° On s’est donné peut-être sans enthousiasme, peut-être après de longs combats de la chair contre l’esprit. On a goûté par avance l’amertume du sacrifice, on a essayé le poids de la croix et, après avoir sérieusement médité sur les années éternelles(1), on s’est donné. Et venerunt flumina et flaverunt venti(2). Rien n’y a fait. Ce religieux qui a vu ce qu’il aurait à souffrir, avec réflexion, avec défiance de lui-même, avec une absolue confiance en Dieu, s’est donné sans aucune réserve. Complètement dépouillé de lui-même, perdu dans le sein de celui pour qui il veut vivre très purement et parfaitement, il se donne par l’obéissance et l’amour. L’obéissance est la règle de sa vie; l’amour en est l’ardeur qui purifie tous ses sentiments sanctifie ses moindres démarches. Tout en lui appartient chaque jour un peu plus à Dieu. Et si la faiblesse humaine veut, à certains moments, se ressaisir, cet amour est un aiguillon qui le pousse plus énergiquement hors de lui-même, hors de sa volonté, pour le précipiter avec plus d’impétuosité dans la volonté et le coeur de Dieu.
Seigneur, faites que cette manière de se donner soit la mienne!
2. "Et les fleuves sont venues et les vents ont soufflé." (Matth. VII, 27.)