OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE.|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE.|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES
  • ESPRIT DE DETACHEMENT
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1927, II, p. 255-258.
  • CO 70
Informations détaillées
  • 1 AMOUR-PROPRE
    1 CHOIX
    1 CONSEQUENCES DU PECHE
    1 DETACHEMENT
    1 ESPRIT D'INDIFFERENCE
    1 LIBERTE
    1 MISERICORDE DE DIEU
    1 REFORME DU COEUR
    1 VOEU DE PAUVRETE
    1 VOIE UNITIVE
    2 GREGOIRE I LE GRAND, SAINT
    2 PAUL, SAINT
  • 1875
La lettre

L’esprit de détachement implique trois conditions: 1° la rupture de certaines chaînes; 2° la possession de la liberté; 3° l’union à Dieu.

I. Rupture de certaines chaînes.

1° Si je veux pratiquer le détachement, il faut que je me dépouille de ce que j’ai, et telle est la raison du voeu de pauvreté sur lequel je ne saurais trop revenir. Que d’attaches par lesquelles je suis sans cesse retenu! Je tiens à mes biens, je tiens à une foule d’objets, et sans cesse je me surprends m’accrochant, pour ainsi dire, à la terre dont je ne puis que mépriser la poussière et la boue. Oh! quel examen ne dois-je pas faire pour voir où j’en suis à cet égard!

2° Rupture avec l’amour-propre. -« C’est peu, dit saint Grégoire, de se détacher de ce que l’on a, si on ne se détache aussi de ce que l’on est. »(1) Tout ce qu’il y a d’imparfait dans mon caractère, ma nature, mes idées, mes habitudes, doit donc être impitoyablement détruit. Où en suis-je? En quelle estime de moi-même ne me tiens-je pas?

3° Rupture avec mon coeur. -Oui, dans le fond de mon coeur il est des affections que je dois combattre, d’autres que je dois purifier. Quel travail! Des regards imprudents, des familiarités innocentes en apparence, un certain laisser-aller; n’ai-je pas à surveiller tout cela attentivement? Mon coeur, qui appartient à Dieu, doit-il être enchaîné aux créatures?

Mon Dieu! faites-moi sentir à quelle hauteur vous élevez ceux qui aspirent à être affranchis par la vérité et à posséder la liberté de vos enfants.

II. Possession de la liberté chrétienne.

A proprement parler, nous ne sommes libres que pour vouloir le bien avec choix. Moins je fais le bien, moins je suis libre, jusqu’à ce que je tombe dans l’esclavage du péché: Omnis qui facit peccatum servus est peccati(2).

Oui, le péché est un principe d’esclavage; et plus je pèche, plus ma volonté diminue. Par contre, plus je fais le bien, plus ma liberté augmente. Le démon n’est point libre, il est esclave.

Dieu, infiniment bon, ne peut pas vouloir le mal, et il est infiniment libre dans ses choix, tellement libre, que la dernière raison de ses actes extérieurs, c’est sa volonté infiniment parfaite.

Pour moi, je sais donc que plus je pèche, moins je suis libre; plus je vis selon la volonté de Dieu, plus ma liberté grandit. Ah! quand aurai-je cette plénitude de liberté qui me rendra tout facile! C’est là le résultat de longs efforts. Il faut savoir souffrir, se donner, s’immoler, pour acquérir la vraie liberté.

Mais, une fois parvenu à cette liberté réelle que donne la vérité, de quoi n’est-on pas capable? Les saints jouissaient de cette liberté, parce qu’ils ne craignaient qu’une chose: offenser Dieu. Tout le reste leur était indifférent: la souffrance, la persécution, la faim, la soif, les coups, la mort, rien ne les émouvait. In his omnibus superamus propter eum qui dilexit nos(1). Ils ont si bien tout surmonté, qu’ils ont conquis le monde à Jésus-Christ.

III. Union à Dieu.

Nul ne peut servir deux maîtres à la fois. Mais si la pensée de Dieu m’est habituellement présente, si, voyant d’un côté le monde, de l’autre Dieu, mon seul et unique Maître, je me tourne vers ce Maître que je dois aimer uniquement si je me nourris de la pensée de ses perfections, de tout ce qu’il a fait pour moi, ne me détacherai-je pas plus facilement des créatures? N’irai-je pas me fixer plus énergiquement en Dieu, ainsi qu’il convient? Nostra autem conversatio in coelis est(4), dit saint Paul.

En effet plus on s’attache à ce qui est en haut, plus on se détache de ce qui est en bas.

Oh! quand serai-je entièrement détaché des créatures, du péché et de moi-même? Quand serai-je entièrement libre? Quand ne ferai-je qu’un avec Dieu?

Notes et post-scriptum
1. *Et fortasse laboriosum non est homini relinquere sua, sed valde laboriosum est relinquere semetipsum*. (Greg. Hom. 32, in Matth. Ev.)
2. "Quiconque commet le péché est esclave du péché." (Ioan. VIII, 34.)
3. "Parmi tous ces maux, nous triomphons par la vertu de Celui qui nous a aimés." (Rom. VIII, 37.)
4. "Pour nous, nous vivons déjà dans le ciel." (Phil. III, 20.)