OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE.|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE.|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES
  • L'ESPERANCE
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1927, II, p. 271-277.
  • CO 74
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DE JESUS-CHRIST POUR LES HOMMES
    1 BIEN SUPREME
    1 BONHEUR
    1 CIEL
    1 CONCUPISCENCE DES YEUX
    1 ESPERANCE
    1 ETUDE DES PERFECTIONS DE DIEU
    1 FIDELITE A LA GRACE
    1 FOI
    1 GRACE
    1 JESUS-CHRIST AUTEUR DE LA GRACE
    1 JESUS-CHRIST MEDIATEUR
    1 LUTTE CONTRE LE CORPS
    1 PAUVRETE
    1 POSSESSION DE DIEU
    1 VIE DE PRIERE
    1 VOEU DE CHASTETE
  • 1875
La lettre

L’âme a, d’une part, un besoin insatiable de bonheur; de l’autre, quand elle réfléchit dans le siLence des passions, elle sent bien que rien ne peut ici- bas le lui procurer. Mais si la foi, lui révélant les mystères de son origine, lui montre Dieu, sa beauté sa perfection elle reconnaît aussitôt qu’en effet Dieu, par cela même qu’il est le bien infini, peut seul lui donner le bonheur. Mais Dieu est trop au-dessus d’elle pour qu’elle soit capable de l’atteindre.

Or, voici que Dieu s’incline vers elle. Etudions: 1° les avances de Dieu; 2° la manière dont l’âme doit y correspondre.

I. Avances de Dieu.

Nous ne saurions trop le répéter, Dieu n’a pas besoin de nous. Mais il est. Il est l’Etre par excellence, et de même qu’il est la plénitude de l’être, il est la plénitude du bien, et comme le bonheur est la possession du bien, et que le plus grand bonheur consiste dans la possession du plus grand bien, le plus grand bonheur ne peut se trouver que dans la possession de Dieu. Donc l’âme, avec le besoin naturel du bonheur, si rien ne trouble sa raison, éclairée par la foi, comprendra que la possession de Dieu peut seule lui donner le bonheur auquel elle aspire.

Mais par elle-même, l’âme est incapable de faire la conquête de Dieu; il habite une lumière inaccessible, en sorte que, l’âme affamée de bonheur, voyant devant elle le terme de ce bonheur et ne pouvant l’atteindre, est comme le voyageur qui, contemplant les rives, de la patrie, ne peut y aborder. L’homme ne peut aller vers Dieu, mais Dieu viendra vers l’homme. Comment cela? Par des secours opportuns, par la grâce. Qu’est donc la grâce? C’est l’aide que le Fils de Dieu, en se faisant homme, est venu apporter à l’humanité. une première grâce sans doute a été accordée à l’homme quand il lui a été donné de connaître Dieu à travers les voiles de la foi. Mais si l’homme ne faisait que croire, il serait, en quelque sorte, condamné au supplice des démons qui, au fond de l’enfer, croient et tremblent, dans un éternel désespoir de ne pouvoir posséder Dieu. Non, Dieu est père, et il ne donnera pas un scorpion à l’enfant qui lui demande un poisson (1). Dieu donnera un aide par son Fils, et comme il faut que tout commence par Dieu, ce ne sera pas l’homme qui demandera le premier la grâce, ce sera Dieu qui commencera par l’offrir.

Mais de même que l’homme par la foi croit en Dieu, de même par l’espérance il doit avoir confiance en lui, et c’est logique. Qu’est Dieu? Le bien suprême. Donc, Dieu est infiniment bon. La connaissance de sa bonté implique un acte de confiance. Il est l’Etre in fini, la bonté in finie. La bonté infinie ne peut vouloir que se manifester telle qu’elle est à ses créatures. Et pourtant, il faut que Dieu aide l’homme à faire cet acte [de confiance]. Etrange situation que celle de l’homme qui désire le bonheur et qui a besoin d’un secours pour espérer le posséder là où il est. Mais après les avances de Dieu, l’homme, dans sa confiance, a besoin d’agir. Il agira en demandant le secours: il agira en correspondant à la grâce.

Je veux encore examiner, étant donnée la la grâce de Dieu, les devoirs qui me sont imposés pour arriver au terme que je me propose.

II. Moyens de développer la vertu d’espérance.

La foi et l’espérance sont soeurs. Plus je connaîtrai Dieu par la foi, plus je désirerai le posséder comme mon bien suprême. Je dois donc songer à plonger dans les perfections de Dieu pour comprendre de quel prix est celui qui disait au père des croyants; « Je serai ta récompense surabondante. Ego ero merces tua magna nimis. »(2) Donc nécessité de l’étude des perfections de Dieu, dont je suis appelé à jouir par la méditation et la contemplation.

Et comme par moi-même je ne puis aller à Dieu, que mon seul et unique médiateur est Jésus-Christ [plusieurs dispositions me sont nécessaires]:

1° Confiance absolue dans le Fils de Dieu fait homme par amour pour moi, étude de tous les moyens que Jésus-Christ me prescrit par ses exemples, sa prédication, ses sacrements, son Eglise. En outre, confiance sur l’action secrète, intime, de ses grâces et de ses dons merveilleux, dont la source, après tout, n’est autre que la vertu de son sang répandu par amour pour moi.

2° Désir de mon salut. Qu’ai-je à faire ici-bas que mon salut, c’est-à-dire qu’ai-je à faire que de me mettre en état de posséder Dieu pendant toute l’éternité? Donc, je dois, fortifié par la grâce, faire effort et combattre.

3° [prière.] Mais la grâce semble quelquefois se retirer, sans doute parce que je ne la demande pas. La vie d’espérance est une vie de prière; il faut que je devienne un homme de prière dans toute l’énergie du mot. Si ma prière n’a pas été exaucée, c’est que j’ai mal demandé. Il faut que je demande bien, et je suis certain de recevoir. Petite et accipietis.

4° [Détachement de ce qui n’est pas Dieu.] Mais la possession du bien qui est Dieu est quelquefois entravée par ma faute. Je me trouve placé entre deux biens: ceux de la terre et celui du ciel, et telle est ma faiblesse et ma corruption, qu’il m’est arrivé de préférer les biens de la terre. Ici intervient la parole de Jésus-Christ: « Nul ne peut servir deux maîtres. »(3) « Nul ne peut avoir un trésor sur la terre et un autre dans le ciel. »(4) Où est le mien, et quel maître veux-je servir? « Si Jéhovah est Dieu, il faut le suivre; si Baal est Dieu, il faut le suivre. »(5) Eh bien! ne me suis-je pas égaré? N’ai-je pas suivi un autre maître que Jéhovah?

Pour posséder le bien absolu, il me faut détacher de ce qui n’est pas Dieu.

Or, deux détachements à pratiquer se présentent: Détachement des biens de la terre, par la pauvreté; mais au delà, détachement de la partie inférieure de moi-même, détachement de mon corps et de ses jouissances, détachement des sens et de leur volupté, par la chasteté, par la pureté.

Le religieux élève ce détachement jusqu’au voeu.

Ah! Seigneur, où en suis-je? Et parce que je vous ai voué ma pauvreté et ma chasteté, suis-je assez pauvre et assez chaste pour pouvoir, ô Bien suprême, vous posséder un jour surabondamment? Grave question dont la solution est indispensable à mon salut.

Notes et post-scriptum
1. *Aut si piscem petierit, numquid serpentem porriget ei? (Matth. VII 10.) -Aut si petierit ovum, numquid porriget illi scorpionem*? (Luc. XI, 12.)
2. Gen. XV, 1.
3. *Nemo potest duobus dominis servire*. (Matth. VI, 24.)
4. *Nolite thesaurisate vobis thesauros in terra... Thesaurisate vobis thesauros in coelo*. (Matth. V, 19, 20.)
5. *Si Dominus est Deus, sequimini eum; si autem Baal, sequimini illum*. (III Reg. XVIII, 21.)