OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE.|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE.|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES
  • AMOUR DE L'EGLISE
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1927, II, p. 305-310.
  • CO 81
Informations détaillées
  • 1 ADMINISTRATION DES SACREMENTS
    1 AMOUR DE L'EGLISE A L'ASSOMPTION
    1 COMBATS DE L'EGLISE
    1 COMMUNION DES SAINTS
    1 CONTRARIETES
    1 EGLISE CELESTE
    1 ENNEMIS DE L'EGLISE
    1 EPREUVES DE L'EGLISE
    1 ETERNITE
    1 FIDELES
    1 GRACE
    1 JESUS-CHRIST CHEF DE L'EGLISE
    1 MAUVAIS CHRETIENS
    1 MECHANTS
    1 PASSION DE JESUS-CHRIST
    1 PERES DE L'EGLISE
    1 VIE DE JESUS-CHRIST
    2 HERODE I LE GRAND
    3 EMMAUS
  • 1875
La lettre

Vidi sanctam civitatem, Ierusalem novam, descendentem de coelo a Deo, paratam sicut sponsam ornatam viro suo(1). -La vision de l’Apôtre nous montre un prodige qui a besoin d’explication. Cette cité sainte, c’est incontestablement l’Eglise. Mais quand l’Eglise descend-elle ainsi? Est-ce à la fin des temps, quand Jésus-Christ, couronné de gloire par son Père, couronnera son Epouse à son tour pour le triomphe éternel des élus? Je ne saurais te croire. Jésus-Christ est descendu sur la terre, il faut que son Epouse l’y accompagne; et de même que Jésus-Christ s’est couronné de gloire par sa mort, de même les parures de la Jérusalem nouvelle sont les épreuves, les souffrances, la persécution. Sa robe de pourpre est trempée dans le sang de ses fils, et elle est prête, comme une épouse ornée pour son époux, parce qu’elle a su [revêtir] les parures qui devaient lui convenir: Post haec vidi civitatem

Si le sens que je donne aux paroles de l’Apocalypse est vrai (non que je veuille en repousser un autre), afin de m’exciter à l’amour de l’Eglise à cause de ses grandeurs et de ses triomphes, je dois surtout m’animer à son amour par la méditation de ses combats, de ses douleurs et de ses humiliations, et je veux faire ressortir cette conclusion du triple mystère de son origine, de sa nature, de ses destinées.

1° Son origine, je la trouve à la croix. 2° Sa nature est l’union de Dieu avec l’homme, à l’imitation de celle qui s’est opérée en Jésus-Christ. 3° Sa destinée est de combattre, d’être vaincue et de triompher par ses défaites. Etrange spectacle, que nous promet la plus admirable des oeuvres à laquelle nous puissions nous dévouer.

I. Origine de l’Eglise.

Dieu, en créant les hommes, avait voulu établir sa société avec eux dans une communication de vérités, de lois, de bienfaits, de sa part; et dans la reconnaissance, de la part de l’homme, des droits de son Créateur. Cette société, brisée par le péché, a été reprise en sous-oeuvre par le Fils de Dieu. Mais voyez ce qu’il lui en a coûté.

Il lui a fallu reconquérir l’humanité, devenue l’esclave de Satan. Pour cela, il s’est fait homme. Il a été persécuté dès sa naissance par Hérode. Il a vécu dans le travail. L’exil avait été son partage, pour montrer à son Eglise qu’elle devrait se considérer comme une étrangère ici-bas. Sa vie apostolique a été semée de contradictions. Le bien qu’il faisait a été tourné en dérision. Puis il est livré à ses ennemis, et le Roi des martyrs meurt dans les supplices les plus affreux, et d’une mort infâme. Après son dernier soupir, un soldat d’un coup de lance lui ouvre le côté, et de son coeur jaillit du sang et de l’eau. Les saints Pères ont vu là l’origine de l’Eglise. Un Dieu mourant pour les hommes, voilà l’Auteur de l’Eglise. Il en sera l’Epoux, il en sera le Chef; Chef et Epoux, il montrera à l’Eglise, née de sa mort, qu’elle doit souffrir à son tour pour être digne de lui.

L’origine de l’Eglise me montre l’amour que Jésus-Christ lui porte, puisqu’il souffre autant pour elle, et l’amour que Jésus-Christ me porte, puisque pour me sauver par elle il veut passer par de telles douleurs. Ah! qu’elle est belle dans sa naissance, où le sens humain se trouve entièrement confondu par les voies de Dieu et par les moyens qu’il emploie! Et quel modèle, si je veux travailler pour l’Eglise, que la méditation des douloureux travaux de son Fondateur!

II. Nature de l’Eglise.

Qu’est-ce que l’Eglise? La société de Dieu avec les hommes, et cette société est basée sur la vérité, la loi nouvelle, la grâce.

La vérité, les hommes n’en veulent pas, et les païens, les hérétiques, les incrédules persécuteront les témoins de cette vérité, et ils les mettront à mort. Ceci durera surtout pendant les premiers siècles.

La loi nouvelle, elle déplaira aux hommes corrompus qui, par le mensonge, défendront leurs vices et leurs passions. Ah! ils ne voudront pas de son règne. Et ici les faux frères s’uniront aux ennemis déclarés, et l’Eglise souffrira. Elle souffrira encore de la loi qui la régit à l’intérieur. Elle a sa constitution comme société sur la terre, et les hommes n’en voudront pas. Ils la combattront, et c’est la persécution qu’elle souffre en ce moment.

Enfin, l’Eglise est fondée sur la grâce, et j’entends par là soit l’amour que Jésus-Christ lui porte, soit les dons qu’elle est chargée de distribuer. Et ici, quel spectacle! L’Eglise donne les sacrements de Dieu, et les hommes en abusent. Ils les profanent, ils les tournent en dérision. N’est-ce pas ce qui se voit chaque jour? Et pourtant, quoi de plus beau qu’une institution chargée de distribuer aux hommes la vérité divine, la loi divine, les dons de Dieu? Veux-je me consacrer à son service?

III. Destinée de l’Eglise.

La destinée de l’Eglise est d’être, comme son Fondateur, un signe perpétuel de contradiction; d’être la condamnation des méchants et l’épreuve des bons.

Signe de contradiction. -Quelles oppositions ne soulève-t-elle pas? A quels reproches n’est-elle pas exposée? Et pourtant, elle passe comme Jésus au milieu des Juifs, qui voulaient le lapider(2).

Condamnation des méchants. -Elle porte avec elle, par le miracle même des contradictions qu’elle éprouve et dont elle finit toujours par triompher, des preuves si manifestes de ses droits; elle est tellement, dans sa durée, un miracle perpétuel, que l’on est bien forcé de dire: « Le doigt de Dieu est là »(3). Et si le doigt de Dieu est là, donc l’Eglise est divine; donc elle est vraie, donc il faut lui obéir, donc ceux qui la persécutent sont dignes de toute condamnation.

Epreuve des bons. -Toutefois, de même que les disciples d’Emmaüs exprimaient à Jésus ressuscité leurs doutes sur la résurrection, de même les chrétiens fidèles ont quelquefois des tentations de doute sur les destinées de l’Eglise. Grande et terrible épreuve que celle-là! Epreuve pleine de consolation, car s’ils persévèrent, leur foi est forcée de reconnaître l’assistance de Dieu dans le péril.

Mon Dieu, faites que j’aime votre Eglise

à cause de Jésus votre Fils, qui l’a fondée;

à cause de la société qu’elle me permet d’avoir avec vous,

à cause de sa destinée si miraculeuse sur la terre,

à cause de la destinée éternelle qu’elle me promet au ciel.

Notes et post-scriptum
1. "Et je vis descendre du ciel, d'auprès de Dieu, la ville sainte, une Jérusalem nouvelle, vêtue comme une nouvelle mariée parée pour son époux." (Apoc. XXI, 2.)
2. *Ipse autem, transiens per medium illorum, ibat*. (Luc. IV, 30.)
3. *Digitus Dei est hic*. (Ex. VIII, 19.)